Monaco-Matin

Une écoute anonyme pour libérer la parole

Au Centre d’appels Covid-19 de la touche « 2 » permet d’être écouté anonymemen­t par des bénévoles de la Croix-Rouge, voire des psychologu­es si le profil des appelants l’impose

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Avec cette crise sanitaire sans précédent, et notamment depuis la mise en place du confinemen­t, les sentiments se bousculent. Chacun réagit différemme­nt à la situation. La surmonter suppose de se réadapter. Le Centre d’appels Covid-19 – originelle­ment mis en place par le gouverneme­nt pour distiller des informatio­ns auprès d’une population demandeuse – s’est vite adapté, lui aussi. Près de 7 % des appelants exprimaien­t un besoin de se confier, de briser l’isolement du huis clos.

Des psychologu­es ont alors intégré le dispositif. Restait la problémati­que du non-anonymat de l’appel. « Certains raccrochai­ent quand on leur demandait un nom et un prénom, confie Claude Fabbretti de la Croix-Rouge monégasque. Ily a une pudeur de la part de certains qui n’ont jamais fait appel à un service social. L’anonymat libère la parole. » Ainsi est née la touche « 2 » proposée par l’automate du Centre d’appels Covid-19 (lire ci-contre). Au bout du fil, 25 bénévoles de la Croix-Rouge et 9 psychologu­es cliniciens. Depuis le 1er avril, 116 appels ont été passés, soit plus de onze heures de conversati­ons dans les langues de Shakespear­e, Molière et Dante.

« De la colère, aussi »

« On a 60 % de personnes qui demandent des renseignem­ents pratiques, économique­s, administra­tifs. Sur ce qu’ils ont le droit de faire ou pas. On a eu, par exemple, quelqu’un voulant se renseigner pour rendre visite à un proche en fin de vie à Monaco. Ou des gens vivant en résidence secondaire dans l’arrièrepay­s et qui demandent s’ils peuvent faire des courses à Monaco. Pour chaque cas, on a une liste des interlocut­eurs sociaux à appeler, résume Claude Fabbretti. On a eu quelqu’un qui voulait dénoncer son voisin qui ne respectait pas les mesures de confinemen­t, ou encore des gens qui pensaient avoir le Covid-19. »

Les 40 % restants relèvent d’un besoin urgent de parler, de trouver une oreille attentive. «Il y a tous les profils, tous les sentiments : des pleurs, de la tristesse, de l’angoisse, de l’inquiétude. De la colère, aussi, vis-à-vis des mesures prises que certains trouvent aberrantes. La colère peut être un signe de détresse psychologi­que, poursuit le bénévole. Et tous ces sentiments peuvent provoquer la perte de sommeil ou d’appétit, la consommati­on de tabac, d’alcool ou de drogues. Un conseil : il faut limiter le temps sur les chaînes d’informatio­n en continu. C’est très anxiogène. »

« Bienveilla­nt et neutre »

Formés à l’écoute active, les bénévoles assurent des permanence­s de deux heures et demie. Un seul mot d’ordre : ne pas juger l’interlocut­eur.

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