Monaco-Matin

L’hôtel du Cap-Eden-Roc : « Faire front et se projeter »

Le palace du cap d’Antibes fête ses 150 ans cette année. Il s’active pour être prêt en cas d’ouverture dans les prochaines semaines. Et planche surtout sur les prochaines saisons

- PROPOS RECUEILLIS PAR VINCENT BELLANGER vbellanger@nicematin.fr

Cela devait être un événement. Une grande fête. Un anniversai­re peu commun. Cent cinquante ans d’existence. La légende de l’Hôtel du CapEden-Roc est ainsi faite d’imprévus et de rebondisse­ments. L’Histoire retiendra que l’année de son siècle et demi, les grilles du palace antibois sont restées… fermées pour l’ouverture qui était prévue le 17 avril. A faire face, comme le monde entier, à l’une des plus importante­s crises sanitaires. Et si à l’heure actuelle, le directeur, Philippe Perd, ne sait pas encore quand il pourra de nouveau accueillir ses fidèles clients, il sait que l’hôtel et ses employés se relèveront. Comme, toujours.

Comment vivez-vous cette période ?

C’est la première fois que nous vivons une situation semblable. Avant même de penser à la perte du chiffre d’affaires, notre priorité a été de rassurer nos collaborat­eurs, qui pouvaient être dans un état de stress. Ils sont saisonnier­s et ont toujours fait preuve de loyauté envers l’hôtel. Il était important de communique­r avec eux pour leur dire que l’on comptait ouvrir. Que l’on comptait sur eux. Ensuite, les mesures prises par le gouverneme­nt en proposant la mise au chômage partiel, nous ont aidés pour gérer les effectifs (). On est rassurant. On communique beaucoup. Chaque matin, nous avons une conférence vidéo avec l’ensemble du comité de direction. On garde le contact à tous les niveaux en espérant que cette saison va enfin démarrer.

On travaille sur plusieurs scénarii en fonction des mesures qui seront prises. On se prépare à une ouverture le  juin, mais rien n’est certain…

On aimerait certes avoir plus de lisibilité surtout au niveau du bar et du restaurant. Car pour nous mettre en route, il nous faut plusieurs semaines. Trois pour l’Hôtel du Cap-Eden-Roc et dix jours pour le château SaintMarti­n.

()

Comment cela se passe avec votre clientèle ?

On a  à  clients fidèles, à qui j’ai personnell­ement écrit. Nous en avons eu aussi plusieurs au téléphone. Ils ont toujours envie de venir.

Et au niveau des annulation­s ?

Depuis avril, chaque lundi, on fait un point sur les trente prochains jours. Une fois que le Cannes Lions et le Festival internatio­nal du film de Cannes ont été annulés, nous avons eu très vite beaucoup d’annulation­s. Notamment la clientèle américaine qui représente pratiqueme­nt  % de nos réservatio­ns en mai et juin. Pour juillet, la situation s’est stabilisée. Heureuseme­nt : car on a connu tout de même des journées où l’on a perdu entre   à   euros de réservatio­ns. Cela va très vite.

Comment s’annoncent justement juillet, août et septembre ?

Si en juin, on est à encore  % de réservatio­n portefeuil­le ( % l’an dernier). On est très optimiste pour juillet. A cette période de l’année on devrait être à  % portefeuil­le on est toujours sur  %. Pour août, on est sur la même tendance. Et septembre, on est sur les mêmes chiffres que l’an dernier. On s’aperçoit que les clients veulent être certain de ne pas pouvoir voyager avant d’annuler.

En cas d’ouverture, quelles sont leurs craintes ?

La crainte de plusieurs clients est le risque d’être confinés en quarantain­e au retour dans leur pays. Ça, c’est un vrai problème. Et on n’a pas la réponse à cette interrogat­ion. Si on n’impose pas la quarantain­e au retour de voyage au niveau européen, Angleterre inclus, la clientèle européenne sera présente. Pour beaucoup, la Côte d’Azur reste un vrai besoin. Surtout après trois mois de confinemen­t…

Les mesures de sécurité vont changer…

On regarde déjà comment anticiper les comporteme­nts des voyageurs dans ce type d’hôtellerie. Se retrouver face à

un réceptionn­iste ou un barman avec un masque, un système de protection est assez contraigna­nt. On va toutefois devoir l’envisager au départ. On sait aussi qu’au niveau du gril, nous n’allons plus pouvoir servir trois cents couverts. Tout cela est normal. En revanche, il ne faut pas, non plus, tomber dans l’excès et en faire trop. On ne peut pas donner l’impression au client qu’il rentre dans un hôpital. On doit procurer de l’émotion, du rêve dans un cadre de respect des mesures d’hygiène. Sinon, autant rester fermés.

Vous avez des pistes ?

On travaille sur différents scénarii : de la prise en charge du client dès la descente de l’avion à la façon de l’enregistre­r, de nettoyer sa chambre, de le servir.

Allez-vous pouvoir continuer vos offres Spa, fitness, coiffeur, etc. ?

Cela sera plus compliqué pour tous ce qui est Spa, mais les instituts de beauté ont le droit de rouvrir le  mai avec des mesures mises en place. Je pense que ce n’est pas totalement incompatib­le. On envisage d’ouvrir ces services, soins, pédicure, on a aussi des soins en extérieur, ça sera un avantage.

Pour le fitness, on va mettre des mesures de distanciat­ion.

L’hôtel fête ses  ans…

Cela devait être un moment particulie­r. Une date importante où l’on avait longuement travaillé sur les festivités. Un travail de près de trois ans… On est forcément déçus. On ne peut pas réécrire l’histoire. On célébrera les  différemme­nt : pourquoi ne pas faire quelque chose l’an prochain ?

Vous aviez aussi l’objectif de faire évoluer la restaurati­on et de viser l’étoile…

On garde nos objectifs. On a injecté beaucoup de moyens pour la rénovation et on a le talent pour décrocher une étoile d’ici deux ans. Tout le concept a été revu et repensé autour de l’arrivée comme chef consultant d’Eric Frechon. Ce dernier avec Arnaud Poëtte et l’ensemble des équipes ont beaucoup travaillé depuis septembre. Toutes les cartes ont été testées. Nous allons avoir une offre remarquabl­e pour la création de notre restaurant du soir Lou Roc. On est prêts mais très frustrés de pas pouvoir dévoiler cette offre. On espère que ce sera le cas dans quelques semaines.

L’Hôtel du Cap peut-il être en danger financière­ment parlant ?

L’Hôtel du Cap ne sera pas en danger. On a une situation financière extrêmemen­t solide qui nous permettra de traverser cette période. Et ce, même si on devait fermer cette saison.

On sent que tout en gérant cette période vous vous êtes déjà penchés sur -.

Évidemment. On sait qu’il faudra au moins trois ans pour retrouver le niveau d’activité que nous avons connu en  [N.D.L.R. une année exceptionn­elle pour l’hôtel]. Même si on ouvre en , on pense déjà à . On ne pourra jamais rattraper ne serait-ce que la moitié de notre chiffre d’affaires qui avait été budgété.

1. En pleine période l’hôtel du Cap fonctionne avec 550 employés. Il y a un peu plus de 90 personnes en CDI. Si jamais l’hôtel ouvre cet été, 250 à 300 employés rejoindrai­ent l’établissem­ent.

2. L’Hôtel du Cap-Eden-Roc à Antibes et le château Saint-Martin de Vence appartienn­ent à la collection du groupe Oetker.

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Philippe Perd, directeur de l’Hôtel du Cap-Eden-Roc : « On sait qu’il faudra au moins trois ans pour retrouver le niveau d’activité que l’on a connu en  ». (DR)

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