Nucléaire : l’exécutif met EDF sous pression
Un désaveu pour EDF et la filière nucléaire française en général : le gouvernement a exigé hier de l’électricien un plan d’action sous un mois, après un rapport sur les déboires de l’EPR de Flamanville (Manche) qui dresse un bilan noir de ce chantier emblématique.
Lancé en 2006, et devant initialement entrer en service en 2012 pour un coût de 3,3 milliards d’euros, la construction à Flamanville du premier réacteur français de troisième génération a multiplié les déboires. Son démarrage est désormais prévu fin 2022 et son coût a été réévalué à 12,4 milliards d’euros.
Ces chiffres parlent d’euxmêmes : « La construction de l’EPR aura accumulé tant de surcoûts et de délai qu’elle ne peut être considérée que comme un échec pour EDF », écrit l’ex-patron du constructeur automobile PSA JeanMartin Folz, dans le rapport d’audit d’une trentaine de pages qu’il a remis hier au gouvernement.
« Manque de rigueur inacceptable »
Jugeant que l’audit mettait en lumière « un manque de rigueur inacceptable », le ministre de l’Économie Bruno Le Maire a sommé EDF de mettre en place un « plan d’action » d’ici un mois pour remettre la filière nucléaire aux « meilleurs niveaux d’exigence ». Ce plan devra être présenté au conseil d’administration du groupe, puis « validé par l’État », et un point d’étape sera réalisé « fin 2020 » sur sa mise en oeuvre, a-t-il précisé.
Mandaté cet été pour effectuer l’audit, M. Folz a égrainé devant la presse « l’irréalisme » des estimations initiales, une perte de compétences « généralisée », de mauvaises relations entre EDF et ses sous-traitants et partenaires, notamment Areva, puis Framatome (ex-branche réacteur d’Areva revenue sous le giron d’EDF), un manque de « culture de la qualité », ou encore une gouvernance du projet « inappropriée » chez EDF. Autant de critiques déjà régulièrement formulées par l’Autorité de sûreté nucléaire.
Le gouvernement souhaite également qu’EDF, qui a nommé il y a deux semaines un nouveau directeur du projet de l’EPR, lance « un plan de compétence de la filière nucléaire », alors que 16 ans se sont écoulés entre la construction du dernier réacteur français, à Civeaux (Vienne), et celle de l’EPR de Flamanville. L’État et EDF ont en ligne de mire l’avenir de ce secteur et la décision future sur la construction éventuelle de nouveaux réacteurs. Pour le gouvernement, la condition reste toujours d’attendre la mise en service de Flamanville, a rappelé hier la ministre de la Transition écologique Élisabeth Borne. EDF doit remettre d’ici la mi-2021 au gouvernement l’ensemble des études sur l’amélioration du design et du coût de construction de l’EPR.