Patinage et pirouette
Quoi de plus beau, de plus merveilleux que le sexe ? Quand il se pratique entre adultes consentants. Quoi de plus dégradant, de plus humiliant, de plus révoltant que le sexe ? Quand un entraîneur réveille une jeune patineuse à la lumière de sa lampe torche pour lui infliger « une chose si horrible », qu’il lui est
« impossible » de la raconter à ses parents ; nous comprenons tous que le meilleur dans la vie peut aussi donner le pire. Le témoignage de la grande championne Sarah Abitbol, hier, au micro de France Inter, provoquait un haut-le-coeur. D’autres confessions, publiées le matin même par l’Équipe, assombrissaient encore plus le tableau : disciplines touchées, des sports individuels. Dont les fédérations doivent redoubler de vigilance. Le patinage, encore, mais aussi la natation. Le tennis, on le savait déjà, depuis le témoignage de la Tropézienne Isabelle Demongeot qui avait obtenu devant la cour d’assises de Draguignan que son entraîneur soit condamné pour viols sur mineures. Sportives, mais aussi actrices, c’est une lourde responsabilité pour elles que de briser l’omerta. Dévoiler ses souffrances, le traumatisme qu’elles en gardent, saisir la justice. Leur courage inspire un sacré respect. Elles racontent une histoire que d’autres ont vécue, dans d’autres lieux, à d’autres temps, dans d’autres circonstances. Peut-être, ces victimes anonymes y puisent-elles la force de parler à leur tour. Dans ce combat de tous les instants contre les violences sexuelles, il suffit parfois d’un habile lapsus pour faire avancer la cause. Comme Florence Foresti, maîtresse de cérémonie des prochains César, annonçant, hier, douze nominations pour… Je suis accusé de Roman Polanski, le réalisateur de J’accuse [lire ci-contre]. Comme un rappel, en forme de pirouette de langage : un homme peut être admiré pour ce qu’il est, pour ce qu’il fait, la présomption d’innocence est un droit inaltérable mais elle n’exclut pas, elle ne doit jamais exclure, même le temps d’un sacre, la parole des victimes.