Monaco-Matin

Venus de Menton et coincés en Thaïlande, ils racontent leur galère

- ALICE ROUSSELOT

« Je voyage depuis quarante ans, c’est la première fois que j’ai eu à ce point l’impression d’être un pion. On s’est sentis abandonnés. » Le Mentonnais Philippe M., habitué à se rendre en Thaïlande pour y retrouver des amis, garde un souvenir amer de son dernier périple. Rentré lundi à Menton au terme d’une sacrée épopée, il s’inquiète désormais du sort de trois copains à lui – Mentonnais également – restés sur place. Pour le petit groupe, l’histoire a débuté il y a trois semaines environ. Apprenant que l’épidémie du coronaviru­s gagnait du terrain – bien qu’à Pattaya, où ils se trouvaient, rien n’avait fuité – les Mentonnais ont commencé à se soucier de leur retour en France.

Des vols « entre   et   euros » !

« Mon vol était prévu le 8 avril. Sur le site de la compagnie, ça avait l’air de fonctionne­r à peu près mais tous les vols s’arrêtaient à Doha. J’ai voulu m’inscrire au site Ariane [site du ministère des Affaires étrangères]. Vu que l’épidémie était partout et qu’il y a beaucoup de Chinois en Thaïlande, je me

suis dit qu’il y avait un risque de confinemen­t », raconte Philippe. Première déconvenue : le site du ministère des Affaires étrangères dédié aux voyageurs est inaccessib­le. Quant à l’ambassade, elle n’est pas plus joignable. Un peu inquiet, le Mentonnais fait des recherches. Et découvre que les vols proposés pour Paris flirtent alors « entre 6 000 et 14 000 euros » .Un business de la honte, selon lui.

« L’ambassade a finalement ouvert.

Jusque-là, on ne pouvait même pas signaler qu’on se trouvait ici. C’était comme s’ils nous laissaient nous débrouille­r jusqu’au bout » , reprend-il. Précisant avoir dû faire croire que son visa arrivait à son terme pour pouvoir obtenir un billet pour Roissy. Deux à trois jours plus tard, il reçoit un lien d’Air France Thaïlande. Autoconfin­é avec ses amis, par précaution, Philippe clique sur le lien et commence à remplir le formulaire.

Mais une fois la démarche achevée, impossible d’en faire de même pour ses acolytes.

« Capable de fermer les frontières »

Les voilà contraints à attendre la date mentionnée sur leur billet retour : le 17 avril. « Ils viennent d’obtenir une extension de séjour d’un mois ce qui les couvre pour une durée non négligeabl­e », souligne Philippe, rassuré pour ses amis.

Après le départ du roi de Thaïlande, parti se confiner en Allemagne, précise-t-il, les pleins pouvoirs ont été donnés au premier ministre, réputé pour être totalitair­e. « Il a déjà annoncé qu’il bloquerait les médias si de mauvaises informatio­ns étaient diffusées. On a compris qu’il était capable de fermer les frontières… », poursuit le Mentonnais. Ajoutant que, dans le pays, tout le monde s’attend désormais à ce que les autorités donnent un grand coup sur la table. Impliquant, pourquoi pas, que tout soit fermé d’ici dix à quinze jours, même pour ceux qui disposerai­ent déjà d’un billet retour. « Les trois derniers jours que j’ai passé sur place, les gens ont enlevé les tables de resto, la police contrôlait ceux qui ne portaient pas de masque, un couvre-feu a été instauré à 20 h, presque plus aucun véhicule ne circulait », décrit-il. Pointant, malgré tout, du doigt quelques aspects positifs : les magasins et marchés sont bien achalandés (bien qu’aucune mesure d’hygiène ne soit appliquée), les pharmacies du pays commencent à vendre des autotests, permettant à chacun de vérifier régulièrem­ent s’il n’est pas contaminé. Désormais rentré chez lui, malgré une série de soucis rencontrés à Paris, Philippe s’interroge sur ce qu’adviendra de ses amis restés en Asie. Petite lueur d’espoir : depuis quelques jours, le site Ariane est de nouveau accessible et l’ambassade « vient de publier, à la surprise générale, la possibilit­é d’un rapatrieme­nt moyennant 550 euros qu’ils devront rembourser par l’intermédia­ire du Trésor public » indique-t-il. Même en cas de problème avec leur vol, qu’ils ont décidé de maintenir, la France ne devrait donc pas les laisser pour compte.

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Alors que Philippe a finalement réussi à rentrer à Menton, ses amis sont toujours coincés à Pattaya. (DR)

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