Edouard Philippe laisse entrevoir « un déconfinement régionalisé »
La mission d’information sur la gestion de l’épidémie, appelée à se muer ultérieurement en commission d’enquête, s’est réunie pour la première fois hier soir, en visioconférence, afin d’auditionner Edouard Philippe et le ministre de la Santé Olivier Véran. Composée d’une quarantaine de parlementaires, elle est dirigée par le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, qui a circonscrit l’objectif : « Faire vivre le contrôle démocratique, sous le signe de la confiance, sans entraver l’action de l’exécutif. Le temps des remises en cause viendra, une fois le plus fort de la crise derrière nous. » De fait, cette séance initiale aura surtout permis au chef du gouvernement de mettre en perspective son action.
« Nous ne savons pas tout » D’emblée, le Premier ministre a adopté une attitude empreinte d’humilité : « Nous sommes totalement engagés dans cette guerre, mais nous ne savons pas tout. Nous pouvons expliquer nos contraintes, nos décisions, sachant que cellesci doivent parfois être prises sur le fondement d’informations contradictoires. » Invité à poser une échéance pour le déconfinement, il s’est montré tout aussi prudent. Il dépendra des tests qui pourront être pratiqués et de la proportion de la population immunisée. «Il est probable », a-t-il expliqué, que le déconfinement ne soit pas général mais ciblé, « régionalisé, progressif », soumis à des tests ou par classes d’âge, avec l’espoir pour l’exécutif de présenter des scénarios de sortie dans « les jours ou la semaine à venir ».
Le bac forcément adapté Edouard Philippe a aussi indiqué que la réouverture des écoles, évoquée pour le 4 mai par le ministre de l’Education nationale, n’était à ce stade « qu’une hypothèse », tout en répétant qu’il n’était pas question de toucher aux vacances de Pâques. « Le bac ne pourra pas être organisé dans des conditions normales, a-t-il ajouté. Plusieurs options sont sur la table. Le ministre est en train d’instruire les solutions envisageables. »
Les masques multipliés Olivier Véran, de son côté, a certifié que la production de masques a débuté dès janvier. « 110 millions de masques ont été déstockés depuis le début de l’épidémie, les besoins étant évalués à 40 millions distribués par semaine », alors qu’une commande globale de 1,5 milliard d’unités est en cours. Chaque jour, 50 000 sont désormais destinés aux Ehpad. Le ministre de la Santé a, en outre, assuré que les établissements hospitaliers privés étaient à présent pleinement associés aux efforts de réanimation. Il a souligné la capacité d’adaptation du pays, « qui compte aujourd’hui plus de malades du coronavirus en réanimation que la France ne compte habituellement de lits de réanimation ». Ce qui n’empêche pas « la dynamique épidémique d’être toujours grave et inquiétante ».
Des contrôles frontaliers Pour soutenir l’économie, Edouard Philippe a rappelé les 300 milliards de garantie d’emprunts par l’Etat pour les entreprises et le renforcement du dispositif de chômage partiel. Repoussant une sollicitation de Jean-Luc Mélenchon, il a en revanche estimé qu’augmenter la production « ne passait pas forcément par la nationalisation ou la réquisition, qui désorganisent parfois la fabrication ».
En réponse à une question d’Eric Ciotti sur le non-respect du confinement dans certains quartiers, il a redit que celui-ci « devait s’appliquer partout, selon des règles strictes formulées pour l’ensemble du territoire et que le ministère de l’Intérieur s’emploie à faire respecter ». Il a, d’autre part, à défaut de fermeture des frontières avec l’Italie, évoqué « des contrôles renforcés », 136 non-admissions de ressortissants italiens à la clé depuis le 18 mars. « Notre stratégie a évolué au fur et à mesure que la doctrine de l’Organisation mondiale de la santé elle-même évoluait », a insisté le chef de l’exécutif, au terme de trois heures et demie d’audition.