Mercredi
Le secteur de la culture est indubitablement en grand danger et les dommages causés par la coronapandémie sont pour nombre d’institutions irrémédiables. Elles n’en mourront pas toutes mais toutes en sont frappées. On en vient même à craindre pour l’avenir de structures aussi emblématiques que l’Opéra de Paris que beaucoup pensaient pourtant indestructible. Je n’ignore pas l’exaspération causée par les excès des « cultureux » : les productions grotesques et coûteuses de metteurs en scène paranoïaques, la quête incessante de subventions publiques d’organisateurs qui conspuent les politiques puis mordent la main qui les a nourris, les tribunes donneuses de leçons des stars qui vivent sur le système comme la puce sur le chien et somment le bon peuple de lutter contre le réchauffement climatique tout en voyageant en classe business ou pleurnichent sur les pauvres dans des robes du soir à
plusieurs milliers d’euros. Ne vous laissez pas pour autant emporter par cette exaspération. De tout temps, si la création artistique est pratiquement toujours une démarche individuelle, la pratique culturelle ressort du collectif et donc de démarches politiques, laïques ou religieuses. Sans autorité organisatrice, l’art peut exister mais pas la culture. On a donc vu surgir dans l’actualité quelques politiciens enfourchant le premier débat qui passe et proclamer la main sur le coeur l’intérêt sans faille qu’ils portent à ce dossier, alors qu’ils n’ont jamais mis un orteil dans un théâtre ou une exposition, sauf à ce que la manifestation se déroule dans leur circonscription électorale… Aujourd’hui on ne peut plus se moquer de ces travers. , million de personnes sont menacées directement et dans l’immédiat. Des festivals vont disparaître, des artistes renoncer à leur carrière pour pouvoir nourrir leur famille, les secteurs d’activité périphériques, hôtellerie, restaurants, agences de voyage et de billetterie, autres commerces sombrent entraînant leur lot de faillites, de désespoirs, de suicides.
Dans ce cadre, l’intervention du président de la République était attendue. Elle n’a pas franchement convaincu. L’image d’un Emmanuel
Macron en bras de chemises assisté d’un Franck Riester, prenant des notes comme s’il découvrait des décisions auxquelles il n’avait pas été associé, était lunaire. Que signifiaient les références à Robinson Crusoé et l’invitation à « enfourcher le tigre » ? Mystère. En tout cas, cette crise est peut-être une opportunité à saisir pour que ce secteur ne retombe pas dans les ornières de la « subventionnite » à tous crins, de l’élitisme dévoyé, de la démocratisation proclamée et rarement réalisée, du chacun pour soi des stars et de la misère des soutiers du spectacle. La balle est dans le camp des politiques, certes, mais aussi et surtout des créateurs et des artistes.
« Le président donne le souffle et la ligne, le premier ministre construit le contenu et fait les réglages ? »