Russie : une constitution sur-mesure pour Poutine ?
Vladimir Poutine a proposé, hier, une révision de la Constitution russe et nommé un nouveau Premier ministre, des annonces qui ont relancé les conjectures sur la préparation de son avenir politique après la fin en 2024 de son dernier mandat de président. Il a choisi comme remplaçant à Dmitri Medvedev, son fidèle chef de gouvernement, un personnage de l’ombre : Mikhaïl Michoustine, 53 ans, le patron du fisc russe. La chambre basse du Parlement, la Douma, examinera, aujourd’hui, cette candidature. Ce choix a été annoncé juste après l’annonce surprise de la démission du gouvernement, dans la foulée d’un discours du président russe annonçant des réformes constitutionnelles. Les ministres restent chargés des affaires courantes jusqu’à l’entrée en fonction d’une nouvelle équipe. Ces annonces ont pris de court l’ensemble de la classe politique et des médias russes. Elles sont perçues comme visant à baliser le terrain avant 2024, date de la fin du mandat actuel de Vladimir Poutine qui, en l’état actuel de la législation n’a pas le droit de se représenter. L’homme fort de la Russie est jusqu’à présent resté très évasif sur ses intentions et n’a jamais évoqué de successeur. Le principal opposant au Kremlin, Alexeï Navalny, a jugé que, quelle que soit la fonction officielle à laquelle il se désignait, Vladimir Poutine cherchait à « rester dirigeant à vie ». Peu avant ces annonces chocs, le chef de l’Etat avait dit voir « clairement émerger une demande de changement au sein de la société » ,lorsde son discours annuel devant le Parlement et les élites politiques du pays. Dans cette allocution, Vladimir Poutine a proposé de soumettre au vote des
Russes des réformes de la Constitution devant renforcer les pouvoirs du Parlement, tout en préservant le caractère présidentiel du système. Il s’agit de la première révision de la loi fondamentale depuis son adoption en 1993.
Une dose de parlementarisme
« Le président, bien sûr, gardera le droit de fixer les missions et les priorités du gouvernement », a-t-il prévenu, mais il a jugé la Russie assez «mûre» pour introduire une dose de parlementarisme.
Dmitri Medvedev, qui devrait devenir vice-président du Conseil de sécurité russe, a expliqué son départ par la nécessité de donner au président « les moyens de prendre toutes les mesures qui s’imposent ». Son départ intervient alors que sa popularité stagne à moins de 30 % – contre près de 70 % pour Vladimir Poutine – sur fond d’anémie économique et de niveau de vie en baisse.
Les propositions de réformes exposées par Vladimir Poutine visent aussi à renforcer les gouverneurs régionaux, à interdire aux membres du gouvernement et aux juges de disposer d’un permis de séjour à l’étranger et à obliger tout candidat à la présidentielle à avoir vécu les 25 dernières années en Russie.
Le chef de l’Etat conservera le droit de limoger tout membre du gouvernement et nommera les chefs de toutes les structures sécuritaires. Il a également proposé de renforcer les pouvoirs du Conseil d’Etat, une institution consultative composée de divers responsables nationaux et régionaux, et de placer la Constitution russe au-dessus du droit international dans la hiérarchie des normes.