Les sept lauréats du Festival du cinéma fantastique
La troisième édition du festival mentonnais a rendu public son palmarès, hier, au casino Barrière. Certains des réalisateurs n’avaient jusqu’alors reçu aucun prix. Le début d’une riche carrière ?
Dans un genre cinématographique où peu de festivals emblématiques ont su s’imposer, Menton fait – déjà – figure de belle opportunité pour les réalisateurs de se faire connaître. Une entrée dans le palmarès de ce jeune festival du film fantastique, qui fêtait cette année ses trois ans, représentant beaucoup pour un futur rayonnement.
Hier, lors de la remise des prix, sept films de grande qualité ont été récompensés. Résumé d’une cérémonie jonglant entre émotion, angoisse et discours engagé.
☛ Prix du jury jeune (et de la photo) : Article 19-42, de Julien Becker. C’est une première. Jamais un jury jeune n’avait jusqu’alors délibéré au festival de Menton. « C’est un honneur pour nous d’être présents et de rencontrer de telles personnes. Sans mauvais jeu de mots c’était fantastique », assure l’un des six jurés. Monté sur scène aussitôt son nom prononcé, Julien Becker souligne qu’il s’agit du premier prix que son court-métrage reçoit. « Cela fait très très plaisir. On se dit qu’on n’a pas fait ça pour rien, vu que cela a plu à certains », clamet-il. N’imaginant pas devoir remonter sur la tribune quelques minutes plus tard. Pour la photographie, cette fois-ci.
« Je ne suis pas du tout objectif mais le travail que Reynald Capurro a fait est remarquable, reprend le réalisateur. Il a déjà fait pas mal de courts et vient de travailler sur son premier long-métrage. Je suis content pour lui, sans directeur photo il n’y a pas d’image… ou pas la même. Et nous sommes complices, nous avons discuté, il m’a beaucoup aidé. Entre autres pour le jeu d’acteurs. »
☛ Meilleur film d’animation : Otilia (Histoire d’un rêve brisé), d’Ion Cebotari. Sans se départir de son humour, malgré l’émotion, le réalisateur se montre bref : «Jeneveux pas vous torturer avec mon français mais merci beaucoup. Merci à ma femme, aussi. Sans elle je n’aurais jamais rien créé. » Ceux qui aiment regarder les génériques jusqu’au bout auront par ailleurs remarqué qu’Otilia est le nom de… sa propre fille. À qui il dédie logiquement son oeuvre.
☛ Meilleure musique : Pleine Campagne. Un nouveau prix au palmarès méritait bien un trophée original, spécialement prévu pour féliciter un compositeur. Et c’est Rosario Gibaldi, un artiste de Castillon – village partenaire du festival depuis ses débuts – qui l’a conçu, avant qu’il ne soit remis au réalisateur Pierre Mouchet. Et, par extension, à celui qui a inventé ladite musique originale, Olivier Rabat. «Je suis vraiment content que nous recevions ce prix. Mon court-métrage avait déjà été primé, mais jamais pour la musique. C’est super », remercie Pierre Mouchet.
☛ Meilleure actrice : Amandine Boulet, dans Door. Excitée par la nouvelle, la jeune femme (bien plus souriante que dans le film d’épouvante) exprime un sentiment «bizarre ». « C’est mon premier prix », souffle-t-elle. Ajoutant que les films fantastiques « ne sont pas assez représentés », avant de remercier l’organisation du festival, Fabrice Ceccherini en tête.
☛ Meilleur scénario : Guillaume Levil, pour Portraitiste. Bien qu’absent, le scénariste du plus poétique des films fantastiques n’a pas oublié de laisser un petit mot. Au cas où… « Non seulement vous habitez dans la plus belle région de France, mais en plus vous avez bon goût, y dit-il. Public, jury, vous êtes les héros des temps modernes. Vous qui regardez ou primez des courts-métrages que la société n’a pas validés. Alors que ce sont des outils fabuleux pour rêver… »
☛ Meilleur acteur : Hervé Sogne, dans 22 h 22. Alors que revoilà Julien Becker... qui monte une troisième fois sur scène. Pour un autre film, cette fois-ci. Et au nom de son acteur, mutique mais si expressif, malheureusement pas sur place pour réagir. Un discours inspirant du membre du jury en charge de remettre le prix, James Gerard, lauréat l’an dernier, comblera en partie cette absence. « J’ai l’honneur et la responsabilité de décerner ce prix, commente l’acteur. On a vu dans Otilia le danger que représente le fait d’abandonner ses rêves. Et, dans Portraitiste, l’importance de la reconnaissance. Si elle était arrivée au fur et à mesure et non à la fin, elle aurait donné du sens à la vie du personnage principal. » Toute ressemblance avec des faits et des personnages actuels n’a rien de fortuite.
☛ Grand prix du jury : Virus ,deGabriel Kaluszynski. Particulièrement troublé, le jeune réalisateur ne s’attendait pas à recevoir le Graal des mains de Lionel Steketee. Ni des compliments de sa part, d’ailleurs. « C’est un super film, très complet. Tout y est : la technique, l’esthétique, la direction des comédiens, la musique. Vous auriez pu rafler tous les titres… » Chancelant (mais heureux), le réalisateur admet ne pas avoir écrit de discours. « C’est un film que j’ai fait seul, et qui m’a coûté un peu trop d’argent. Il est compliqué à vendre. Je l’ai pensé comme le début d’un long-métrage si jamais quelqu’un est intéressé », sourit-il. Précisant qu’un tel prix lui fait du bien. « Cela veut dire que je peux continuer… »