Monaco-Matin

Les jours d’après

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Il y a le temps du mal. Ce corps que l’on écoute, qu’on ressent comme jamais. Toutes ces bouffées d’air que l’on doit surveiller. Pire qu’un tic, comme un toc dans des jours plein de fièvre. Chercher à se rassurer. Pas facile, au diapason d’un mal qui frappe sans hésiter.

C’est le temps de la peur, parce que l’on reste humain. Celui des humeurs noires, parce que plus rien n’est rose. Doublement confiné, dans son mal, sous son toit. On se rêve en guerrier, on est un nouveau-né.

Alors, dans un réflexe, on allume la télé. Tout est noir, poisseux et moche. On éteint la télé ? Et ce n’est pas beaucoup mieux.

Plus qu’une alternativ­e, se raccrocher aux autres. Le corps en quarantain­e mais le coeur en périple. On tremble pour tous ceux qu’on ne peut plus approcher. Pendu au téléphone et on respire mieux... Chaque émoticone devient shoot d’oxygène. Le moindre « tout va bien », un vin millésimé dont on kiffe abuser.

Et puis, il y a le temps de la mélancolie que l’on expériment­e. Cette inutilité qu’on doit apprivoise­r. Face à tous ceux au front qui gardent les tranchées avec des armes en toc mais un mental d’acier.

Chaque jour (tré) passe... Soudain le corps revit et les souvenirs remontent. Ces phrases que l’on regrette, ces bises qu’on a claquées. Trop fier, trop con, on a minimisé. « Mais non, mon fils, ça n’arrivera jamais ! C’est en Chine, pas ici, retourne te coucher. » Enfin, le « jour d’après ». Son « jour d’après » quand le virus abdique. En attendant celui de ceux qui sont touchés. On se remet à penser et à analyser. Tristesse, colère : c’est quand que cela a merdé ? On n’a pas la réponse. Et puis, tant pis, en fait, ce temps viendra un jour... Ce que l’on veut maintenant, c’est la fin des rues vides et des cruels bilans. On veut tirer un trait sur les drames qui se jouent derrière les portes closes. Revivre comme avant ! Revivre comme avant ? En fait, pas vraiment.

« Le corps en quarantain­e mais le coeur en périple. »

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