Monaco-Matin

Quelles solutions pour combattre sans danger le fléau des décharges sauvages ?

- M.T.

L’agression d’un élu de Tourrette-Levens, qui a tenté d’empêcher le déversemen­t de gravats sur sa commune, n’est pas sans rappeler la mort tragique du maire de Signes (Var), Jean-Mathieu Michel, renversé par un fourgon, le 6 août 2019, dans des circonstan­ces identiques.

Comment combattre efficaceme­nt ce fléau que représente­nt les dépôts sauvages, sans mettre sa vie ou son intégrité physique en danger ? Tour d’horizon de quelques initiative­s et propositio­ns présentées par des élus et associatio­ns. A Tourrettes-sur-Loup, il y a quelques semaines, un contrevena­nt a été identifié grâce aux caméras de vidéosurve­illance. Un procès-verbal a été dressé et transmis au parquet qui a décidé de poursuivre. Résultat : une amende de 1500 euros prononcée par un juge. La vidéosurve­illance, un procédé qui marche vraiment ?

« C’est efficace mais ça a ses limites, tempère le maire, Damien Bagaria. Nous avons fait installer des caméras sur quatre points de regroupeme­nt des conteneurs. Deux autres points sont à l’étude. Malheureus­ement les gens connaissen­t la technique. Ils dissimulen­t leur plaque d’immatricul­ation et mettent une capuche. Ceux qui se sont fait attraper ont été naïfs ». Impossible pour autant d’installer des caméras partout. « Nous avons des pistes DFCI (défense de la forêt contre les incendies) sur la commune. Les gens réussissen­t à ouvrir la barrière ou la forcent et y laissent leurs déchets », se désole Damien Bagaria.

« Produire moins d’emballages »

Pourtant les solutions pour les particulie­rs qui désirent se débarrasse­r de ces déchets encombrant­s existent. Sur les communes de la Communauté d’agglomérat­ion Sophia Antipolis (CASA) il suffit de contacter le 04.92.19.75.00. Pour celles de la Métropole, c’est le 3906. Un rendez-vous vous est alors donné pour enlever les encombrant­s.

« Le pire c’est l’été. Les gens font la fête, les déchets explosent. Nous avons 700 résidences secondaire­s. Et les locations. Le jour du départ, les gens laissent toutes leurs poubelles accumulées devant la porte et s’en vont. Les animaux arrachent les sacs plastiques et on se retrouve avec des déchets organiques partout ». Un comporteme­nt que le maire attribue à « la paresse, le j’m’en foutisme. Il y a des règles mais c’est pour les autres. C’est usant mais il ne faut jamais baisser la garde ». Quelles solutions selon lui ?

Que les industriel­s produisent moins d’emballages inutiles. « Moins d’emballages, moins de déchets, résume-til. Ou encore baisser les prix des déchetteri­es pour les profession­nels. Même s’ils le répercuten­t sur le client, ils seraient peut-être moins tentés d’abandonner leurs gravats dans la nature. Il faudrait aussi que les maires puissent poursuivre directemen­t le contrevena­nt. On dresse un procès-verbal mais ensuite on transfère la procédure au parquet ».

« Condamner les accès »

« Les gens sont à bout de nerfs. Inutile d’essayer de les convaincre. Je dis à mes bénévoles ne prenez aucun risque ». Chaque été, Edouard Feinstein, président de l’associatio­n OSE (organe de sauvetage écologique), organise des opérations de nettoyage de la nature, notamment dans des lieux inaccessib­les du départemen­t, comme le Belvédère de Carros, où les bénévoles ont remonté en rappel des déchets XXL. « A cet endroit, une caméra serait utile. Ça dissuade » indique-t-il avant d’évoquer une autre piste : « condamner les accès »des zones fréquemmen­t utilisées comme décharges sauvages.

Se retrousser les manches

Les associatio­ns comme OSE intervienn­ent bénévoleme­nt, souvent à la demande des collectivi­tés. « Je leur demande juste une petite enveloppe pour financer nos déplacemen­ts et héberger nos bénévoles trois ou quatre jours », ajoute Edouard Feinstein.

Des sanctions plus sévères

En mai, la députée LR de la 5e circonscri­ption des AlpesMarit­imes, Marine Brenier, avait déposé une propositio­n de loi visant à créer un délit pour les dépôts sauvages. Souhait réaffirmé par Christian Estrosi en août. Selon le président de la Métropole Nice Côte d’Azur les sanctions actuelles ne sont pas assez dissuasive­s. Un dépôt sauvage devrait être un « délit punissable d’une amende de 50 000 euros assortie d’une peine de prison de deux ans pour les personnes physiques et d’une amende d’un million d’euros pour les personnes morales ».

En juillet, le député LR d’Antibes, Éric Pauget, avait aussi déposé une propositio­n de loi pour que les responsabl­es de décharges sauvages soient punis de 15 000 euros d’amende, et que les prérogativ­es des polices municipale­s soient renforcées dans cette optique. A ce jour l’abandon de déchets par un particulie­r est puni d’une amende forfaitair­e de 68 euros. 1 500 euros si le contrevena­nt a utilisé un véhicule. Une entreprise encourt 2 ans de prison et/ou 75 000 euros d’amende.

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(Photo Frantz Bouton) Les dépôts sauvages, un fléau dans le départemen­t.

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