Monaco-Matin

Street art : fresque participat­ive

Le street-artist Arthur Simony, qui s’est fait connaître par ses installati­ons disséminée­s aux quatre coins de la capitale, invite tous ceux qui le souhaitent à participer à l’opération “Ensemble, merci“

- LAURENCE LUCCHESI llucchesi@nicematin.fr

Il respire la bienveilla­nce ! Et la dernière initiative de cette « Amélie Poulain au masculin », inviter tous ceux qui le souhaitent à participer à l’opération Ensemble merci, va encore dans ce sens.

Né à Paris en 1985, Arthur Simony est un artiste peintre issu de l’art urbain. Papa d’une petite Elisabeth-Jeanne de dix-huit mois, ce bouillonna­nt trentenair­e l’associe parfois à son processus créatif, sous la forme de petites vidéos attendriss­antes et jubilatoir­es à souhait. Epris de mots, il associe la littératur­e et la poésie à ses oeuvres (dans son Panthéon se trouvent réunis notamment Arthur Rimbaud, Saint François d’Assise et Kipling) qui sont ainsi chargées, dit-il, « en émotions et en ondes positives ». C’est à l’âge de seize ans que sa passion est née, lorsqu’il a commencé à dessiner un portrait sur les coins de table du lycée. Une tête ronde avec des cheveux bouclés, un dessin dont les traits se féminisero­nt au fil des années, avec des formes étirées, de longs cous et de grands yeux évoquant irrésistib­lement la patte de l’un de ses peintres fétiches : Modigliani. Né exactement à la même date que lui, coïncidenc­e troublante, un siècle plus tôt. Et aussi, ajoute Arthur Simony, «juif méditerran­éen également, fou de poésie, de petits cafés, de bouquets de fleurs offerts aux femmes, tout comme lui ! »

Le visage de Jeanne (en hommage à la femme de cet illustre peintre) est ainsi apparu dans les rues du 10e arrondisse­ment de Paris en 2011 sur des palettes, des portes et autres objets abandonnés. Comme une obsession, ou une catharsis plutôt, par rapport au destin tragique de cette grande amoureuse, qui s’était défenestré­e le lendemain de la disparitio­n de son cher Modigliani.

« Pour moi, explique Arthur Simony, c’était vraiment une nécessité de la représente­r. Il y a cette phrase de Rilke que j’adore dans Lettres à un jeune poète qui dit : une oeuvre d’art est bonne quand elle est née d’une nécessité, c’est la nature de son origine qui la juge. » Quoi qu’il en soit, grâce au visage de Jeanne, le graffiti non-violent d’Arthur était né : « J’aimais bien l’idée de sortir un objet de sa condition en le faisant devenir une oeuvre d’art. Je faisais du graffiti sur tout ce que je trouvais dans la rue, matelas, bureaux, planches. Je taguais dessus et je les laissais à la portée des gens. qui avaient le choix de les emmener chez eux ou pas. C’est comme ça que j’ai fait pas mal de rencontres, et que mon petit personnage a commencé à être un peu connu dans le coin. Je crois que les gens ont ressenti que j’étais pur dans ma démarche, car dans mon travail je parle beaucoup d’amour, de résilience, d’acceptatio­n. Et cela m’aide à devenir meilleur. »

De fil en aiguille, on lui propose de participer à des expos, d’abord dans son secteur, puis à des événements lui donnant de plus en plus de visibilité. C’est ainsi qu’il est partie prenante en 2013 de l’exposition collective Échappée belle au Grand Palais, en 2017 à l’exposition Artmonist à la galerie genevoise D10, et en 2020 : une chasse au trésor interactiv­e pour retrouver un bouquet de fleurs créé en papiers nobles où sur chaque pétale se trouvait un vers du poème de Paul Eluard, Je t’aime.

Trévise ensemble, déjà, en 

Mais c’est en 2019 qu’Arthur Simony s’est vraiment fait connaître avec la fresque Trévise ensemble, dans le 9 arrondisse­ment de

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Paris. Un événement qui revêt pour lui une significat­ion toute particuliè­re, car Arthur Simony habite le coin depuis son enfance. Ici, tout le monde le connaît. C’est à la demande des riverains, des commerçant­s et de la mairie que l’artiste a pris place sur les lieux du chantier de l’explosion de la rue de Trévise.

Peu à peu les couleurs ont fleuri, et comme sa démarche est collaborat­ive, c’est Ensemble qu’il a baptisé cette oeuvre. « J’ai écrit le mot Ensemble en noir des milliers de fois, car l’idée c’était de mettre de la couleur tous ensemble. » Et, en à peine quatre jours, les petits caractères noirs ont progressiv­ement laissé place à un grand mur floral… Comme pour exorciser le drame, semer des milliers de graines de couleur-bonheur pour purger la souffrance, qui suintait encore de la sinistre palissade. C’est dans le même état d’esprit qu’Arthur Simony, a eu cette lumineuse idée, pour faire un pied de nez à l’actuelle crise sanitaire : l’opération Ensemble, merci. Un projet destiné à occuper les enfants, les grands, et rendre hommage à tous ceux qui nous permettent de traverser cette période difficile.

Merci, à l’infini

Le motif écrit « Merci », pattern qui s’assemble à l’infini sur Instagram, demande à être colorié ensemble et posté sur le réseau social avec le hashtag #ensembleme­rci. « Si, par définition, le street-art a vocation à naître à l’extérieur, son intérêt repose également dans ses racines fondamenta­lement démocratiq­ues. La création visuelle que chacun peut observer à chaque coin de rue doit également pouvoir être réalisée par tout un chacun », explique Arthur Simony. Et d’ajouter : « Ce merci, adressons-le évidemment au personnel soignant, mais également aux caissières et caissiers, aux forces de l’ordre, aux éboueurs, aux livreurs, et à tous ceux qui nous permettent de continuer à vivre dans cette période difficile. Merci ! » Un Merci que l’on a forcément envie, aussi de lui retourner. Via Instagram donc, avec des intentions arc-en-ciel au bout des doigts…

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Sortir un objet de sa condition en le faisant devenir oeuvre d’art”

instagram.com/ensembleme­rci (lien vers la fresque sur instagram)

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