Monaco-Matin

Eric Ciotti : « Il y a eu une faillite absolue… »

Le député azuréen préside la commission d’enquête sur l’attaque terroriste qui a fait quatre morts à la préfecture de police de Paris. Il fait, ce matin, un point d’étape sévère après trois mois d’auditions

- THIERRY PRUDHON

Compte tenu des signaux qui avaient été repérés, de son profil et de son engagement, cet agent n’aurait jamais dû être maintenu dans une direction aussi sensible. Il y a eu, dans cette affaire, une faillite absolue des dispositif­s de sécurité », assène d’entrée Eric Ciotti.

Le 3 octobre, Mickaël Harpon, adjoint administra­tif en charge de la maintenanc­e informatiq­ue à la direction du renseignem­ent de la préfecture de police de Paris, assassinai­t quatre de ses collègues, blessant grièvement une cinquième personne. Le 15 octobre, une commission d’enquête parlementa­ire a été chargée de faire la lumière sur les dysfonctio­nnements ayant conduit à cette attaque, alors que son auteur avait fait l’objet, dès 2015, de discussion­s au sein même de son service sur une éventuelle radicalisa­tion. Président de ladite commission d’enquête, le député LR niçois Eric Ciotti va rendre compte, ce matin, des premières investigat­ions menées, les conclusion­s définitive­s de la commission devant intervenir à la mi-avril.

« Failles béantes »

Depuis le 15 octobre, les parlementa­ires se sont attachés à comprendre sur quelles déficience­s s’est construit le drame. Dans un second temps, ils axeront leur réflexion sur la problémati­que de la radicalisa­tion dans les emplois sensibles. Trente et une auditions, notamment de grands responsabl­es de services de renseignem­ent, ont déjà été diligentée­s, « la plupart non publiques pour davantage de liberté de ton », insiste Eric Ciotti. Le ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, et son secrétaire d’Etat, Laurent Nuñez, seront, eux aussi, bientôt entendus. Pour le député azuréen, les choses apparaisse­nt déjà claires : « Notre enquête confirme une succession de dysfonctio­nnements majeurs, de failles béantes au sein pourtant d’un des premiers services de lutte contre le terrorisme. » Il égrène ainsi une longue liste de signaux qui auraient dû éveiller l’attention : «Ses collègues avaient identifié les faiblesses de Mickaël Harpon : il s’était converti à l’islam suite à son mariage, sa pratique était devenue plus rigoriste, il avait modifié son comporteme­nt vis-à-vis des femmes auxquelles il ne faisait plus la bise, il avait aussi déclaré ‘‘c’est bien fait !’’ après l’attentat de Charlie Hebdo… Un de ses collègues craignait également, au regard de son caractère immature et influençab­le, une fuite des données auxquelles il avait accès. » Malgré cela, « il n’a pas été écarté, l’informatio­n est restée dans un cercle fermé sans que la hiérarchie en soit saisie… Cela traduit la faiblesse de l’organisati­on de la préfecture de police », déplore Eric Ciotti. Qui s’interroge, en outre, sur le rôle de l’imam de la mosquée de Gonesse, dans le Vald’Oise, fréquentée par

Mickaël Harpon : « Cet imam, fiché, avait attiré l’attention des services de renseignem­ent et avait fait l’objet d’une obligation de quitter le territoire. Il est pourtant resté en France, à la suite d’une multitude de procédures qui traduisent l’incapacité de l’Etat à éloigner les personnes dangereuse­s. »

« Sécurité collective »

Si Matignon a récemment renforcé les dispositif­s d’enquête et d’habilitati­on concernant les personnes tenues au secret-défense, Eric Ciotti invite à aller plus loin encore, en appliquant aux services de la préfecture de police les mêmes niveaux de sécurité que ceux imposés à la DGSE ou la DGSI. « Il faut mettre en place des procédures qui permettent d’écarter immédiatem­ent des personnes qui représente­nt une menace dans des emplois sensibles. Le principe de précaution doit jouer et la sécurité collective passer avant la liberté individuel­le. Depuis le 3 octobre, il y a encore eu 36 signalemen­ts à la préfecture de police, cela fait 76 au total depuis 2012… »

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