Monaco-Matin

Elle vole un bracelet Cartier à   €

- JEAN-MARIE FIORUCCI

Les prières à saint Antoine de Padoue n’ont pas grande efficacité quand il s’agit de retrouver un bracelet Cartier à 45 000 € ! D’autant que cette perte était en fait un vol. C’est le jeu de piste évoqué au tribunal correction­nel pour une affaire mettant en cause une rentière russe au patrimoine consistant, tentée par une nouvelle méthode pour accroître ses revenus. Cette quadragéna­ire sans scrupule, domiciliée à Roquebrune-Cap-Martin, n’a pas hésité à jouer sur la proximité relationne­lle avec un couple pour s’enrichir. À l’issue d’un concert en Principaut­é, dans la soirée du 7 septembre 2018, elle a rejoint les deux personnes au Bar américain de l’hôtel de Paris.

Après avoir bu moult coupes de champagne, la compagne n’a plus le précieux anneau à son poignet. Le lendemain, plus lucide, elle pense l’avoir perdu… Pas pour tout le monde. Dans son scénario, la prévenue a cru qu’écouler ce bijou serait simple. Quelque trois mois plus tard, le 29 novembre 2018, elle se présente chez un joaillier de la galerie du Métropole pour soumettre son butin à une expertise. Coïncidenc­e, le profession­nel avait vendu ce même bracelet auparavant à un client. Pas de bol…

Le juge pas dupe

À l’audience, le président Jérôme Fougeras-Lavergnoll­e (*) entend la version étonnante de la quadragéna­ire russe. « J’ai passé la soirée avec le couple , raconte-elle. En sortant, j’ai trouvé ce joyau de valeur sur les escaliers. Comme c’était 1 heure du matin, je ne l’ai pas remis à la police. Je l’ai rangé dans la boîte à gants de mon véhicule. Plus tard, je m’en suis souvenu et je l’ai fait estimer. Je ne l’ai jamais volé. » Remarque judicieuse du magistrat : « Si le joaillier n’avait pas fait la relation avec une vente précédente, vous l’auriez gardé. Toutefois, le couple prétend que vous avez quitté l’établissem­ent avant leur départ. Il était impossible que vous découvriez ce bijou ! En plus, la victime vous a annoncé la perte de son bracelet le lendemain par téléphone. Motus ! C’est un joyau imposant. L’avez-vous vu au poignet de cette dame ? »

À la barre, la rentière ne sait que répondre. Le tribunal s’intéresse alors au parcours judiciaire de la prévenue, qui a été condamnée en France, en 2004, pour vol avec violence. Il y a aussi une note de police de 2010 où elle est connue pour abus de confiance.

« Elle ment du début à la fin ! »

Le premier substitut Cyrielle Colle, rationnell­e, estime qu’il n’y a ni sens ni cohérence « dans la version totalement contradict­oire de Madame. Alcoolisée, elle prend le bracelet Cartier, le fait expertiser dans une boutique en vue de le vendre et propose même d’amener la facture ! C’est du vol ! Car le personnel du palace est formel : le bijou a été perdu au Bar américain. Il fallait le confier aux autorités. C’est la loi. Tout est faux et cette personne ment du début à la fin. L’absence de partie civile est motivée par le retour de l’anneau au poignet de sa véritable propriétai­re ». Deux mois assortis du sursis sont requis. Où est l’incohérenc­e de la version de sa cliente pour Me Nikita Sichov, du barreau de Grasse ? « C’est la seule personne qui ne varie pas dans ses déclaratio­ns. Quand on perd un tel bracelet, on le remarque. D’autant qu’il est impossible de définir l’instant où il est tombé. Alors, il y a un doute sur le port du bijou par la victime. A-t-il été soustrait frauduleus­ement ? Non ! Il faut en rester là. La convocatio­n d’aujourd’hui aura servi de leçon à la prévenue… » Le tribunal la déclare coupable et dépassera les réquisitio­ns du ministère public : trois mois assortis du sursis. * Assesseurs : Florestan Bellinzona et Morgan Raymond.

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(Photo archives J.-F.O.) Légende.

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