Ces militaires français devenus djihadistes
Une trentaine de militaires, parfois membres d’unités d’élite de l’armée française, ont décidé depuis 2012 de rejoindre les rangs d’organisations djihadistes, leur offrant sur un plateau expériences et techniques de guerre.
Le Centre d’analyse du terrorisme (CAT) documente les parcours de vingt-trois de ces militaires, aux parcours variés, qui ont décidé pour leur majorité de rejoindre la zone irako-syrienne mais aussi l’Afghanistan, après pour certains être passés par des unités réputées – Légion étrangère, fusiliers-marins, parachutistes. Selon ce rapport, qui doit être publié en fin de semaine et dont l’Agence France Presse a obtenu une copie après que Le Figaro en eut révélé la teneur hier, l’armée constitue pour ces groupes djihadistes une « cible de recrutement stratégique » évidente. Mais « la radicalisation islamiste demeure marginale au sein des armées », précise-t-il, relevant que les autorités surveillaient de près les militaires radicalisés ou susceptibles de radicalisation. Et que la loi française s’était renforcée pour permettre les enquêtes administratives sur des personnels déjà en poste.
Islam et « Grande Muette »
Si certains soldats avaient préparé leurs projets dès avant de prendre l’uniforme, comme Boris V., originaire de Charente, dans l’ouest de la France, alias « Abu Walid al-Faransi », son nom de guerre, d’autres, à l’instar de Mehdi H., se sont intéressés de près à l’islam dans les rangs de l’armée, notamment en Afrique
subsaharienne. Ce dernier « s’interroge sur la compatibilité religieuse et morale d’une mission en Afghanistan », explique le CAT. Lorsqu’il y est appelé en 2008, il s’y oppose pour ne pas être amené à tuer des « frères » de religion. Il est alors surnommé « le terroriste » par ses collègues. Il sera licencié et finit par se rendre en Afghanistan. Arrêté au Pakistan, il sera remis à la France et condamné à cinq ans de prison. Mais certains se sont tournés vers l’islam pour compenser la frustration d’une carrière qui les décevait, ou ont montré de véritables faiblesses psychologiques. Quant à ceux qui n’ont pu partir, ils ont tenté d’agir depuis le sol français. Ainsi Alain Feuillerat, ancien militaire de 34 ans, n’a pu rejoindre la zone irako-syrienne mais a envisagé en retour un attentat contre une structure militaire, la BA 105 à Évreux (ouest), avant d’être interpellé. Étroitement surveillé, il portait une tenue de combat avec les insignes du groupe État islamique lors de son arrestation. Contacté par l’AFP, le ministère des Armées n’a fait aucun commentaire sur ces révélations.