L’élection impossible
Ce sera donc le juin. C’est ce que devraient annoncer, aujourd’hui, Édouard Philippe et son ministre de l’Intérieur Christophe Castaner. Lâché en rase campagne par le Conseil scientifique qui a renvoyé l’exécutif à ses responsabilités en refusant de se prononcer sur une date de second tour, le gouvernement a fini par trancher. Aucune solution n’étant réellement satisfaisante, il a opté pour celle qu’il considère comme la moins pire pour organiser le deuxième round des municipales dans les communes qui n’ont pas élu leur maire.
Dernier épisode de la vie publique française avant confinement, le premier tour n’aurait jamais dû avoir lieu le mars.
En le maintenant tout en étant conscient que les urnes resteraient vraisemblablement fermées le dimanche suivant, l’exécutif s’est pris à son propre piège.
De jour en jour, de rapports en réunions, les hypothèses se sont multipliées. Septembre ? Trop proche de la rentrée. Mars ,
avec les régionales et les départementales ? Trop loin et trop
compliqué. Janvier ? Une nouvelle date sortie
du chapeau on se sait trop comment, mercredi soir, à l’issue de la réunion entre le Premier ministre et les responsables de parti. Fin juin ? C’est finalement le scénario retenu, même s’il n’est pas totalement dénué de risques. De part et d’autre de l’échiquier politique, chacun avait évidemment un avis différent sur la question. Alors que la majorité penchait plutôt pour juin, le président de l’Assemblée nationale, Richard Ferrand, très influent en Macronie, y était opposé. Au-delà des clivages, les maires sortants non élus au premier tour ont poussé très fortement pour une solution rapide, à l’image de Christian Estrosi (Nice), Anne Hidalgo (Paris) ou Nicolas Florian (Bordeaux). On les comprend : un report après l’été aurait nécessité de rejouer le premier tour. Ces élus, dont certains se sont illustrés par leur volontarisme lors de la crise et voient leurs efforts salués par leurs administrés, mettent en avant, à juste titre, la nécessité de relancer l’économie. En raison de la crise comme du non-renouvellement de conseils municipaux et d’intercommunalités, les commandes publiques sont, en effet, en baisse de % dans le secteur du BTP. Une situation qui ne peut pas durer. Le mois prochain, on se prépare donc à vivre une campagne masquée, encore plus riquiqui que celle du premier tour, et à enregistrer une participation encore plus faible encore que le mars (, %). Il faut dire qu’après deux mois de confinement et à la veille d’un été plein d’incertitudes, les Français n’ont vraiment pas la tête à voter, même avec un masque. Après la distanciation sociale, le gouvernement est en train d’inventer la distanciation démocratique.
« Le gouvernement a fini par trancher. [En choisissant le 28 juin], il a opté pour la solution qu’il considère comme la moins pire. »