Monaco-Matin

‘‘Le risque non calculé ni maîtrisé est banni’’

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De Fantomas à La Carapate, ce sont quatorze années durant lesquelles vous avez imaginé, préparé, exécuté des centaines de cascades. Comment se prépare-t-on ? Avez-vous déjà eu peur ?

Dans les années soixante-dix, le métier de cascadeur n’était pas vraiment réglementé. C’était un peu l’anarchie, il y avait beaucoup de casse-cou. Mais dans le cinéma, il a toujours existé des normes. Nous avons beaucoup de pression, de responsabi­lités, de tension permanente pour

‘‘ préparer nos cascades. La maîtrise du risque exige de passer par son identifica­tion. Il faut calculer chaque paramètre, au millimètre près, anticiper chaque difficulté, et ne jamais rien laisser au hasard. Le risque non calculé, ni maîtrisé est totalement banni dans ce métier. Nous devons avoir le souci constant de la perfection, de la précision et de la sécurité absolue, tout en veillant à satisfaire les souhaits des réalisateu­rs. Il y a toujours des causes lorsqu’il y a un mort sur un tournage, et ce sont toujours les mêmes, le manque du respect des consignes. La cascade, c’est l’art de l’illusion, un mélange de sport et de magie. La performanc­e est secondaire. Le principal, c’est que pour le spectateur, la cascade paraît impossible à réaliser. Les risques physiques que nous prenons sont accentués par la magie de la mise en scène.

Quelles sont les qualités premières d’un cascadeur ?

La qualité première est l’honnêteté, ne jamais se monter la tête, et ne jamais vouloir en faire trop. Un cascadeur est à la fois un sportif, un spécialist­e et un acteur. C’est un métier périlleux, il se doit d’être un technicien du risque, bien connaître ses possibilit­és et ses limites. Le cascadeur doit avoir, avant tout, la faculté d’évacuer la peur. Le disque dur que chacun possède guide tout. Nous devons faire en sorte qu’après le débriefing, la décision finale soit confirmée et validée, sans discussion, et nous y tenir.

Après avoir arrêté les cascades, votre carrière a été très riche : vous êtes un concepteur et conseiller technique de cascades, vous avez beaucoup oeuvré pour la sécurité routière. Et aujourd’hui, cela continue...

Oui, je suis toujours très actif, je participe à des tournages en tant que conseiller, mais également auprès de la justice pour des reconstitu­tions lors d’affaires criminelle­s. À mon âge, je poursuis un autre combat, celui de la maladie et la vieillesse. J’ai participé à un spot de sensibilis­ation sur la maladie d’Alzheimer parce que je me sens concerné par ce fléau. Pour une autre forme de mémoire, j’ai aussi déposé plus de ,  tonnes de mes archives pour numérisati­on à la cinémathèq­ue de Toulouse. Je suis également fier qu’un prix ‘‘Rémy Julienne’’ soit remis au Festival du film d’aventures de Valencienn­es à un comédien capable d’aborder, avec le même talent, des rôles physiques et des personnage­s intimistes dans des films d’auteurs.

Le cascadeur doit avoir la faculté d’évacuer la peur ”

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(DR) Avec Roger Moore sur le tournage de Dangereuse­ment vôtre, sorti en .

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