La région Paca peut-elle suivre la courbe du Grand-Est ?
Doit-on redouter un pic épidémique dans notre région qui ressemblerait à ce qui se produit actuellement dans le Grand-Est, première zone à avoir été touchée en France par le Covid-19 ?
De quoi parle-t-on ?
La courbe épidémique, c’est l’évolution de l’épidémie dans le temps. Les habitants du Grand-Est ont été les premiers touchés par le Covid-19. L’évolution du nombre de cas recensés dans cette région ressemblait au trait rouge dans le graphique (1) ci-contre jusqu’au 25 mars. Pendant ce temps, en région Paca, la courbe épidémique suivait le tracé bleu.
« jours derrière le Grand-Est »
L’observation de ces deux courbes faisait écrire à Corentin Barbu, chercheur à l’INRAE spécialisé en épidémiologie, que « la région Paca se situait 7 jours derrière le Grand-Est ». Les deux courbes étant sensiblement parallèles, on pouvait alors émettre l’hypothèse que celle de la région Paca allait suivre la trajectoire de celle du Grand Est.
Mais attention, les chiffres grâce auxquels ces courbes sont calculées ont un biais : le nombre de cas détectés dépend des tests qui sont menés. Et les politiques locales en la matière ont été très différentes selon les départements. En région Paca, par exemple, les Bouches-du-Rhône en ont pratiqué beaucoup plus que les autres ; c’est particulièrement flagrant lorsque l’on observe les graphiques réalisés au début de l’épidémie - la courbe des cas détectés dans les Bouches-du-Rhône était alors la seule à « décoller », celle des décès demeurant plutôt semblable à ses voisines du Var et des Alpes-Maritimes.
Le nombre de morts
La publication de ce décompte a par ailleurs été interrompue par la plupart des agences régionales de santé le 25 mars, rendant impossible le suivi de cette hypothèse.
« En matière d’épidémie, la comparaison la plus fiable reste celle de l’évolution du nombre de décès », explique Corentin Barbu.
Si l’on utilise une échelle logarithmique pour comparer l’évolution du nombre de décès en milieu hospitalier en région Grand-Est et Paca, on obtient le graphique 2
(le nombre de décès n’a pas été rapporté à la population, les deux régions étant sensiblement de la même taille). Les deux courbes sont parallèles. Et le 31 mars en région Paca (104 morts) correspond au 20 mars (105 morts) en région Grand Est, ce qui pourrait permettre de dire que la région Paca a « 11 jours de retard » sur le Grand Est en matière de propagation de l’épidémie.
Comment la situation peut-elle évoluer ?
La première donnée à prendre en compte, c’est le confinement. Les chiffres qui ont servi à modéliser les deux courbes ont été collectés après le décret du 17 mars. Mais les personnes testées Covid + ne meurent pas immédiatement après avoir contracté la maladie - une grande part des patients décédés à l’hôpital ces derniers jours sont tombés malades il y a plus de 15 jours. Certains épidémiologistes s’accordent néanmoins pour dire que les effets du confinement ne se feraient ressentir qu’à partir de la troisième semaine. Soit à partir du 6, voire du 13 avril. La propagation de l’épidémie en Paca pourrait ainsi poursuivre sa croissance encore quelques jours sur le même rythme - plus encore si le confinement n’est pas strictement respecté. «Ilafalluattendre pratiquement quatre semaines pour voir la courbe s’infléchir [en Chine] », expliquait ainsi Catherine Hill, épidémiologiste, ancienne cheffe de service de biostatistique et d’épidémiologie à l’Institut GustaveRoussy au micro de RTL. Dans le Grand Est, on s’attend à« un point d’inflexion de la courbe épidémique entre le 15 et le 25 avril », déclarait le directeur de l’Agence régionale de Santé aux Dernières nouvelles d’Alsace. Soit 4 semaines après les 105 morts du 20 mars.