Confinés : les uns résignés, les autres prêts à exploser Psycho
Qu’on ait envie d’embrasser sa grand-mère ou de faire une grande balade, c’est une chose. Qu’on « pète un plomb » c’en est une autre. Nous ne sommes pas égaux face au confinement
D’un côté la jeune mère de famille qui jongle entre devoirs à la maison et télétravail, de l’autre le senior qui a dû stopper ses rendez-vous boulistes du samedi après-midi et les visites de ses petits-enfants. Qui des deux vit le mieux le confinement ? Ou le moins mal ? Impossible à dire. Car ce n’est pas l’âge, l’entourage, l’habitat ou l’activité professionnelle qui expliquent pourquoi certains se sentent plutôt heureux et épanouis pendant cette période pour le moins particulière tandis que d’autres ont clairement l’impression d’être au fond du seau. Il est d’ailleurs surprenant de constater que ce n’est pas forcément ceux à qui l’on s’attendait qui ont eu le plus de difficultés à s’accommoder de la quarantaine. Christine Ganneval, psychanalyste niçoise, a vu les choses évoluer au fil du temps. « Les quinze premiers jours, il y a eu une sorte de sidération. On ne s’attendait pas à devoir rester chez nous du jour au lendemain. Chez les patients plus fragiles, j’ai constaté une décompensation : ils ont manifesté beaucoup d’anxiété voire une perte de repères avec des problèmes de sommeil, d’agressivité, etc. L’inconnu, l’aspect totalement inédit de la situation, l’incertitude professionnelle, personnelle, en a dérouté certains au point de développer un syndrome dépressif. »
C’est dès cette première quinzaine de confinement que des troubles se sont installés : consommation excessive d’alcool, de tabac, de médicaments, troubles alimentaires... « Ce type de comportement s’explique par un besoin de se rassurer, de trouver du réconfort, d’où le fait par exemple que certains se réfugient dans la nourriture. C’est une manière pour eux de se protéger à leur manière du monde extérieur, de la menace du virus », analyse Christine Ganneval. Une remarque qui fait écho à l’étude du Dr Cherikh (lire en ouverture du cahier).
Deuxième choc
La psychanalyste poursuit : sortis. » Pourquoi les uns s’en sont mieux sortis que les autres ? « Ceux qui ont une richesse intérieure, qui sont stables, ne souffrent pas spécialement du confinement, ils s’en accommodent. Car ils disposent des sa famille, ses amis, c’est normal. « Nous avons tous le droit de nous plaindre, d’en avoir marre ! Nous vivons un véritable traumatisme collectif », résume Christine Ganneval. Là où le bât blesse, c’est lorsque survient cette impression d’être sur le point d’exploser. Ou à l’inverse de trouver le confinement absolument formidable, d’apprécier n’avoir plus aucun contact humain et d’avoir envie que la situation se poursuive... il y a peut-être là un problème en termes de relations sociales à travailler par exemple.
L’occasion de s’arrêter et faire le point
Dans tous les cas, il ne faut pas hésiter à parler. D’abord à son entourage, verbaliser son état émotionnel. Ensuite à un professionnel. Nombreux praticiens proposent des téléconsultations. Toutefois, certains se heurtent au manque d’intimité : difficile de parler de ses problèmes de couple quand le conjoint est dans la pièce à côté. Christine Ganneval conclut sur une note positive : « Le confinement a laissé beaucoup de temps pour faire le point, réfléchir. C’est un moment de pause forcée qui peut être bénéfique. Ceux qui en ont réellement souffert – il est normal de trouver ça embêtant et de vouloir retrouver la vie d’avant – peuvent s’interroger. Il y a peut-être des problèmes dont ils ignoraient l’existence et qu’ils ont besoin de résoudre. » Bien souvent, le temps de réflexion que l’on s’accorde est un début à la prise de conscience. Bonne nouvelle « parfois, il suffit de peu pour dénouer des problèmes ». L’occasion de prendre de bonnes résolutions, un nouveau départ, plus serein.