Prison ferme pour un avocat ivre au volant
Habituellement, il participe aux audiences du tribunal correctionnel pour défendre les prévenus soupçonnés d’infractions diverses. Mais cette fois, cet avocat monégasque est l’auteur d’un délit : il a été contrôlé au volant de sa voiture avec une alcoolémie de 1,40 gramme dans le sang.
Le 12 janvier dernier, après avoir avalé une demi-bouteille de champagne, il prend sa petite voiture pour s’approvisionner en pack d’eau à la supérette voisine. Sur le parcours, une Mercedes quitte un stationnement. C’est le choc, inévitable. « J’ai été heurté, précise le quinquagénaire. Cette berline quittait un lieu sans stationnement matérialisé… » Quand des policiers, alertés, arrivent pour les constatations d’usage, ils remarquent l’ivresse du chauffeur.
« Ce qui m’est arrivé est une erreur »
« Vous n’aviez pas pu souffler, note la présidente Françoise Barbier-Chassaing (*) avec beaucoup plus d’un gramme d’alcool dans le sang. La façon dont vous vous êtes extirpé de votre voiture montre un défaut de maîtrise évident dû à l’excès de boisson. Vous avez déjà été condamné trois fois pour ivresse au volant, avec une progression des sanctions. Aujourd’hui souffrez-vous toujours d’alcoolémie ? »
Le prévenu assure avoir complètement arrêté depuis cette date. « Ce qui m’est arrivé est une erreur. J’ai entamé des soins dans un hôpital dès le 20 janvier. J’en suis sorti quatorze jours plus tard. Aujourd’hui, je ne bois plus une goutte d’alcool et je n’ai pas l’intention de recommencer. Une incarcération serait extrêmement difficile, car j’ai un certificat médical. »
Quatrième comparution
Au moment de requérir, la procureure Alexia Brianti se fait l’avocate du diable. Si les faits sont admis, la représentante du parquet général note des contradictions entre les déclarations au moment des faits et celles avancées à la barre.
« À l’époque, vous aviez rendez-vous avec un client au cap Martin. Aujourd’hui vous preniez votre auto pour aller à la supérette. Le choc ? La victime contredit votre assertion. Et, au cours de votre garde à vue, vous évoquiez un malaise. Avec les trois condamnations précédentes, le stage de sensibilisation n’a pas porté les fruits escomptés. Vous comparaissez pour la quatrième fois. C’est un risque de trop. La question se pose par rapport à votre état de santé psychique, incompatible avec une absence de liberté. On peut prononcer une peine d’emprisonnement de deux mois fractionnée pour raison professionnelle et son exécution après une expertise. »
« Sa guérison prendra du temps »
La défense jette aussitôt toutes ses forces oratoires pour éviter la prison. Me Sarah Filippi réclame une amende, car elle a la conviction que la prison serait une erreur. « Je dois défendre mon aîné qui suscite l’admiration au sein du barreau. On n’arrive pas à retrouver dans ce dossier les évidences d’un choc ! Pas de vidéo pour constater l’absence de défaut de maîtrise ! Mon client doit bénéficier d’une non-responsabilité. Il est malade depuis ces années car il est traqué, perquisitionné, interrogé… Au lieu de prendre des médicaments, il va boire… Oui, sa guérison prendra du temps. Pour une rechute, mérite-t-il deux mois d’incarcération ? »
Toujours présumé innocent
Le tribunal a prononcé une peine d’un an d’emprisonnement, dont quinze jours ferme et liberté d’épreuve pendant deux ans. Toutefois, cette condamnation en première instance ne peut être encore considérée comme définitive puisque Me Sarah Filippi a décidé de faire appel de la décision. L’avocat monégasque reste à ce jour toujours présumé innocent.