Les bavardages de M. Chagrin et de Mme Jérémiade sur la Semaine Sainte
Retrouvez, chaque mois, la rubrique en français et en monégasque du Comité national des traditions monégasque
Deux membres du Comité national des traditions monégasques, le chanoine Georges Franzi (M. Chagrin) et Adrienne Cellario (Mme Jérémiade), très attachés au monégasque, se sont donné la peine de traiter non sans malice, différents thèmes. Ces conversations qui traduisent non seulement l’esprit qui anime notre langue mais aussi son humour, écrites par le chanoine Georges Franzi, firent l’objet de diffusions périodiques sur les ondes radiophoniques. Le Comité des traditions tient ainsi à nous rappeler les processions de la Semaine Sainte, supprimées en raison de la pandémie, pour nous aider à mieux vivre ce sommet de l’année chrétienne, cette Pâque inédite mais courage à tous car « à la fin du Gloria nous chanterons l’Alléluia ! »
MC: Bien le bonjour Madame Jérémiade, vous avez l’air bien soucieuse aujourd’hui !
Mme J : Et il y a vraiment une bonne raison, cher Monsieur Chagrin, car aujourd’hui c’est « A Ramuriva ».
MC: C’est vrai, maintenant on dit les Rameaux, ce matin j’ai déjà aperçu les enfants avec des palmes décorées dont quelques-unes étaient pleines de bonbons et de papillotes.
Mme J : Espèce de mécréant ! Vous croyez peutêtre que la fête des Rameaux n’est destinée qu’aux enfants.
MC: Comme vous y allez, Madame au sang chaud, je sais aussi bien que vous qu’aujourd’hui nous commençons la Semaine Sainte. Mme J : Sainte Vierge ! j’ai plaisir à voir que vous n’avez pas oublié la foi de votre enfance.
MC: Eh oui ! Autrefois on célébrait la Semaine Sainte avec plus de sérieux que maintenant, c’était vraiment une semaine de méditation et de contemplation chrétienne.
Mme J : On ne manquait pour rien l’office des Ténèbres (1), et nous attendions en tremblant le bruit assourdissant qui avait lieu à la fin.
MC: Quel vacarme ! Mais le plus beau c’était le Jeudi Saint lorsque les cloches étaient parties, comme on disait.
Mme J : Oh vous les garçons, vous ne pensez qu’à vous amuser.
MC : Peut-être, mais comme les cloches ne sonnaient pas nous allions à travers les rues du Rocher avec les crécelles et les planchettes à battant pour annoncer bien fort : « Il est midi ». MmeJ: Ce sont de vieilles traditions comme de manger des pois chiches le Jeudi Saint à midi.
MC: Puis le soir du jeudi il y a encore la procession de la Vierge qui pleure parce qu’elle cherche son fils mort.
Mme J : Et le Vendredi Saint, cher Monsieur, la procession du Christ-Mort, dans les rues sombres et silencieuses.
MC: Peut-être ! Mais parlez-moi un peu des trois Marie.
Mme J : Ce sont trois femmes vêtues de noir et couvertes d’un grand voile sombre de la tête aux pieds de telle sorte qu’on ne peut savoir qui elles sont.
MC: Et on dit qu’il ne faut pas chercher à le savoir. Mme J : Eh oui ! surtout les filles bonnes à marier car sinon elles ne peuvent plus s’unir dans l’année.
MC: Vous pouvez bien le dire, la Semaine Sainte était beaucoup plus belle et plus vivante autrefois.
Mme J : Malheureusement c’est comme ça !
MC: Malgré tout, bonne fête de Pâques, chère Madame Jérémiade.
Mme J : Eh oui, cher Monsieur Chagrin, à la fin du Gloria nous chanterons l’Alléluia
1 - Les Offices des Ténèbres étaient célébrés les jeudi, vendredi et samedi saints durant la nuit et au lever du jour. C’est pourquoi ils sont dits « Offices des Ténèbres ». À la fin de la cérémonie, on frappait de la main sur son banc ou sur son livre ou avec une planchette à battant appelé en monégasque « tarabàcula ». Ce bruit représenterait la confusion et le désordre produits sur la terre à la mort de JésusChrist.
2 - C’est un proverbe monégasque qui est une invitation à la patience car le Gloria est relativement long… en attendant des jours meilleurs de joie et de réjouissance.