Citron de Menton : la filière s’adapte en temps de crise
Depuis les mesures de confinement, les agrumiculteurs ont dû s’adapter pour vendre leurs stocks de citrons. Commandes en ligne ou auprès de grands magasins... certains ont trouvé des alternatives
Alors que le monde entier est à l’arrêt, Dame Nature – elle – se moque bien du confinement. Même en temps de crise, les citronniers de Menton ont paisiblement continué à se dorer l’écorce au soleil. Depuis cet hiver, les agrumiculteurs se retrouvent avec des tonnes de fruits sur les arbres. « Cette crise sanitaire tombe en pleine récolte du citron de Menton qui commence dès novembre et se poursuit jusqu’en avril-mai. En ce moment, les arbres sont très chargés en fruits et nous avons un volume de production excellent. Pour nous, c’est un véritable gâchis car il est très compliqué d’écouler nos stocks », résume avec amertume Christophe Sacchelli, producteur et président de l’Association pour la promotion du citron de Menton (APCM) (1). Rappelons qu’en 2018, les agrumiculteurs de Menton ont connu une année catastrophique après un épisode neigeux en pleine Fête du citron. Le gel des arbres avait eu des répercussions sur la saison 2019. Cette année, la quantité très importante d’agrumes était pleine de promesses... Malheureusement, la situation sanitaire a définitivement enterré les juteuses perspectives d’une année en or. Début mars, une partie de la Fête du citron a été annulée pour éviter la propagation du Covid-19. « C’est un manque à gagner énorme. Durant les week-ends de corsos, nous pouvons vendre jusqu’à 200 kilos de citron de Menton », précise Christophe Sacchelli.
Sillonner les routes pour vendre en direct des agrumes
Puis, les mesures de confinement ont bloqué toutes les livraisons. « Les restaurants qui avaient passé commande ont bien sûr annulé. Puis, les marchés locaux ont été fermés ou désertés », confie Pierre Ciabaud, membres de l’APCM. Rapidement, les agrumiculteurs ont dû trouver des solutions pour sauver la saison 2020. « Les premiers jours, c’était la panique surtout que nous vivons entièrement de la production des agrumes », témoigne Adrien Gannac, producteur et membre de l’APCM. Avec son père Laurent, il gère la marque « Maison du citron ». Ensemble, les deux Mentonnais ont mis les bouchées doubles pour écouler progressivement cinq tonnes d’agrumes. Tout d’abord, ils ont pu compter sur la vente en ligne. « Avec 30 % de commandes supplémentaires, Internet nous a donné un peu de souffle », confie Adrien Gannac. Depuis le début du confinement, les agrumiculteurs de la « Maison du citron » sillonnent les routes du département pour vendre directement leurs agrumes auprès des magasins de producteurs du Rouret ou de Châteauneuf-Grasse.
« La logistique me fait défaut »
Enfin, Adrien et Laurent Gannac se sont tournés vers de grands magasins d’alimentation comme Satoriz à Nice. Un moyen comme un autre de limiter la casse. « Il y a deux mois, le citron de Menton était vendu près de 7 euros le kilo. Aujourd’hui, on nous l’achète 3,50 euros.
Nous ne gagnons pas d’argent avec ce circuit alternatif mais cela évite d’en perdre trop. » Pour d’autres producteurs de l’APCM, la transition reste particulièrement difficile. « J’ai du mal à m’adapter à la crise car je travaille seul et la logistique me fait défaut, confie l’agrumiculteur Maurice Lottier. Je n’ai pas de salarié et il est impossible pour moi d’assurer toute la chaîne du citron, de la récolte à la commercialisation. » Car depuis le confinement, la station de conditionnement de l’Esat Léon-Mazon
(2) a fermé ses portes. Maurice Lottier doit – en plus de la récolte – réaliser lui-même le calibrage et l’emballage des agrumes. Il doit également gérer le transport. Un suivi bien trop lourd pour lui. « Comme le citron de Menton est un agrume “4 saisons” j’espère pouvoir écouler
(3) une partie de ma récolte cet été. En espérant que la crise sera derrière nous d’ici-là. » 1. Créée en 2004, l’Association pour la promotion du citron de Menton (APCM) a pour objectif la protection et la labellisation du citron de Menton. L’association a obtenu l’indication géographique protégée (IGP). A ce jour, 36 producteurs sont habilités à produire le citron de Menton IGP.
2. La station permet de trier les citrons en fonction de leur calibre. Elle fournit également un colisage officiel mais aussi un numéro de lot pour la traçabilité. 3.LecitrondeMentonbénéficied’unefloraisonrenouveléepratiquement toute l’année.Ainsi, les agrumes peuvent rester longtemps sur l’arbre.