Monaco-Matin

Le directeur artistique livre ses souvenirs

Le Grimaldi Forum a 20 ans cette année. L’occasion de vous emmener dans les coulisses de la machine. Cette semaine, on vous présente celui qui programme les concerts et spectacles

- PROPOS RECUEILLIS PAR LUDOVIC MERCIER euros

Jeudi soir, c’est le grand retour des Thursday Live Sessions au Grimaldi Forum de Monaco. Ces petits concerts gratuits à la programmat­ion éclectique attirent chaque jeudi un public fidèle, heureux de retrouver une vraie proximité avec les artistes. Jeudi soir, la saison démarrera avec The Limbos, un groupe espagnol délicieuse­ment rétro. C’est l’occasion d’aller à la rencontre d’Alfonso Ciulla, le directeur artistique du Grimaldi Forum, où il travaille depuis l’ouverture il y a 20 ans, et qui décroche toutes sortes de spectacles pour animer les soirées monégasque­s.

Comment êtes-vous arrivé au Grimaldi Forum ?

J’avais rencontré le directeur de l’époque avec qui je partageais beaucoup de musique. Il m’a annoncé la ligne directrice donnée par le prince Rainier III qui était « étonner sans choquer ». Le but était de sortir d’un marasme musical cloisonné dans ce qui était vu revu et archivu.

Comment vous y êtes vous pris ?

On a commencé par les Stereowave­s en . C’était rendez-vous électro, où l’on faisait venir chaque trimestre un ou deux DJ directemen­t de détroit. C’était le vrai son techno house de l’époque.

Comment le public a accueilli cela ?

Avec beaucoup d’enthousias­me. C’était très safe, donc ça rassurait les parents. Les tarifs étaient très raisonnabl­es, et il y avait une partie VIP un peu plus cher. Et puis il y avait un self-control local qui faisait qu’il n’y avait aucun problème de stupéfiant. En deux ans, avec   personnes de hàhdumatin,iln’ya jamais eu aucun problème.

Est-ce que ce n’est pas difficile de surprendre sans choquer ?

Cela permet surtout de se creuser un peu la cervelle. Surtout pour les Thursday Live Session. C’est avec les oreilles mais surtout avec le coeur que l’on décide. Si on n’y met pas du coeur, autant prendre son panier et aller faire les courses. Programmer des artistes connus qui rapportent, tout le monde peut le faire. Pour les gros rendez-vous qui demandent plus d’investisse­ment, comme Iggy Pop prochainem­ent, il y a une commission à laquelle on soumet les gros spectacles. Ce sont eux qui décident. Parfois, il faut être patient, et présenter les spectacles plusieurs fois. Priscilla Reine du désert, (comédie musicale avec des personnage­s dragqueens, programmé début juin, NDLR) ça n’était pas passé il y a  ans. Et aujourd’hui ça passe. Cela montre que la société a évolué.

Y a-t-il des artistes que vous êtes particuliè­rement fier d’avoir programmés ici ?

Lorsque nous avons signé avec Jeanne Added, elle n’avait remporté aucune victoire. Rien. Par hasard sa manager, avec qui nous avions déjà travaillé, a vu la salle des Princes et m’a dit que Jeanne Added avait un projet dont elle ne pouvait pas nous parler. Elle m’a demandé si ça m’intéressai­t. Je la connaissai­s, je connaissai­s Jean Added et j’ai signé les yeux fermés. Il y a quand même une prise de risque.

Vous le faites souvent ?

Oui. Sinon, ça ne me plaît pas. Si on programme Adele ou Elton John, on remplira la salle. Il faut le faire aussi, bien sûr, mais c’est facile. Or je trouve que, lorsque l’on est trop dans le compromis, on perd son caractère. Je pense que dans une programmat­ion, il faut savoir aller chercher des choses différente­s. Encore une fois : sans choquer. On ne va pas s’amuser à faire des choses qui ne sont pas à notre image. Notre marque de fabrique, ce que l’on garantit, c’est la qualité. Et le public sait que même s’il ne connaît pas, il peut se fier à la qualité. On ne tombera jamais dans le facilement médiocre.

Cette démarche a dû vous apporter de bonnes surprises… Un souvenir en particulie­r ?

Lady Gaga ! Un jour, je programme les Pussycat Dolls, et en parlant avec le tourneur, il me demande si je connais Lady Gaga. Bien sûr je connaissai­s, mais la programmer seule, c’était un risque. En première partie des Pussycat Dolls, en revanche, ça avait du sens. Or il se trouve qu’entre la signature et le concert (entre six mois et un an, ndlr), la carrière de

Lady Gaga a explosé. Il y avait des jeunes qui étaient venus juste pour voir Lady Gaga, et qui sont partis avant le concert des Pussycat Dolls.

Quel est le plus grand défi dans votre travail ?

C’est difficile de se faufiler dans les dates de tournée d’un artiste et de trouver une date à laquelle il n’y a pas de congrès ici. Le but n’est pas de déranger la partie commercial­e, mais de s’adapter. Cela requiert beaucoup de souplesse pour se faufiler partout. Comme un poulpe. C’est devenu mon surnom.

Les Thursday Live Sessions démarrent cette semaine. Comment vous décririez ces événements à quelqu’un qui ne les connaît pas ?

Il y a  dates avec sept artistes vraiment différents. Je m’efforce de ne pas m’enliser dans un genre musical pour ne pas satisfaire qu’un seul public. J’essaie de faire en sorte qu’il n’y ait pas d’artistes similaires à la suite. Le public apprécie cela. Il y a même des réservatio­ns des mêmes personnes d’une fois sur l’autre, pour des concerts totalement différents. Ils ont toujours ce gage de qualité qui les rassure. Parfois, ils aiment moins, et ils me le disent. Mais il y a peu d’endroits dans le coin où vous pouvez venir boire un verre à deux mètres des artistes. C’est vraiment ça les Thursday Live Session : des événements simples, avec une vraie proximité. Et puis, le jeudi, on passe toujours une bonne soirée.

Savoir +

Thursday Live Session au Grimaldi Forum

Entrée libre et gratuite Consommati­ons à partir de 4 assiettes à partir de 14 euros Réservez votre table au :

+377 9999 2020 ou +377 9999 3000 à partir de 18h30 apéromix - 20h30 live

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Dans son bureau digne d’une caverne d’Ali Baba de mélomane, Alfonso Ciulla épluche la presse spécialisé­e, et internet pour trouver une programmat­ion audacieuse qu’il veut toujours qualitativ­e. (Photo Dylan Meiffret)
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(Photo Archive Monaco Matin) Peu connue au moment de signature, Lady Gaga a vu sa carrière exploser avant le concert où elle assurait la première partie des Pussycat Dolls en .

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