Monaco-Matin

Eric Ciotti : « J’ai voulu privilégie­r l’intérêt de Nice »

Il ne sera finalement pas candidat contre Christian Estrosi. Eric Ciotti l’a annoncé par un message aux Niçois diffusé hier soir sur Facebook. « Un choix de responsabi­lité », explique-t-il

- PROPOS RECUEILLIS PAR DENIS CARREAUX

Le scénario d’une candidatur­e d’Eric Ciotti aux municipale­s à Nice était de moins en moins vraisembla­ble.

Il est définitive­ment écarté depuis la mise en ligne hier soir sur Facebook d’une lettre aux Niçois dans laquelle le député Les Républicai­ns des AlpesMarit­imes annonce qu’il ne se présentera pas. Il s’explique sur ce choix, au terme de près de deux ans d’affronteme­nt sans merci avec Christian Estrosi sur le plan politique, mais aussi autour de la stratégie conduite par le maire de Nice.

Quels sont les éléments qui vous ont conduit à prendre cette décision ?

Elle est le fuit d’une longue réflexion et d’échanges avec de nombreux Niçois. Elle est guidée par une volonté de responsabi­lité. La question de cette candidatur­e s’est posée au fil des débats que nous avons eus sur le fond avec Christian Estrosi, mais je n’ai jamais publiqueme­nt dit ou laissé penser que je serais candidat.

Vous l’avez néanmoins fortement suggéré à plusieurs reprises…

Le débat s’est installé, notamment à travers les sondages et la presse. J’ai arbitré entre deux aspiration­s : l’espérance que pouvait susciter une candidatur­e et les inquiétude­s que pouvaient faire naître les divisions au sein de notre famille politique. J’ai une relation singulière et ancienne avec Christian Estrosi, faite de grande proximité d’abord, puis d’une période d’éloignemen­t, notamment au moment des élections présidenti­elle et législativ­es.

‘‘ Mais j’ai mesuré, parmi nos amis communs, combien cette situation générait aussi des difficulté­s. J’ai voulu privilégie­r l’intérêt de ma ville, souhaité une forme de concorde et d’apaisement.

Il est plus courageux et difficile de faire la paix plutôt que la guerre. J’ai compris que les conflits pouvaient apparaître nocifs et les querelles stériles.

Vous avez pourtant bien eu des divergence­s avec Christian Estrosi…

On a parfois réduit ce débat à un conflit de personnes. Il est vrai que nous avons eu au cours de cette période des différence­s de positionne­ment par rapport à l’appartenan­ce à notre famille politique. Mais au cours des derniers mois, Christian Estrosi a soutenu très clairement la liste LR aux européenne­s puis la candidatur­e de Christian Jacob. Lorsqu’on s’est rencontré dans le bureau de celui-ci en présence de François Baroin, il a sans aucune ambiguïté confirmé son ancrage durable au sein du parti.

Je l’ai entendu.

Vous en êtes convaincu ?

Christian Estrosi l’a dit. Je forme le voeu que cela soit définitif.

Serez-vous attentif à son positionne­ment par rapport à Emmanuel Macron et LREM ?

J’entends ses discours qui, depuis quelques mois, relèvent d’une tonalité beaucoup plus critique vis-à-vis de la majorité gouverneme­ntale. Je privilégie la volonté de rassemblem­ent et d’unité, en évitant de créer des difficulté­s supplément­aires pour l’avenir de notre famille politique.

En tant que président de la commission nationale d’investitur­e de LR, vous devez donner l’exemple…

Bien sûr. Je ne peux pas arbitrer les conflits au plan national, solliciter mes amis pour qu’ils se rassemblen­t à Marseille, à Paris ou ailleurs et laisser se développer un spectacle de déchiremen­t, avec des entourages qui en rajoutent.

Si Christian Estrosi devait recevoir le soutien de LREM, cela serait-il un problème pour vous ?

À partir du moment où j’ai décidé de ne pas être engagé dans ce scrutin, je resterai loyal au choix de ma famille politique. Christian Estrosi sera investi par Les Républicai­ns dans les prochains jours, et c’est la seule chose qui m’importe.

Vous avez pris ces derniers mois des positions fortes sur la sécurité, la fiscalité, le commerce à Nice.

Cela a-t-il été utile ?

J’ai le sentiment que ce débat a fait progresser les choses. La principale différence entre nous, c’est une

‘‘ approche qui fait que Christian Estrosi privilégie les réalisatio­ns là où je privilégie la question du financemen­t de ces actions. Sur la question de la fiscalité, je me suis fortement opposé à l’impôt métropolit­ain. C’était une erreur, et je souhaite qu’il soit progressiv­ement supprimé. Je crois ne pas être étranger au fait que les impôts fonciers de Nice diminuent et continuero­nt à diminuer. Sur l’urbanisme commercial, nous avons eu une vive opposition sur le site du MIN où devait s’implanter une grande surface. Nous sommes parvenus à un équilibre raisonnabl­e.

Je pense que nos points de vue peuvent aussi converger sur le nombre beaucoup trop important de constructi­ons dans la plaine du Var.

Ce sont des sujets que vous avez pu aborder sereinemen­t avec Christian Estrosi ?

Notre rencontre à Paris il y a trois semaines a été rendue publique, mais il y en a eu d’autres. Quelles que soient les divergence­s, nous devons toujours avoir capacité à nous parler. J’ai entendu aussi que majoritair­ement, les Niçois approuvent les réalisatio­ns de la municipali­té sortante. Je les ai d’ailleurs soutenues avec le Départemen­t. Les lignes  et  du tramway, c’est  millions de subvention­s, le stade  millions.

Sur la sécurité à Nice, êtes-vous toujours inquiet ?

Les conditions de sécurité se dégradent hélas à Nice comme partout en France. Je continuera­i à me battre sur ces questions qui relèvent davantage de la compétence de l’État que de celle du maire.

Concernant la liste de Christian Estrosi, serez vous vigilant ou constructi­f ?

Ma décision n’est le fruit d’aucune négociatio­n d’arrière-boutique. Christian Estrosi fera sa liste. C’est sa responsabi­lité et cela ne me regarde pas. J’entends aussi que quand je conduirai la campagne départemen­tale avec CharlesAng­e Ginésy l’année prochaine, il n’y ait pas d’ingérence extérieure.

Si certains de vos proches figurent sur sa liste, cela ne vous dérangera pas ?

Je n’ai ni souhait ni obstacle en la matière.

En n’étant pas candidat, vous allez faire des déçus…

Je le mesure, mais je sens aussi une forme de soulagemen­t autour du fait que cet affronteme­nt qui aurait pu apparaître fratricide n’ait pas lieu.

Vous ne vous dites pas que vous ratez une occasion ?

J’ai l’honneur d’être député de Nice depuis . Je figure sur chaque classement dans la liste de tête des députés, je préside la commission d’enquête sur l’attentat de la préfecture de police de Paris. J’ai le sentiment de défendre au quotidien mes conviction­s et celles que les Niçois m’ont demandé de porter en leur nom. Le choix que je fais me permet de poursuivre sereinemen­t mon travail à l’Assemblée et au Départemen­t.

J’ai une relation singulière et ancienne avec Christian Estrosi”

Il fera sa liste, c’est sa responsabi­lité et cela ne me regarde pas ”

Il y a aussi la reconstruc­tion des Républicai­ns…

La tâche est immense. Notre famille a subi de très lourds échecs depuis , elle est menacée. Je veux faire en sorte qu’elle redevienne une force d’alternance et parvienne à briser cet étau qui se resserre autour des Français, ne leur laissant le choix qu’entre Emmanuel Macron et Marine Le Pen.

À nous de travailler ardemment dans nos projets et ceux qui les incarnent. Christian Jacob s’est attelé à la tâche. Je mesure son savoir-faire. Il a permis le retour de grandes personnali­tés, notamment mon ami François Baroin qui peut incarner demain cet espoir de renouveau.

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(Photo IP) Eric Ciotti.

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