La retraitée ensevelie à Nice n’a pas survécu P 18 - 19
Après 22 heures de lutte, les sapeurs-pompiers ont découvert le corps sans vie de Jacqueline, ensevelie après l’affaissement d’un talus à Nice. Hier, son quartier partageait émotion et colère
Visages graves, uniformes couverts de poussière, les sapeurs-pompiers commencent à quitter la petite rue Sevan, quartier de la Madeleine. Il est 10 h hier. Traits tirés, le lieutenantcolonel Olivier Pauletti s’avance vers les micros et caméras pour annoncer la nouvelle tant redoutée : « La victime a été localisée. Je vous confirme qu’elle est décédée. »
Jacqueline Mampreyan, 71 ans, a enfin été retrouvée au prix d’une nuit d’efforts. Après le passage de la tempête Amélie à Nice, le talus qui jouxte sa maison s’est soudain affaissé dimanche midi. Ces 80 m3 de terre ne lui ont laissé aucune chance.
« J’étais en train de lui parler..., raconte une voisine, bouleversée. Elle a vu la scène. « Je suis rentrée parce qu’avec ce qui était tombé, ça ruisselait de partout. Elle nettoyait sa terrasse, elle enlevait des feuilles. Par la fenêtre, je lui ai dit de rentrer, de faire ça plus tard... Elle n’a pas eu le temps. Elle m’a dit : “Tu passeras tout-à l’heure prendre le café ?” Ce sont ses derniers mots. »
Recherches périlleuses
À cet instant, « des blocs sont tombés, puis tout s’est écroulé ». La voisine a crié, appelé Jacqueline. En vain. Et la course contre la montre s’est engagée pour les pompiers. Il leur aura fallu vingt-deux heures pour dégager le corps de la retraitée. Des recherches intenses, délicates, périlleuses.
« Les sapeurs-pompiers se sont donnés avec coeur pour déblayer la zone, débriefe le capitaine Eric Brocardi, chef de la communication du Sdis 06. Les manoeuvres étaient contraintes par les lieux exigüs, la maison étant à flanc de colline. La configuration de la terre, mêlée à des blocs de béton et à de l’eau, a gêné le travail des équipes cynophiles. » À cela s’ajoutait le volume important à évacuer. Et le « risque de suraccident » pour les secours. Quatre glissements de terrain nocturnes en attestent.
Une soixantaine de pompiers a été en permanence à pied d’oeuvre, grâce à des renforts venus de toutes les Alpes-Maritimes. Finalement, la retraitée « se trouvait là où l’on avait concentré nos recherches depuis hier [dimanche] midi : derrière la maison, côté talus », constate Olivier Pauletti.
« Important pour eux »
Depuis la veille, la cité arménienne de Nice oscille entre émotion et colère. Voie privée ou pas, certains riverains estiment que la Ville aurait dû se préoccuper de l’entretien du quartier. Hier, 16 riverains n’ont pas réintégré leurs trois maisons respectives. Huit ont été relogés par la Ville, les huit autres ont compté sur leurs proches. Mais hier, l’heure était au recueillement pour le mari et les deux fils de Jacqueline. Pour « un quartier dans la peine, pour une famille éplorée », dixit le maire Christian Estrosi, venu présenter ses condoléances. C’est pour eux que les pompiers n’ont « jamais lâché », explique le commandant Pauletti. Pour leur rendre Jacqueline, même sans vie. « C’était important pour eux. »