Accoucher au temps du Covid-19 à Monaco
Dans un contexte d’épidémie galopante, la maternité du CHPG a revu les règles et procédures au sein du service. Le Pr Bruno Carbonne lève toutes les interrogations pour les futurs parents
Des futurs papas mis sur la touche. Interdits d’assister à l’accouchement de leurs compagnes. Dans certaines maternités françaises, la décision a pu être perçue comme injuste, frustrante, voire cruelle pour les couples en attente d’un enfant. Mais la réalité sanitaire, dans le contexte de l’épidémie galopante du Covid-19, a logiquement pris le dessus.
Au Centre hospitalier Princesse-Grace (CHPG) de Monaco, le professeur Bruno Carbonne n’est pas allé aussi loin – en termes d’exclusion – mais a foncièrement revu les règles et procédures au sein de son service gynécologie, où environ vingt naissances ont lieu chaque semaine. On fait le point.
Les papas autorisés mais sous strictes conditions
A contrario de certaines structures françaises, les futurs pères sont autorisés en salle d’accouchement. Et même dès le début du travail. « On a pris en compte les recommandations du Collège national des gynécologues et obstétriciens français. On a fait ce choix. Ce n’est pas de la négligence ou par démagogie, prévient le Pr Bruno Carbonne. On accepte leur présence dans des conditions très strictes. » Dans cette pièce de l’hôpital, tous les protagonistes portent logiquement un masque chirurgical. Une fois dedans, l’accompagnant a interdiction d’en sortir. Pas d’allées et venues – pour aller se restaurer, boire un café ou fumer une cigarette – comme cela pouvait être le cas auparavant. « Il ne croisera donc aucune autre femme enceinte ou personnel dans les parties communes », justifie-t-il.
Pas de visites des proches à l’hôpital
Mêmes mesures pour les heures qui suivent l’accouchement : seul le père est autorisé à rendre visite au nourrisson et à la maman. « Une entrée et une sortie dans le service par jour. Il peut rester toute la journée s’il le souhaite mais pas d’allées et venues », répète le médecin.
En revanche, le cercle familial et les proches ne sont pas autorisés à faire connaissance avec le nouvel être de la famille au sein de l’hôpital monégasque. « Cela a pu paraître choquant pour certains parents mais ils ont compris que ce n’était pas une mesure administrative bête et méchante mais que c’était pour diminuer les contacts entre personnes. »
Le virus présente-t-il un risque pour le foetus et la femme enceinte ?
En l’état des connaissances actuelles – basées sur les données chinoises, lesquelles sont réévaluées au jour le jour avec celles des autres pays touchés par la pandémie – il n’est pas démontré que le virus présente un risque pour le foetus. « Il semble n’y avoir pratiquement aucun risque de transmission du virus à travers le placenta. Après la naissance, si la maman est infectée il peut y avoir un petit risque de transmission. Cela est très rare et ce sont des formes relativement mineures. Il n’y a pas de détresse respiratoire très sévère chez ces enfants », rassure le Pr Bruno Carbonne. Toutefois, la vigilance doit être de mise pour les femmes entrant dans la deuxième période de la grossesse. Au moment où le ventre, particulièrement rebondi, peut susciter des gênes respiratoires. « S’il survient une forme grave nécessitant une prise en charge en soins intensifs, il va presque toujours être nécessaire de faire naître le bébé par césarienne avant le passage en réanimation de la maman, car les volumes de l’utérus et du bébé sont trop importants et ne permettraient pas une réanimation respiratoire efficace. » Le CHPG peut prendre en charge les prématurés à partir de 32 semaines d’aménorrhée (7 mois de grossesse). Avant ce terme, les femmes enceintes doivent être transférées au CHU de Nice, dans le cadre du réseau de périnatalité.
Un retour à domicile plus précoce
« À l’heure actuelle, les sorties sont plus précoces si l’état de santé de la maman et du nourrisson le permet. Dès le 2e jour [contre au moins trois auparavant, lorsque le bébé a retrouvé son poids de naissance], ils peuvent sortir, sous réserve de l’accord du médecin et du pédiatre, explique Irène Gabrielli, sagefemme au CHPG, assurant les suivis à domicile. On suit alors la prise de poids du bébé, les risques liés à la jaunisse, que tout se passe bien au niveau de l’allaitement. »
Un suivi somme toute classique. « Toutefois, le contexte fait qu’on est encore plus rigoureuses que d’habitude sur les mesures d’hygiène et de protection. Les mamans étant en vase clos chez elles, on est la seule visite qu’elles peuvent recevoir. C’est d’autant plus important d’être présentes pour répondre à toutes leurs interrogations. » Comme à la maternité, les visites du cercle familial et des proches sont donc proscrites à domicile. Confinement oblige. « Certaines sont heureuses et profitent de ce moment intime pour faire connaissance avec leur enfant en comité très restreint. D’autres aimeraient partager cette joie avec leur famille. » Heureusement, la technologie permet, au moins partiellement, d’effacer cette frustration légitime.