Réforme des retraites : les députés entrent dans le dur
C’est la première étape du marathon législatif sur la réforme des retraites : les députés entament aujourd’hui l’examen en commission du texte, article par article. Une bataille qui s’annonce ardue.
Pas moins de 22 000 amendements ont été déposés, un record sous cette législature. De quoi gripper les travaux de la commission spéciale de 70 députés, qui a en principe une semaine pour étudier les 65 articles du projet de loi ordinaire et les 5 du projet de loi organique, avant son arrivée dans l’hémicycle le 17 février.
En « grève par le zèle » , les 17 Insoumis, qui assument « l’obstruction » selon leur chef de file Jean-Luc Mélenchon, en ont déposé environ 19 000. Tous ne seront pas forcément jugés recevables, après un week-end chargé pour les administrateurs de l’Assemblée.
« Ce n’est même plus de l’obstruction, c’est du ZADisme législatif », tance la co-rapporteur Olivier Véran (LREM). « Ceux qui tentent aujourd’hui de phagocyter les discussions sont les mêmes à réclamer un vrai débat sur les retraites » ,relève de son côté la présidente de la commission Brigitte Bourguignon (LREM, ex-PS).
La majorité est consciente que les oppositions de droite comme de gauche ne lui feront « aucun cadeau », mais assure être prête, comme le Premier ministre Edouard Philippe, qui n’a « pas peur » du « champ de braises » promis. « Nous sommes très fiers de porter cette réforme redistributive », affirme Célia de Lavergne, vice-présidente de la commission. Pour le président de l’Assemblée Richard Ferrand, c’est même «laréforme la plus à gauche du quinquennat ».
« Garder nos nerfs »
Mais, reconnaît une « marcheuse », « on sera également évalués à notre capacité à garder nos nerfs » et «ilvafalloir gérer la fatigue ». D’abord au sein de la commission spéciale, devant laquelle vont se succéder les sept corapporteurs (5 LREM, 1 MoDem, 1 Agir) faisant notamment le lien avec le secrétaire d’État Laurent Pietraszewski et la ministre Agnès Buzyn. Puis en séance mi-février, où la crispation risque d’atteindre son paroxysme.
Alors que les Français combattant la réforme sont dans la rue depuis le 5 décembre, les oppositions n’ont eu de cesse de dénoncer un texte « à trous » – avec notamment ses 29 ordonnances programmées – et un « mépris » du Parlement.
Elles contestent aussi une étude d’impact « incomplète et insincère », et s’appuient sur l’avis du Conseil d’État qui a lui-même pointé des projections financières « lacunaires ».
À gauche, où l’on promet « une bataille parlementaire massive », les trois groupes – PS, PCF et LFI – sont prêts à dégainer tous les outils, dont une motion de censure commune contre le gouvernement, mi-février ou fin février. À l’autre bord de l’hémicycle, pas d’obstruction en vue, mais tout de même un millier d’amendements LR en commission. « Notre stratégie est d’incarner une troisième voie entre le gouvernement et celles et ceux dans le blocage », avance le patron du groupe, Damien Abad.
Parmi les macronistes, certains préviennent qu’ils ne seront pas de simples « guichets d’enregistrement ». Mais le groupe majoritaire ne défendra en commission qu’une vingtaine d’amendements sur l’information des Français, le handicap, les conséquences des séparations dans les couples, ou encore la pénibilité. Parallèlement, la bataille de la rue va se poursuivre : le 6 février sont programmées de nouvelles manifestations.