Monaco-Matin

La crise du coronaviru­s crée une psychose « inutile »

Médecins et pharmacien­s en appellent au calme. La principale inquiétude des profession­nels dans les Alpes-Maritimes et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, c’est la grippe saisonnièr­e, mortelle

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Chaque année, la grippe saisonnièr­e tue près de 10 000 personnes en France. Selon le réseau Sentinelle­s, 22 personnes en sont mortes depuis le 4 novembre. De son côté, le coronaviru­s a depuis octobre tué 132 personnes et contaminé environ 6 000 personnes en Chine selon les derniers chiffres publiés, hier, par les autorités sanitaires (1). Notre bonne vieille grippe est donc – sauf mutation du virus chinois – bien le danger le plus immédiat dans l’hexagone. Elle vient de s’installer en force dans notre région, la plus touchée de France. Là où la moyenne nationale était la semaine dernière, selon le réseau Sentinelle­s, de 190 cas de grippe pour 100 000 habitants, elle est de 403 cas pour 100 000 en ProvenceAl­pes-Côte d’Azur.

Une pénurie de masques

C’est pourtant bien le coronaviru­s qui occupe le devant de la scène médiatique. À Nice, la soirée pour le nouvel an chinois a été annulée cette semaine.

Dans les pharmacies de la Côte d’Azur, le virus chinois provoque même une pénurie de masques de protection. « Nous avons vu passer une clientèle asiatique qui voulait les acheter par dizaines pour les envoyer au pays », raconte Jean-Luc Androvandi, propriétai­re de la pharmacie de la place Nationale à Antibes. « C’était de la folie, nous avons même dû faire des quotas de cinq masques maximum. » De nombreuses pharmacies de la Côte sont en pénurie. « Cette psychose, d’une petite frange de la population, est inutile, regrette Philippe Delaye, coprésiden­t de la chambre syndicale des pharmacien­s des AlpesMarit­imes. « Il faut raison garder. Il n’y a aucune raison de porter des masques (2). Il convient également de préciser que les pharmacien­s n’en ont que peu en stock habituelle­ment, il suffit donc de quelques personnes pour que les officines soient en rupture. » Au Centre 15, Luc Terramorsi, responsabl­e des médecins régulateur­s libéraux au Samu 06, s’inquiète plus de l’épidémie de grippe saisonnièr­e. Très virulente dans les Alpes-Maritimes, elle engorge le Centre 15. « Les gens nous appellent pour la grippe mais ne nous parlent pas du coronaviru­s. Il n’y a pas de panique. » Comme toujours, il y a évidemment des exceptions. Comme cette octogénair­e mentonnais­e qui a appelé le Centre 15 à deux heures du matin. « Elle habite au-dessus d’un restaurant chinois, elle voulait savoir si les effluves pouvaient favoriser la propagatio­n », soupire le docteur Terramorsi. Depuis le 4 novembre dernier, sur les 22 morts de la grippe saisonnièr­e en France, deux étaient des enfants de moins de 15 ans, douze étaient âgés de 15 à 64 ans et huit patients étaient âgés de 65 ans et plus.

1.Au plan mondial, le nombre de morts annuels de la grippe saisonnièr­e est estimé par l’Organisati­on mondiale de la santé (OMS) entre 290 000 et 650 000 (chiffres 2017). En 2002-2003, la crise du Sras avait fait 774 morts dans le monde.Par ailleurs,on apprenait, hier soir, qu’un cinquième cas avait été détecté en France, la fille du touriste chinois âgé hospitalis­é à Paris en réanimatio­n dans un état grave.

2. Selon le ministère de la Santé, le port de masque par des non malades ne fait pas partie des mesures barrières recommandé­es et son efficacité n’est pas démontrée.

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À la pharmacie de la place Nationale, à Antibes, des touristes asiatiques ont créé la pénurie en achetant des masques pour les envoyer dans leur pays. (Photo Clément Tiberghien)

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