Monaco-Matin

«Manpower doit anticiper les besoins des entreprise­s» Interview

Numérisati­on, concurrenc­e des pure players... Manpower, la grande entreprise d’intérim se transforme. Objectif : répondre au marché en pleine mutation Repères

- PROPOS RECUEILLIS PAR KARINE WENGER kwenger@nicematin.fr

L’intérim en France ? Un juteux marché de 27 Mds€ qui emploie 2,5 M de travailleu­rs temporaire­s. C’est aussi un secteur en pleine mutation confronté à des problémati­ques de numérisati­on, de recrutemen­t et de formation. Qu’Alain Roumilhac, président de Manpower Group, deuxième acteur français, a pris à bras-le-corps. Avec 600 agences et 4 000 collaborat­eurs, l’Hexagone représente le premier marché de Manpower, devant le Royaume-Uni et les États-Unis. Tous les jours, le géant de l’intérim et du travail temporaire détache 100 000 personnes chez ses clients. Annuelleme­nt, ce sont 250 000 personnes mises à l’emploi et 100 000 en équivalent temps plein.

Manpower a  agences en Paca :  dans les Alpes-Maritimes et  dans le Var. La région a-t-elle une particular­ité ?

Manpower a un tropisme très fort dans le secteur de l’industrie, ce qui n’est pas le cas de la région. Le marché local a une saisonnali­té liée au tourisme mais nous travaillon­s aussi avec les administra­tions et services publics ; les grands clients industriel­s comme Schneider Electric ou Arkopharma ; le tissu des PME ; les environnem­ents tertiaires à Sophia Antipolis et le monde du BTP. Dans le Var, la typologie est équivalent­e avec des contrats saisonnier­s dans l’agricultur­e. Ceci dit, Manpower est sur  bassins d’emplois en France et chacun a sa problémati­que. Notre préoccupat­ion majeure est de nous adapter et de mettre en adéquation les compétence­s disponible­s avec les besoins des entreprise­s. Il existe un décalage très fort avec d’un côté un taux de chômage national de  % et de l’autre, des entreprise­s affirment qu’il y a des centaines de milliers d’emplois non pourvus. Sur certains secteurs, nous avons de plus en plus de difficulté­s à trouver les compétence­s que nos clients veulent recruter.

Quelle est votre stratégie pour résoudre cette inadéquati­on ?

En faisant de la formation, de l’accompagne­ment, du coaching… Nos équipes anticipent davantage que de par le passé et mettent en place une ingénierie de formation. Entre l’expression du besoin de l’entreprise et l’arrivée des compétence­s formées, plusieurs mois peuvent s’écouler. En , Manpower a formé   personnes.

La fidélisati­on de nos intérimair­es est un autre de nos enjeux : nous proposons à   d’entre eux des cursus enchaînant formations et missions pour augmenter leur durée d’emploi et devenir des CDI intérimair­es. Nous en comptons près de   : ce sont des gens qu’on détache chez nos clients mais que nous rémunérons et qui disposent d’un vrai statut de CDI pour avoir accès au logement, au crédit…  à  % d’entre eux sont embauchés chez leurs clients ; il nous faut donc en embaucher au moins   par an pour les remplacer. Notre objectif est de passer d’ici un an à  .

L’arrivée des pure players de l’intérim (agences

dématérial­isées, ndlr)

changé la donne ? a-t-elle

Nous avons changé notre façon de recruter. Il y a vingt ans, on faisait de la pub à la télé et les gens allaient dans nos agences installées près de la gare en centre-ville. Maintenant, c’est nous qui allons vers eux en utilisant les réseaux sociaux. Nous géolocalis­ons et targettons les candidats éventuels, leur poussons des offres selon leurs centres d’intérêt. Le marketing digital devient un élément majeur de nos stratégies d’acquisitio­n. Notre site d’emploi Manpower.fr comptabili­se  millions de connexions annuelles et le mobile devient l’interface la plus usitée : notre appli qui a presque   visiteurs uniques par mois a été téléchargé­e presque un million de fois depuis son lancement il y a quatre ans. Près de   de nos intérimair­es s’interfacen­t avec nous via l’appli : ils ont accès à leur relevé d’heures, leur bulletin de paie, peuvent faire une demande d’acompte… Tout a été digitalisé et nous travaillon­s sur son ergonomie pour améliorer le taux de conversion. Nous devons nous transforme­r à la vitesse des usages et des évolutions sociologiq­ues.

Y a-t-il des profils que vous recherchez davantage que d’autres ?

L’intérim concerne souvent des activités de non-cadre : on recherche des ouvriers qualifiés. On s’investit beaucoup sur l’apprentiss­age et on fait en sorte que les entreprise­s prennent des apprentis. Un autre de nos chevaux de bataille est de former des femmes à des métiers d’homme. Un de nos clients, par exemple, voulait des électricie­nnes. On lutte aussi contre les stéréotype­s comme dans le numérique.

Pour les candidats, quels sont les avantages de l’intérim ?

La souplesse et la liberté. Ceux qui sont très employable­s peuvent choisir les missions qui sont les plus intéressan­tes. Pour d’autres, l’intérim est une voie d’insertion dans le monde du travail. On travaille aussi beaucoup à l’acculturat­ion des entreprise­s afin de rendre la marque employeur attractive.

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(Photo Armand Vareille) Le mot d’ordre du président de Manpower France : anticiper.

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