Une dernière parade avant le Turini
Hier, au plus grand plaisir des passionnés de mécanique, les équipages du Rallye Monte-Carlo historique ont rejoint le parc fermé sur le quai Albert-Ier. Avant d’amorcer la nuit du Turini
Il est 15 h 15, hier, sur le quai Albert-Ier. Le soleil hivernal tape dur sur le bitume azuréen. Au loin, les premiers vrombissements se font entendre. Le raout mécanique ne fait que commencer sur l’esplanade du port Hercule. Au comptegouttes – minute par minute – des centaines de belles d’antan déboulent sur l’estrade pour « pointer » auprès des commissaires du Rallye Monte-Carlo historique, 23e du nom. La première à se prêter à l’exercice ? Une Golf GTI de 1978, laquelle pointe à la seconde place au classement général.
Une fois affranchis du contrôle horaire, pilotes et copilotes ne font guère de vieux os. « Ils vont aller se reposer avant de reprendre la route ce soir », lance le speaker. Ce rallye-là n’est certes pas une compétition de vitesse – il faut tenir une moyenne de vitesse imposée par les organisateurs – mais les
(1) nerfs sont mis à rude épreuve. Et le capital sommeil un brin perturbé. Déjà treize spéciales de régularité avalées par les concurrents, avant la dernière nuit. La plus mythique, celle qui a fait les belles heures du Monte-Carl’. Sa majesté le col de Turini. « Le horsd’oeuvre ou plutôt le plat de résistance du rallye », poursuit le speaker.
Désespérés par le temps clément
Le genre de nocturne (SR14 : Col de Braus - Lantosque ; SR15 : La Bollène-Vésubie Sospel)
qui peut aisément bouleverser l’ordre établi du classement, du fait des conditions météorologiques généralement piégeuses. Des routes sinueuses où la moindre erreur, de conduite comme de concentration, se paye cash. Problème, depuis le top départ de ce Rallye Monte-Carlo historique, l’asphalte est désespérément – au regard des participants – sec. La faute au dérèglement climatique diront les plus taquins. « Les terrains douteux permettent habituellement de faire la différence. Ce qu’on attend dans ce rallye, ce sont des passages enneigés. Là, rien ! Pour le coup, ce n’est basé que sur la régularité », souffle un ancien du WRC, Bruno Saby, au volant d’une Renault 5 Alpine de 1977. Traduction : les onze premiers du classement se tiennent en trente petites secondes.
« Tout va se décider cette nuit. Le vainqueur d’aujourd’hui ne sera pas forcément celui de demain. Pas de pluie annoncée, ni de brouillard » ,résumait, hier soir, Christian Tornatore, directeur de course à l’Automobile Club de Monaco. Si les températures clémentes ont rameuté les foules sur les routes d’Ardèche, de la Drôme et des Hautes-Alpes, elles n’ont pas été sans incidence sur les vieilles mécaniques. «Ona eu plus de quarante abandons, on en a jamais eu autant, confie Christian Tornatore. Les mécaniques trinquent car elles surchauffent. Il y a eu beaucoup de pannes, de joints de culasse en surchauffe ou des soucis de boîte de vitesses. Les voitures plus petites ont plus de mal. Il n’y a pas de glisse pour compenser leur faiblesse du moteur. Ce sont les voitures plus puissantes qui sont devant au classement. »
« Dormir et réviser »
À la sixième place, on retrouve d’ailleurs Pascal Perroud
et Guillaume Allais dans le baquet de leur Golf GTI de 1979. Sur un asphalte qui ne sera ni verglacé ni détrempé, ils ne voient qu’une seule clef pour espérer grimper sur le podium : une parfaite osmose et une confiance aveugle entre le pilote et le copilote. « Il faudra être très précis. Le travail du copilote est prépondérant, Et puis, on se connaît depuis trente ans, on se connaît par coeur, confient les deux hommes avant de s’échapper pour une courte sieste réparatrice. On va dormir mais aussi réviser notre road-book, le parcours et les annonces que je vais lire au pilote. »
Un parcours légèrement modifié en raison de l’éboulement sur la RD 2566 au hameau de Monti. Un parcours dont les premiers hier soir – un duo tchéquo-danois – ne connaissent guère.
« L’inconvénient pour eux, c’est qu’ils ne sont pas de la région. Ça va être dur de rester en tête », prédit Christian Tornatore.
21 h pétantes. Toutes les trente secondes, les bolides d’époque s’élancent sous les crépitements des flashs. Les équipages font, bien volontiers, pétarader les pots d’échappement. Direction l’arrière-pays. Pour écrire un nouveau chapitre du MonteCarl’.