Monaco-Matin

Vente de cafés interdite un arrêté au goût amer

Certains maires prennent des mesures en plus des règles nationales. À depuis vendredi, il est interdit d’acheter à la boulangeri­e son café. Reportage au coeur du village

- LAURENT QUILICI lquilici@nicmatin.fr

ÀTourrette­s-sur-Loup depuis vendredi : plus possible d’aller chercher un café à emporter dans les boulangeri­es, même si l’on repart tout de suite avec. Le maire l’a interdit par arrêté municipal pour stopper des entorses au confinemen­t. Dans les ruelles de ce village du bassin cagnois : la mesure est comprise par certains, jugée excessive par d’autres. Elle est, en tout cas, justifiée du côté de l’édile Damien Bagaria [lire ci-contre].

« Les clients pensent que c’est une blague ! »

« Bien sûr qu’il ne faut pas d’attroupeme­nt », confirme, derrière son comptoir sur lequel trône l’arrêté municipal, Romane Decouture. Elle est cogérante d’une des deux boulangeri­es de la place de la Libération, coeur du village. L’autre était fermée, hier. La patronne développe : « C’est vrai qu’il y avait des clients qui sortaient avec leur café et qui discutaien­t devant la boulangeri­e avant de repartir. Mais, on n’y est pour rien. Déjà qu’on a perdu 50 % de notre chiffre d’affaires depuis le confinemen­t ! On avait enlevé les quatre tables de dehors comme nous l’avaient demandé les gendarmes, on avait beau dire à nos clients de ne pas s’attarder dehors, certains continuaie­nt à le faire. Mais sur la voie publique, même les gendarmes nous avaient dit que ce n’était plus notre affaire. Comment pouvons-nous empêcher nos clients si le maire lui-même n’y arrive pas ? Les habitués des bars, ils sont quatre, et ce qu’ils boivent, ce n’est pas du café... Il y avait quelques mamies, et elles se retrouvent encore maintenant sur les bancs de la place, même sans café. Il y avait aussi des gens de passage, qui travaillen­t dans le BTP.

Mais ils ne restent pas longtemps devant la boulangeri­e et uniquement dans une tranche horaire entre 6 h 30et 7 h 30. Trois-quatre personnes qui se parlent avec des distances de sécurité, quels risques y a-t-il ? », interroge-t-elle.

À ses côtés, sa vendeuse, Alisssa, renchérit : «Les clients pensent que c’est une blague ! Même en leur montrant l’arrêté, ils ont du mal à y croire ».

«Unpeu incohérent »

Romane poursuit : « Ils nous reprochent de ne pas tenir tête au maire. Mais eux, ils ne vont pas lui dire. Et puis je ne vais pas me prendre la tête avec Monsieur Bagaria...».

Gérard et son ami – qui souhaite rester anonyme – allaient chercher leur café à la boulangeri­e. Ils n’ont pas de machine chez eux. « J’en suis privé à cause de quelques cons. Moi je tchatche pas avec les gens dehors », peste le premier.

« Regardez : j’ai acheté une bière, et ça, j’ai toujours le droit de le faire, s’exclame le second. Dans cette logiquelà, il faut tout interdire ! »À quelques pas de la boulangeri­e, Léa regrette : «Ilfaut respecter le confinemen­t. Il y en a qui exagèrent et ne prennent pas les choses au sérieux. » « C’est un peu incohérent, relève pour sa part Charlotte. Il y en a aussi qui vont récupérer leur repas au restaurant et qui s’attardent un peu. Avec tous ces interdits, on déresponsa­bilise encore les gens au lieu de leur apprendre à se protéger. »

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Dans une des deux boulangeri­es de Tourrettes-sur-Loup, la gérante doit montrer l’arrêté aux clients qui « ne veulent pas y croire ». (Photo L.Q)

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