« Seul le déconfinement nous permettra de repérer des situations qui se sont déroulées à huis clos »
Caroline Sanmori-Gwozdz, psychologue-clinicienne et bénévole à la Croix-Rouge monégasque
Psychologue-clinicienne à Monaco, Caroline SanmoriGwozdz est l’une des neuf psychologues bénévoles de la Croix-Rouge monégasque à fournir une oreille attentive en seconde instance, c’est-à-dire quand le cas de l’appelant ne rentre plus dans le champ de compétences de l’un des écoutants de l’association. Cette « professionnelle de l’écoute » prend alors le relais.
Quels types de cas avez-vous eu àgérer?
Je retiendrais, par exemple, celui d’une personne âgée d’environ ans, en réelle souffrance et isolée, qui nous a appelés pour un autre prétexte et qui finalement ne voulait que deux choses : une présence et parler. Je n’ai pas eu à gérer de situations extrêmement lourdes qui relevaient d’une autre orientation. Si on est confronté à une personne qui menace de passer à l’acte et qui peut être un danger pour elle ou autrui, il y a une troisième instance, le Dr EvaMaria Beetz-Lobono, psychiatre référente au CHPG, qui, avec ses collègues, s’occupe des situations de crise.
Quel impact psychologique peut avoir le confinement ?
Pour un psychisme serein, le confinement est déjà difficile. Mais pour des personnes qui souffrent de troubles addictifs, dépressifs ou psychologiques, le confinement peut accentuer ces troubles. Les situations de violences intrafamiliales peuvent aussi être en augmentation. Je crois que, malheureusement, ce sera après la fin du confinement que l’on verra quels dégâts celui-ci aura créés. Seul le déconfinement nous permettra de repérer des situations qui se sont déroulées à huis clos. Le travail des psychologues et psychiatres risque d’être démultiplié.
La sémantique a toute son importance. Par exemple, vous n’utilisez jamais le terme « traumatisme » dans vos consultations…
Le traumatisme est quelque chose de précis. On parle, par exemple, de choc posttraumatique après un événement vécu et passé. Là, on parle plutôt d’un état un peu instable, d’une insécurité liée au fait que l’on possède peu de connaissances, qu’on vit quelque chose de nouveau. Il ne faut pas utiliser ce terme car la personne pourrait s’enfermer dedans, l’entendre comme une injonction. Il faut plutôt introduire des visualisations et termes positifs, proposer aux personnes d’être créatives, de développer en elles des capacités d’adaptation. On reste tous inégaux sur la façon de réagir. L’écoute nous permet de comprendre comment la personne fonctionne, quelles sont ses sources de plaisir. Cela permet d’éviter qu’elle se considère comme une victime ou qu’elle adopte une posture passive. Le mot à retenir serait : résilience. Ou la capacité de faire de cet événement de vie une force plutôt qu’une fragilité.