Une fresque « éphémère » qui sème le trouble dans le Var
Un vent de folie souffle au château d’Entrecasteaux : pendant le confinement, une oeuvre a envahi la façade de la galerie du plasticien Patrice Chambrier. Ce qui n’est pas du goût du maire
D’un côté, la mairie. Qui regarde d’un mauvais oeil la fresque géante de Patrice Chambrier. De l’autre, le plasticien. Lui parle à coeur ouvert d’un projet… un peu délirant mais aussi d’inspiration, de street art. Voilà pour le décor ! Ici, pas de querelle de clocher, mais quelques explications d’usage. Une réflexion entre le patrimoine ancien et l’art contemporain. Bienvenue à Entrecasteaux, village classé pour sa beauté naturelle, surmonté de son château du XIe siècle et de son jardin à la française.
Robots, martiens…
Depuis sa galerie, Patrice Chambrier a troqué ses chevalets pour son pan de mur extérieur. Cette pandémie qui a mis le monde entier à terre et confiné plus de la moitié de ses habitants l’a fait réfléchir sur l’état de santé de notre planète. C’est alors que la thématique d’une peinture murale à ciel ouvert s’est imposée à lui. Le sujet s’inscrit dans un futur meilleur avec des animaux, des robots, des Martiens qui dialoguent entre eux dans un langage parfois étrange. Les couleurs sont vives et dynamiques, ce qui donne au vieux château d’en face un petit sursaut de jeunesse. « Trois semaines de confinement ont passé et le 8 avril, exactement, mon projet artistique avait pris forme », indique l’artiste. « J’ai axé mon travail sur le monde d’après. Celui que j’aimerais voir évoluer dans le bon sens comme beaucoup d’autres personnes. La thématique de la fresque parle de l’évolution de l’humanité jusqu’à aujourd’hui et même dans le futur. » Il détaille sa démarche : « La première partie est consacrée à l’avancement du singe vers le robot. La deuxième partie parle de l’extinction des espèces. C’est un sujet qui me touche particulièrement. J’y ai, d’ailleurs, inséré mon autoportrait. »
Fait accompli
Un « choc » pour Romain Debray, le maire. « Cette fresque a été réalisée pendant le confinement et nous l’avons découverte lors du déconfinement. Nous étions devant le fait accompli. De nombreux habitants étaient furieux et comme nous venons d’obtenir le label ‘‘Village de caractère” , je lui ai demandé de remettre les choses en l’état, puis d’obtenir une autorisation des Bâtiments de France. Comme tout le monde. »
Pour réaliser son rêve éphémère, le plasticien a passé plus de cent quarante heures devant sa façade, sous l’oeil parfois étonné des villageois. Il a utilisé de la peinture acrylique et des bombes aérosol. Son message : crier haut et fort que l’environnement est en danger et que l’écologie est en berne.
Sans provocation
Patrice Chambrier sait qu’il est hors la loi. Mais il ne parle pas de provocation. Il a reçu une lettre recommandée lui demandant de remettre en état la façade de sa galerie et celle de son atelier. L’artiste a alors écrit au ministre de la Culture. Il sollicite sa clémence dans l’application de la loi. Il espère ainsi que la fresque pourra rester en place un certain temps avant de disparaître.
Galerie-atelier, 2 montée du Château, à Entrecasteaux. Ouvert tous les jours sur rendez-vous. Rens. 06.47.20.91.40.