Retraites : la CFDT conditionne un accord à des avancées sociales
À la veille de l’ouverture de la conférence de financement, Laurent Berger a posé ses conditions : plus de « justice sociale » avant de discuter équilibre des comptes
Ala veille de l’ouverture de la conférence de financement des retraites, la CFDT, seul grand syndicat à soutenir un système universel, a posé ses conditions : « Il faut d’abord qu’on réponde aux exigences de justice sociale, c’est une condition sine qua non pour avancer dans la conférence de financement », a martelé le secrétaire général Laurent Berger lors d’une conférence de presse aux côtés de sa numéro 2, Marylise Léon, et du secrétaire national en charge des retraites, Frédéric Sève.
Cette conférence de financement, au sein de laquelle siégeront les partenaires sociaux, sera installée aujourd’hui par Édouard Philippe et doit trouver d’ici à la fin avril les moyens de garantir l’équilibre budgétaire d’ici à 2027. Son idée avait été lancée par Laurent. Berger en décembre en échange du retrait d’un « âge pivot » avec bonus/malus dès 2022. « Nous discuterons [financement] après avoir eu des assurances en terme de pénibilité, retraite progressive, minimum contributif et transitions pour les agents publics », a-t-il insisté.
« Redonner de la vision »
Dans un contexte social « où la défiance est extrêmement importante à l’égard du pouvoir », le patron de la CFDT a réclamé des « avancées concrètes très rapidement pour renouer avec la confiance dans une réforme dont le gouvernement a perdu le sens en voulant courir deux lièvres à la fois », l’universel et le budgétaire. « On a besoin de redonner de la vision parce que plus personne ne comprend rien », a-t-il taclé. Pour faire évoluer « un projet de loi qui ne nous convient pas en l’état », la CFDT a proposé aux députés de tous bords, qui entament l’examen du texte en commission la semaine prochaine, une quarantaine d’amendements sur ses revendications.
Ces amendements répondent à « une exigence de solidarité » (minimum de pension à 100 % du Smic, meilleure prise en compte des périodes de chômage...), « de justice » (critères de pénibilité, majoration forfaitaire par enfant...), « de liberté de choix » (retraite progressive, gouvernance du système plus autonome...). Sur la pénibilité, qui fait l’objet d’une concertation entre la ministre du Travail et les partenaires sociaux, Maryse Léon « a bien compris » que le gouvernement ne voulait pas réintégrer dans le compte professionnel de prévention les critères supprimés en 2017 (ports de charges lourdes, postures pénibles et vibrations mécaniques notamment) « à l’origine de 80 % des maladies professionnelles ». Actant que l’exécutif juge « trop compliqué » de mesurer ces critères pour chaque salarié ou agent public, elle demande une « reconnaissance collective » des métiers (déménageurs, bûcherons...) ou activités professionnelles qui serait faite par les partenaires sociaux des branches ou par l’administration en cas d’absence d’accord. Le patronat n’accueille pas cette idée « les bras ouverts », a ironisé Laurent Berger pour qui « la réparation » –ledroit à un départ anticipé deux ans plus tôt – « est un point fondamental ». Sur la conférence de financement, à laquelle le gouvernement demande de trouver 12 milliards d’ici à 2027, Laurent Berger veut d’abord qu’elle examine « de manière éclairée » les besoins de financement et leur calendrier, pour parvenir à « un diagnostic partagé ».
Un cocktail de mesures
Ce sera seulement ensuite que la CFDT proposera son « cocktail de mesures » qui impliquera aussi «les employeurs publics et privés ». «On veut discuter justice sociale et besoin de financement : après, on se lancera dans les cocktails », a résumé Laurent Berger en refusant que «revienne par la fenêtre une mesure injuste » comme l’âge pivot.
Sur le long terme et l’âge d’équilibre prévu dans le projet de loi à partir de 2037 (fixé par hypothèse à 65 ans dans l’étude d’impact), Frédéric Sève a estimé « qu’on peut fonctionner sans âge d’équilibre imposé à tout le monde ».
« Aujourd’hui, on a bien des âges à taux plein différents [...] L’exigence de solidarité, c’est de travailler un certain nombre d’années », pas de travailler jusqu’à un certain âge, a-t-il résumé, en jugeant qu’il n’y avait pas d’urgence à traiter cette question.