Monaco-Matin

En fauteuil roulant il est blessé par un bus

- JEAN-MARIE FIORUCCI * Assesseurs : Florestan Bellinzona et Morgan Raymond.

Quelle attitude adopter quand un bus refuse de s’arrêter pour prendre une personne en fauteuil roulant ? Un passager handicapé a réagi après l’arrivée d’un premier chauffeur qui n’a pas daigné déployer la rampe d’accès au motif de l’impossibil­ité de la faire fonctionne­r. Puis d’un second, désolé de ne pas l’embarquer pour les mêmes raisons, tout en conseillan­t à cet usager de patienter jusqu’à la prochaine navette annoncée dans les minutes suivantes. À l’approche du troisième autobus jaune à la station de la place d’Armes, il décide de monter coûte que coûte pour se rendre à Nice. Il s’avance sur le marchepied… mais le chauffeur redémarre avec la portière ouverte. Le quinquagén­aire invalide est blessé.

Il porte plainte et cette affaire de blessures involontai­res finit devant le tribunal correction­nel. À l’audience le président Jérôme Fougeras-Lavergnoll­e (*) affiche son incompréhe­nsion face à un tel comporteme­nt. « C’est une obligation d’aider une personne handicapée à accéder aux transports en commun. Au lieu d’actionner le degré métallique, vous fermez la porte ! Pourquoi ? »

« Mauvaise décision »

À la barre, le prévenu, un Mentonnais de 55 ans, allègue ses raisons pour se justifier. « La rampe ne fonctionna­it pas. J’ai informé ce Monsieur. J’avais l’esprit perturbé par un deuil… » Le magistrat demeure inquiet de noter, au regard de l’enquête, le redémarrag­e du car au moment où la victime essayait de grimper sur la plateforme. « J’ai pris la mauvaise décision, reconnaît l’intéressé. Mais je n’imaginais pas que cette personne tenait la porte. Je me suis arrêté spontanéme­nt dès qu’il a protesté. En revanche, je n’avais pas remarqué la plaie. Cette erreur me mine depuis le début… »

Le président s’étonne encore du mécanisme défaillant de la rampe d’accès laissé en l’état et de l’absence de la société de transport dans le prétoire. « S’il arrivait quelque chose, j’étais responsabl­e, assure le chauffeur. Avec un bus à soufflet, ce dispositif incliné ne résiste pas aux ralentisse­urs. À chaque passage sur ces gendarmes couchés, ils subissent un choc… »

Quant au plaignant, il ne se constitue pas partie civile afin d’éviter une tourmente financière supplément­aire au prévenu dont le casier judiciaire comporte une mention pour violences.

Dispensé de peine

D’où la réaction du premier substitut Olivier Zamphiroff. « C’est un demandeur généreux et courageux. Il est présent en fauteuil roulant. Mal située, la trappe ne fonctionna­it pas : à prendre en considérat­ion ! Toutefois, la sanction ne doit pas mettre le prévenu au ban de cette société de transport. Il est seul et l’employeur, en tant que responsabl­e, n’est pas représenté. Une amende assortie du sursis ou la dispense de la peine. »

Le tribunal acquiescer­a : déclaré coupable, le chauffeur est dispensé de peine, comme l’autorisent les nouveaux textes.

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La rampe d’accès était défectueus­e. Le chauffeur du bus jaune a démarré au moment où le passager invalide accédait à la plateforme. (Photo archives MM)

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