Devenir père dans cette période mouvementée Psy
L’accès aux salles d’accouchement et aux maternités a été restreint. Toutefois, cela n’empêchera pas les jeunes papas d’endosser ce nouveau statut auprès de leur nouveau-né
Elles s’appellent Lou, Julie, Fanny... elles ont la trentaine et s’apprêtent à donner la vie. Que ce soit leur premier enfant, le deuxième ou le troisième, la naissance d’un bébé est toujours un moment unique. Pour elles, il est teinté d’un sentiment étrange parce que c’est dans les jours ou les semaines à venir qu’elles doivent accoucher. Et toutes se posent la question, avec leur compagnon, de la place de ce dernier. Car certaines maternités ont restreint drastiquement le périmètre des visites voire l’accès à la salle d’accouchement y compris pour ces futurs papas. Des décisions qui leur semblent dures, voire injustes. Ces hommes ont peur de manquer quelque chose, d’avoir du mal à intégrer leur nouveau statut de père dans ces circonstances. Pourtant, rien dans les circonstances ne les empêchera d’endosser ce rôle. Le Dr Karine Sorci-Cuttaia, pédopsychiatre au sein du pôle femmemère-enfant du CHU de Nice veut rassurer.
« Nous nous préoccupons tout particulièrement aujourd’hui de la situation de ces femmes enceintes et des pères à leurs côtés. La question du “devenir parent” dans ces circonstances particulièrement angoissantes mérite toute notre attention. Durant toute la grossesse se tissent des échanges entre la mère, le bébé et bien sûr le père. Nous devons soutenir cette continuité entre la grossesse et le postnatal. Ce triangle père mère bébé est structurant et fondamental. Mais ce n’est pas tout. Il y a autour d’eux l’ensemble des professionnels de santé qui vont les accompagner et sécuriser la naissance.
La future maman doit à chaque instant garder en tête qu’elle n’est pas seule. Lorsqu’il y a de l’inconnu, on a besoin d’être entouré. Il s’agit pour nous, soignants, de rendre visible ce qui constitue la base de notre travail en périnatalité : la possibilité du maintien des liens sécures avec les sages-femmes et les médecins malgré la distanciation sociale, la solidité du cadre hospitalier. » Les jeunes mères ne sont donc absolument pas livrées à elles-mêmes, elles repartent d’ailleurs des maternités avec beaucoup d’informations, de fiches, de numéros à contacter, peut-être davantage qu’en temps habituel. « Il faut garder en tête que les décisions actuelles révèlent de mesure de sécurité, de précaution et non de l’interdit », souligne la pédopsychiatre. L’intention est donc protectrice.
Tout ne se joue pas le jour J
Alors on se doute, avec de nouvelles règles et l’impossibilité pour le futur père d’être systématiquement présent aux consultations voire à l’accouchement, la triade père mère enfant est un peu déséquilibrée. Car, comme le rappelle le Dr Sorci-Cuttaia « si la grossesse relève de l’intime féminin, le désir d’enfant se partage, c’est un projet à deux. Les pères prennent aujourd’hui une part active à la naissance de leurs bébés. Sans perdre les aspects traditionnels de la paternité, ils engagent aujourd’hui leur affectivité auprès de leurs nouveaunés (peau à peau, premier bain). La coupure du cordon est un événement
Ainsi ce sont bien les parents, ensemble, qui accueillent le nouveauné. Ils instaurent ainsi une relation précoce avec lui et consolident les affectations sociales symboliques. » Le papa n’est pas seulement celui qui est désigné comme tel, c’est celui qui s’est investi affectivement dans la grossesse et qui va accompagner le bébé dans les premiers soins. « Durant cette période de crise, il ne s’agit pas de réduire leur statut à des autorisations de visites où leur présence serait juste tolérée. Non, il faut leur permettre de trouver leur juste place dans un climat de sécurité pour tous. Chaque maternité va devoir réfléchir et s’ajuster pour pouvoir répondre aux exigences de la paternité. Chaque père doit trouver son temps et son espace. Celui-ci qui pourra être différent en fonction des possibilités et des organisations de chaque établissement. »
La question des liens essentiels
Et finalement, si l’on pose un regard