Pagaille à la SNCF : l’exécutif hausse le ton
Alors que le trafic national des trains était toujours très perturbé hier, les conducteurs et contrôleurs sont attaqués par leur direction et leur tutelle sur la légitimité de leur action
Edouard Philippe a dénoncé, hier, un « détournement du droit de retrait » à l’impact « inacceptable » sur le trafic de la SNCF toujours très perturbé au premier jour des vacances scolaires, demandant à la direction d’examiner toutes les suites, « y compris judiciaires ». « Nous sommes aujourd’hui au premier jour des vacances de la Toussaint, c’est trois millions de Français qui doivent, un jour comme celui-ci, prendre le train. Or ils sont pour un très grand nombre d’entre eux largement empêchés », a déclaré le Premier ministre à la mi-journée dans les locaux de la gare de l’Est. Le trafic ferroviaire dans toute la France était très perturbé, comme la veille, par des contrôleurs et conducteurs qui ont décidé d’exercer un droit de retrait après un accident qui a fait onze blessés mercredi, dont un conducteur. Ilyaun « détournement du droit de retrait qui s’est transformé en grève sauvage. Cette grève sauvage a un impact inacceptable pour des dizaines et des dizaines de Français », a insisté le Premier ministre qui a ajouté avoir « demandé à la SNCF d’examiner toutes les suites qui pouvaient être données et notamment judiciaires ». Plus tôt dans la matinée, le patron de la SNCF Guillaume Pepy a jugé « pas admissible » le mouvement qu’il a qualifié de « grève surprise ».
« Le bras de fer s’est engagé sur le volet juridique. Nous considérons que c’est un droit de retrait car le danger n’est pas écarté », a expliqué, hier, Didier Mathis (Unsa ferroviaire). Quant aux mises en demeure de reprendre le travail par la direction, elles sont « illégales et constituent une entrave au droit de retrait, ce qui est un délit pénal », a averti FO Cheminots dans un communiqué [lire ci-dessous].
SUD-Rail, ainsi que la CGT-Cheminots, FO-Cheminots et la FgaacCFDT, contestent le mode d’exploitation « équipement agent seul » qui permet de faire circuler des trains sans contrôleur, évoquant des risques de sécurité pour les voyageurs, alors que selon la direction, « il existe depuis des dizaines d’années ».
La bataille de l’opinion publique
Une réunion de plus de cinq heures dans la nuit de vendredi à samedi entre la direction et les syndicats s’est soldée par un échec.
La direction prévoyait en conséquence un service très perturbé sur les réseaux TER, Transilien et Intercités, et aucun train Ouigo en circulation, mais un trafic TGV normal sur les axes Est et Nord et 9 trains sur 10 sur les axes Atlantique et SudEst.
« Ce qui est un peu frustrant, c’est d’être prévenu au dernier moment », estime Adrienne Sauvage, interrogée par l’Agence France Presse à la gare Saint-Lazare. « Là je regardais encore sur l’appli, le train n’était pas annulé, donc je l’ai appris en venant ici. ». Mais, nuance-t-elle, «jepeux comprendre aussi les mouvements sociaux ». A Lyon Part-Dieu, Sylvaine et Jean-Louis devaient faire Clermont-Ferrand-Paris en intercités. Mais leur train a d’abord été retardé d’une heure puis annulé. Alors ils ont sauté dans un train pour Lyon et espéraient pouvoir prendre un TGV pour Paris. « C’est sûr que ça va être plus cher de reprendre deux billets mais on doit absolument être à Paris ce soir car on part en vacances à Londres demain. On va voyager debout c’est sûr, mais bon il ne faut pas se prendre la tête », explique Sylvaine, philosophe.
Pour Alexis Garabédian, interrogé à Saint-Lazare, « la grève n’est plus la bonne méthode » pour les syndicats de la SNCF, « puisque, à chaque fois, on voit qu’ils perdent la bataille de l’opinion publique, et c’est défavorable pour eux. » Dans un communiqué, SUD-Rail fustige de son côté « la stratégie consistant à monter les usagers contre les agents SNCF en déclarant que c’est une grève illégale ».