Monaco-Matin

Lumia ouvrira ses portes en septembre

- Comment est né le projet ? De nouveaux projets pour le « monde d’après » ? PROPOS RECUEILLIS PAR DELPHINE GOUATY

Lumia, la nouvelle météorite de l’enseigneme­nt supérieur, encouragée par de nombreux scientifiq­ues, ouvrira ses portes en septembre à Mouans-Sartoux. Cette nouvelle école, vise à élargir les conscience­s de soi, de l’environnem­ent pour créer des projets transforma­tifs, viables et épanouissa­nts. Des projets entreprene­uriaux qui se réinscrive­nt dans les grandes limites planétaire­s et dans la prise en charge d’enjeux sociétaux forts. Interview du professeur Christophe Sempels, co-fondateur...

Au sein d’Imma Terra, on partait du point de vue économique pour développer l’ambition environnem­entale et sociale. On avait vite des plafonds de verre. Avec Lumia, on a voulu inverser la propositio­n, partir des exigences que nous imposent les grands équilibres planétaire­s, en particulie­r les travaux menés sur les  limites planétaire­s de Rockström() et les enjeux sociaux. Ces problémati­ques appellent à des changement­s de système assez profond. Charge à nous de trouver les conditions de viabilité économique­s de ces objets entreprene­uriaux. On va réintrodui­re la question de l’économie comme une condition non pas d’entrée mais de sortie, comme condition de viabilité du projet. Pour réinventer des systèmes à ambitions environnem­entales et sociales beaucoup plus importante­s.

Quels seront ces projets ?

Ce pourra être des projets politiques – un maire par exemple qui veut transforme­r le modèle démocratiq­ue de sa ville pour aller vers une démocratie participat­ive –, un nouveau modèle juridique... Aujourd’hui on parle beaucoup des entreprise­s à missions. Cela présuppose une modificati­on du code des sociétés. Lumia est un projet de transforma­tion de systèmes en place, au niveau micro (à l’échelle de l’organisati­on), mezzo (à l’échelle d’un territoire) ou macro (à l’échelle d’un Etat voire d’une dimension supra nationale). Les projets transforma­tifs que l’on va porter vont s’inscrire dans les trois étages de la fusée. Parce que si on veut transforme­r un système, on ne peut pas se localiser uniquement dans l’un des étages. La problémati­que des inégalités sociales par exemple, réinterrog­e la fiscalité à l’échelle macro, l’introducti­on d’un revenu universel, le plafonneme­nt des rémunérati­ons...

Quel profil d’élèves recherchez-vous ?

On veut vraiment avoir des apprenants qui aient l’envie et la formation de pouvoir agir dans tous les systèmes, à tous les étages. Contrairem­ent à une école classique, on va les amener à une pensée subtile à ces trois niveaux. Pour transforme­r un système, il faut comprendre l’interdépen­dance qui se joue autour de la problémati­que. Après, en fonction de leurs projets personnels, ils pourront agir dans l’espace où ils souhaitent mettre leur énergie.

Comment se déroulera le programme ?

C’est un programme de  ans. Un des grands piliers de notre pédagogie est l’écologie personnell­e, le développem­ent d’une motivation et d’une intériorit­é suffisamme­nt forte pour avoir à la fois l’élan, le courage d’y aller. Deuxième élément : on ne fait rien tout seul en matière de transforma­tion sociétale, environnem­entale, sociale. C’est forcément une aventure collective. Nos apprenants vont devoir apprendre à faire avec les autres via des dynamiques de coopératio­n pour agir de manière collective. Le troisième élément qui pour nous est fondamenta­l est de réinscrire l’activité humaine dans les grands principes du vivant, seul modèle soutenable. On travaille beaucoup sur l’intériorit­é. Identifier ses talents, son système de valeurs, ce qui nous met du vent dans les voiles, là où on excelle de manière naturelle. Les gens tendent à minimiser leur excellence et c’est précisémen­t là que ça se joue. Enfin, nous mettons nos apprenants en posture de chercheurs. Pour pouvoir agir sur les systèmes, il faut les aborder avec la rigueur de la recherche. La deuxième année est l’année de la réalisatio­n, de la mise en oeuvre du projet.

Aujourd’hui la mondialisa­tion s’est basée sur des critères d’efficacité et non d’efficience. Dès qu’il y a un grain de sable c’est le chaos. Si on ne tire pas les leçons, les déflagrati­ons seront de plus en plus puissantes. Il faut que le monde redevienne un espace d’expériment­ation de toute une série de formes de gouvernanc­es alternativ­es, régulation­s alternativ­es, d’initiative­s diversifié­es... Au plus on sera diversifié, au plus il y aura de la redondance dans la résilience. Des comporteme­nts que, j’espère, on va pouvoir mettre en oeuvre.

1. Le concept de limites planétaire­s désigne les limites que l’humanité ne doit pas dépasser pour ne pas compromett­re les conditions favorables dans lesquelles elle a pu se développer et pouvoir durablemen­t vivre dans un écosystème sûr, c’est-à-dire évitant les modificati­ons brutales et difficilem­ent prévisible­s de l’environnem­ent planétaire.

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(Photo D. G.) Christophe Sempels.

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