Le mythe Marie Curie conté par Lévy-Leblond
Dans le cadre des jeudis scientifiques, organisés à la bibliothèque L’Odyssée (voir encadré), le professeur de l’université de Nice JeanMarc Lévy-Leblond a tenu une conférence sur Marie Curie, icône de la science, et première femme à avoir reçu un prix Nobel. « Tout le monde connaît son nom. Il y a des avenues, des boulevards, des lycées qui le portent. Mais derrière le mythe Marie Curie, il y a des aspects intéressants et parfois surprenants », a commencé le physicien.
Une famille marquée par la science
Marie Curie, de son vrai nom Maria Sklodowska, naît le 7 novembre 1867 à Varsovie dans « une famille marquée par la science, par la physique, génération après génération. Tous des gens de talent, sinon de génie. On compte quatre prix Nobel scientifique, un prix Nobel de la paix, ce n’est pas rien ». Elle réussit brillamment ses études secondaires, «maisàcette
époque Varsovie est sous le joug de l’empire russe, et les universités ne sont pas ouvertes aux femmes ». Elle doit partir poursuivre ses études à l’étranger. « Sa soeur aînée,
Bronia, s’installe d’abord à Paris pour étudier la médecine. Marie s’engage comme préceptrice dans une famille riche. » Elle y restera quelques années pour constituer des économies et partir à son tour. « Là, elle tombe amoureuse du fils de la famille, laquelle voit d’un mauvais oeil cette alliance avec une jeune fille modeste et les sépare. »
Marie Curie s’inscrit à la Sorbonne,
à Paris, en 1891. C’est là qu’elle rencontre Pierre Curie, de 8 ans son aîné. «Il s’agira d’abord d’une simple collaboration scientifique. Mais ils finiront par tomber amoureux. » Ensemble, ils ont deux filles : Irène, qui suivra les traces de sa mère, et Ève, qui poursuivra une carrière plus littéraire.
Deux prix Nobel
Ils poursuivent des recherches autour des « rayons uraniques », découverts par Henri Becquerel, et découvrent à leur tour non pas un, mais deux éléments nouveaux : le polonium et le radium. Pour cela, ils partagent le Nobel de physique de 1903 avec Henri Becquerel. « Marie Curie est la première femme à recevoir cette distinction. Elle va servir de porte-drapeau à de nombreux combats féministes, mais ne prendra jamais de position publique. »
Pierre Curie meurt quelques années plus tard, en 1906. « Il est renversé en traversant une rue près du pont Neuf, à Paris. » Marie Curie, elle, poursuit sa carrière scientifique. « En 1911, sa relation avec Paul Langevin est révélée dans la presse et déclenche un scandale et une violente campagne de dénigrement. » Un second prix Nobel lui est attribué la même année. Pendant la guerre, elle se consacre, avec sa fille Irène, au développement de la radiologie et à la formation des infirmières dans l’utilisation d’appareillages à rayons X. « Petit à petit, elle prend ses distances avec ses recherches et se consacre à la quête de financements pour son laboratoire. » Elle partira notamment aux ÉtatsUnis.
Elle décède d’une leucémie en 1934 « avant de savoir que sa fille Irène recevra ellemême un prix Nobel, qu’elle partage avec son mari Frédéric Joliot-Curie, en 1935 ». Le couple Curie sera transféré au Panthéon en 1995.