Conflit sur les retraites, l’épisode final ?
C’est aujourd’hui que la partie se gagne ou se perd. Dans le Marius de Pagnol, l’enjeu de la mène était l’addition de la soirée au Bar de la Marine. Pour Edouard Philippe, c’est le jour ou jamais de sortir la France d’un pétrin comme elle n’en a pas connu depuis au moins .... un an, quand les « gilets jaunes » filaient et défilaient sans s’accorder la moindre pause. En , César, Monsieur Brun, dont le phrasé si distingué rappelle celui de notre Premier ministre, et leurs partenaires de bordée jouaient à la manille. En , les partenaires sociaux jouent plutôt au poker ouvert : toutes les cartes sont connues. La CGT, FO, la FSU et Sud jouent tapis, prêts sans bluffer à sacrifier les vacances, pour pousser le gouvernement à se coucher. Leur atout majeur : le soutien de l’opinion publique. Cinquante-sept pour cent des Français opposés à la réforme selon le sondage Elabe publié hier par BFM. Les syndicats réformistes sont pour l’instant obligés de suivre, mais ils sont
prêts à quitter la
table s’ils retrouvent leur mise : la retraite à
points qu’ils ont
eux-mêmes inspirée. Autrement dit, pour mettre un terme au conflit, il faudrait d’abord que Matignon renonce à l’âge d’équilibre, principal point de désaccord avec la CFDT, quitte à mécontenter le Medef. S’il en était d’accord, Edouard Philippe pourrait l’annoncer dans la foulée de la réunion prévue cet après-midi avec la totalité des syndicats. Le trafic ferroviaire reprendrait ; il faut toutefois quarante-huit heures en général avant un retour à la normale – et la trêve des confiseurs, que le pays respecte depuis près de ans, pourrait enfin s’ouvrir. Belote, rebelote et dix de der. Sauf que la vie n’est pas un jeu et que les manifestants ne sont pas plus des cartes que des pions. Même s’ils perdaient le soutien populaire, traminots, cheminots et gaziers ne renonceront pas si facilement à leurs régimes spéciaux. Et il est fort à parier qu’ils multiplieront les actions spectaculaires d’ici à cet après-midi, au cas où les négociateurs les oublieraient, voire les sacrifieraient sur l’autel de la concorde nationale. CGT, FO ou Sud, qui redoutent d’être débordés par leur base, ne désavoueront pas ces militants classés parmi les plus fidèles. Jusqu’à quand ? Jusqu’à épuisement ? C’est la stratégie – payante – adoptée l’an dernier par Emmanuel Macron avec les « gilets jaunes ». Le pronostic de la journée est donc : un accord peut-être, mais une trêve, sûrement pas.
« Pour mettre un terme au conflit, il faudrait d’abord que Matignon renonce à l’âge d’équilibre, principal point de désaccord avec la CFDT, quitte à mécontenter le Medef. »