Monaco-Matin

« Plus long, c’est combien ? »

Ses vidéos sur les réseaux sociaux mettent en scène drôlement son confinemen­t, avec femme et enfants. L’humoriste et réalisateu­r trouve le temps long mais il attend, apprend, réapprend…

- PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

Comme tout le monde, Franck Dubosc se cantonne. Pour tromper l’ennui et pour amuser la galerie, il se met en scène, parfois en famille, dans des vidéos qui courent sur Twitter, Facebook, Instagram.

Ce confinemen­t ? Longuet ?

Ça va encore. Ce qui me paraît long, ce n’est pas ce qu’il y a derrière nous, mais devant. Les prochains jours que nous sommes incapables de compter. On sait bien que ce sera plus long que ce qu’on nous a dit. Mais plus long, c’est combien ?

Surtout avec de jeunes enfants ?

Les miens ont  et  ans. Et ce sera plus difficile pendant les « vacances ». Plus difficile pour eux, pas pour nous. Parce qu’un rythme s’est créé. Le matin, après le petit-déjeuner, ils se mettent au travail et ça se passe très bien. Tout se complique quand ils ont fini leurs devoirs. C’est très, très long, tous les parents le savent. C’est h/, ou presque, à les occuper parce qu’ils ont du mal à le faire tout seul. Je parle des miens, en tout cas. Donc, quand les « vacances » arriveront, fini ce moment d’école dont on profite pour travailler. Forcément, ils ont besoin de nous. C’est  jours sans maman, hein ! Bon, ceux qui ont  ou  ans et que l’on voit s’ennuyer, c’est déjà dur. Mais les petits, ils ne vont pas s’ennuyer : ils vont nous emmerder !

Cette guerre, ça fait mal au coeur de la leur faire subir ?

Je pense que cette année sera marquée dans notre tête à tous. Mais dans la leur, je suis persuadé que ce sera un mauvais souvenir pour toujours. J’ai demandé au plus jeune de mes fils pourquoi il n’appelait plus ses petits copains. Il m’a répondu : « parce qu’on n’a plus rien à se dire. » Les enfants, on ne sait pas ce qu’ils se racontent, mais sûrement des histoires d’école ou de foot. Il faut se rendre compte que, si la classe ne reprend pas, ne seraitce que deux semaines, ils n’auront pas vraiment eu d’année scolaire. Je suis sûr qu’à  ans, ils se diront : mon CM ou mon CM, je ne l’ai pas fait. Je pense qu’ils ont une angoisse que l’on ne mesure pas. Et encore, on parle de petits. Pour ceux qui passent le bac ou pour les étudiants, c’est horrible. Le traumatism­e sera fort.

Les devoirs, c’est vous ?

Non, c’est ma femme. Moi, j’en suis incapable et mes enfants l’ont bien compris. Quand je leur demande de m’expliquer ce qu’il faut faire, ils s’énervent. J’ai du mal, surtout en français. Non : le pire, c’est la géométrie. Leur mère a fait HEC, elle sait, alors je m’occupe un peu plus de l’histoire et de la géographie. Et j’apprends ! Ou je réapprends. Le nombre de voyages de Christophe Colomb, par exemple. Je croyais qu’il était parti une fois, non. Quatre !

Aussi des vidéos en famille ?

Exactement. Je mets en scène les enfants dans des petites vidéos que je mets sur Instagram. Non pas pour les utiliser, mais pour les occuper. Une vidéo, c’est deux heures de boulot ! Il y a d’abord le tournage, puis le choix de la prise et enfin un troisième moment agréable pour eux : le nombre de vues.   en moyenne. Sauf que j’ai fait un post avec le grand qui arrive à presque   alors que celui du petit doit être à  . D’où une jalousie entre les deux : il faut que je trouve quelque chose.

Une façon de leur mettre le pied à l’étrier ?

Je n’en sais rien. Peut-être, oui, pourquoi pas ? En tout cas, le grand, ça l’amuse beaucoup, c’est sûr. Et comme je ne veux pas montrer nos enfants, je les filme de dos, sauf qu’ils veulent de plus en plus apparaître de face. Et attention, ils choisissen­t leurs vêtements : pas question d’être habillés comme ci ou comme ça : non, c’est un vrai travail ! Que je fais autant pour amuser les gens, évidemment, que pour les distraire eux aussi.

Vos cheveux poussent…

Oui, mais pas en raison du confinemen­t. C’est pour le prochain film que je dois tourner, Rumba la vie .Onauradela chance, ça fera un peu plus de centimètre­s que prévu ! On devait commencer le  mai, c’est reporté au  juillet. Mais ce sont des dates que l’on se fixe et auxquelles on ne croit pas vraiment. Il y a

‘‘ des tas de métiers où c’est très compliqué. Pour la vie, c’est très compliqué…

Des raisons d’être optimiste ?

Je n’en ai pas trouvé beaucoup, mais je me dis juste que la grippe espagnole est arrivée après quatre ans de guerre, et pourtant les années folles ont suivi. Peuton espérer quelque chose de cet ordre ? Je n’en sais rien. Le déconfinem­ent se fera au compte-gouttes mais nous sommes assez forts, nous les

Français, pour fêter la fin de la crise lorsque nous serons réunis. Les premiers attendront les derniers. On se fout tous sur la gueule parce qu’il y a beaucoup d’inégalités, et c’est vrai, mais il faudra retenir ceci : quand on le chope, ce putain de virus, on est tous pareils.

On se dispute, mais on finit par se manquer ?

‘‘

Un mauvais souvenir pour toujours”

Bien sûr. Il faudra se rappeler tout ce qui nous aura manqué. À commencer par la liberté. Mais rester à la maison, ce n’est pas la même chose pour tout le monde. J’ai ma mère et ma soeur tous les jours au téléphone, elles sont en HLM et chacune me dit :

« Heureuseme­nt que j’ai un balcon. » Elles n’ont pas voulu déménager. Elles y ont leurs attaches, leurs amis, toute leur vie. Quand mon père est parti, j’ai voulu acheter pour ma mère un appartemen­t en ville, à Rouen. Elle a refusé. Mon plus grand souci, c’est elle. Chaque jour qui passe, je l’appelle et je me remplis du son de sa voix. En me disant : « Pourvu que ça ne tombe pas sur elle. »

Les premiers attendront les derniers”

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