« Lutter contre la pollution c’est l’affaire de tous ! »
Le navigateur Jean-Pierre Dick, invité par le député Loïc Dombreval à embarquer avec SOS Grand Bleu, appelle à mieux respecter la mer. Un projet de loi est en route pour endiguer les plastiques
J’ai fait six tours du monde, passé près de six mois dans les mers du Sud et pourtant j’ai vu davantage de grands cétacés en Méditerranée ! Cela prouve que cette biodiversité est toujours là. Ça donne de l’espoir. » Jean-Pierre Dick se veut optimiste. À condition que chacun y mette du sien. Le navigateur niçois de 54 ans, multiple vainqueur de la transat JacquesVabre en catégorie Imoca, élu en 2011 « marin de l’année », n’entend pas jouer les donneurs de leçon. Juste partager son constat empirique, nourri de riches traversées autour du globe. Cette fois-ci, c’est un ancien camarade d’école vétérinaire qui a invité Jean-Pierre Dick à embarquer. Loïc Dombreval est aujourd’hui député LREM des Alpes-Maritimes, membre de la commission développement durable. C’est elle qui porte le projet de loi visant à lutter contre le gaspillage et encourager le recyclage – l’économie circulaire. Cette loi doit être débattue cet automne.
« Il faut qu’on réalise notre chance »
« Après l’interdiction du plastique dans la restauration scolaire, il faut que l’on aille plus loin, martèle Loïc Dombreval. En Méditerranée, les plastiques se comptent en milliards car ils finissent en microparticules que mangent les poissons. À ce problème s’ajoutent la surpêche et une autre forme de pollution, sonore celle-là. » Pour prendre le pouls de la mer, le député a embarqué à SaintJean-Cap-Ferrat à bord du Santo sospir. L’élégant navire de SOS Grand bleu est habitué à conduire des écoliers à la découverte du milieu marin. « C’est par la connaissance que l’on va protéger », estime sa directrice Muriel Oriol, se référant au commandant Cousteau.
En cet après-midi d’octobre, le Santo sospir navigue dans le sanctuaire Pelagos. Cet espace maritime protégé, né d’un accord entre la France, l’Italie et Monaco, fête ses 20 ans. Sa mission : « Faire cohabiter la protection des mammifères marins et les activités humaines. Un défi énorme ! », admet Muriel Oriol.
Ce jour-là, pas de cétacé en vue. Au large, seuls des plastiques en décomposition et une bouée à la dérive – aussitôt repêchée – accueillent l’équipage. Pas brillant. « La Méditerranée est défavorisée par rapport au phénomène de pollution car c’est une mer fermée, rappelle Jean-Pierre Dick. On y observe des plastiques, des filets, du dégazage qui laisse des nappes grasses. Mais on y croise aussi des baleines, des dauphins, des raies, des requins... Elle a ce côté magique ! A quelques miles de villes de plusieurs centaines de milliers d’habitants, on peut rencontrer le monde sauvage dans ce qu’il a de plus pur. Il faut vraiment que l’on réalise notre chance. »
Car la main (sale) de l’homme y est bien visible. François Guntz, l’un des skippers-éducateurs, en témoigne. « Ce matin encore, on a trouvé un ballon à hélium. À chaque sortie, on ramasse des choses. Or, l’essentiel de ce qu’on trouve en mer vient de la terre... On publie des photos pour montrer que c’est une réalité, que cette situation est aberrante. Il est important de changer les mentalités. »
« Maladie moderne »
Heureusement, la prise de conscience écolo a le vent en poupe. John Townend, membre de SOS Grand bleu, « une quarantaine d’années de navigation » au compteur, salue « des progrès quand même ». Il se souvient du San Remo des années 70, quand « les pêcheurs vidangeaient leur moteur dans la flotte ». Une scène révolue. « Globalement, on fait plus attention. Notre génération a beaucoup sali et ce sont nos enfants qui vont en payer les conséquences. Mais ils sont beaucoup plus sensibles que nous ! » Jean-Pierre Dick s’en réjouit. Et encourage chacun à s’inspirer d’eux, sans attendre la loi à venir. « Lutter contre la pollution, c’est l’affaire de tous ! Lorsque je pars en mer sur mes grandes courses, je récupère tout. Chacun fait son petit chemin. Toutes les initiatives sont bonnes. »
Respecter notre mer, ne pas jeter, ramasser... Autant de remèdes contre « cette maladie moderne qu’est la pollution plastique », dixit le marin niçois. Voilà un cap collectif à franchir, ardu mais vital pour notre planète. « Les jeux ne sont pas encore faits ».