Monaco-Matin

Ils entament une grève de la faim au centre de rétention d’Auvare

- Y.D.

« Si vous ne voulez pas me garder dans votre pays parce que je n’ai pas de papiers, c’est la loi, je l’accepte. Mais ne me gardez pas plus longtemps enfermé ! Renvoyez-moi dans mon pays… »

Depuis le centre de rétention de la caserne Auvare, où sont gardées les personnes en situation irrégulièr­e avant leur expulsion, Mohamed (1), Tunisien, exprime son désarroi. « Oui, c’est vrai, je n’ai pas de papiers. Mais je ne suis pas un délinquant, je n’ai rien fait de mal… Certains sont ici depuis trois semaines ! Nous sommes 13, ici. Et certains d’entre nous vont entamer une grève de la faim… »

À ses côtés, Youcef (1), Algérien, expose : « Certains sont 5 par chambre. Il n’y a pas de masques, pas de gel, rien… On a droit à une heure de balade seulement dans la journée. On est enfermés et il n’y a même pas une télé pour faire passer le temps… »

Jusqu’à  jours de rétention possibles

Quant à Rachid (1), il le dit : « Nous entamons une grève de la faim. Certains sont âgés, d’autres diabétique­s… Ce n’est pas pour faire semblant, en ne mangeant pas, ces gens mettent leur vie en danger… » Au centre de rétention administra­tive (CRA), l’associatio­n Forum réfugiés, qui regrette cette situation de grève de la faim, indique que « le CRA fonctionne sur le délai légal de 30 jours maximum », et qu’il n’y a à ce jour « pas de différence avec la situation en temps normal, à part sur la capacité, qui est de 20 personnes maximum, au lieu de 40 ».

Contactée, la Préfecture précise que « la rétention se répartit en plusieurs séquences à l’issue desquelles les personnes retenues sont présentées à un Juge de la liberté et de la détention (JLD) qui valide ou non la prolongati­on de la rétention ». Et de détailler : « Une première séquence de 48 heures à l’issue de laquelle le retenu peut effectuer une nouvelle période de 28 jours. À l’issue de cette nouvelle période le JLD peut accepter une prolongati­on de 30 jours aux fins d’organiser l’éloignemen­t de la personne retenue. Enfin dans des circonstan­ces particuliè­res, le JLD peut encore autoriser une prolongati­on de 15 jours renouvelab­le une fois ». La rétention peut ainsi durer jusqu’à 90 jours en fonction des circonstan­ces « même si ce délai demeure exceptionn­el ».

Frontières fermées : vers des libération­s ?

Si certains pays ont rouvert leurs frontières, d’autres, comme l’Algérie, les ont gardées fermées. Ce qui repousse l’expulsion des ressortiss­ants de ces zones. Y aurat-il, comme lors du confinemen­t, des libération­s ?

« Il n’y a pas de décision collective en la matière, ce sont l’autorité administra­tive et l’autorité judiciaire, chacune en ce qui les concerne, qui statuent sur chaque situation individuel­le », indique la préfecture. Concernant les conditions de rétention décrites par les retenus, la préfecture dément : « L’accès à la cour de promenade est libre et une télévision est accessible dans la salle de repos commune. »

Et d’insister aussi sur les conditions sanitaires d’accueil : «Un masque est remis à chaque personne et d’autres sont ensuite fournis à la demande. Du gel hydroalcoo­lique est disponible à l’entrée ainsi qu’au réfectoire et, à la demande, les fonctionna­ires de police peuvent fournir du gel pour le nettoyage des mains. Cependant, vu les risques d’actes autoagress­ifs (ingestion…), ce type de produit ne peut être laissé à dispositio­n des personnes retenues. Du savon est par ailleurs disponible dans l’ensemble des salles de bains et remplacé à la demande. »

Quant à la promiscuit­é, la préfecture assure que « l’ensemble des six chambres est ouvert et la capacité est passée de 40 personnes à 20 afin de respecter les règles de distanciat­ions sociales, soit 3 à 4 personnes maximum par chambre. Elles disposent donc de l’espace nécessaire à la garantie des mesures de distanciat­ion préconisée­s (chaque lit est espacé d’au minimum 3 mètres), ces conditions de vie ayant été validées par les membres du corps médical. »

(1) Les prénoms ont été modifiés.

 ??  ?? Le centre de rétention de la caserne Auvare, où transitent les personnes en situation irrégulièr­e. (Photo archives Franck Fernandes)
Le centre de rétention de la caserne Auvare, où transitent les personnes en situation irrégulièr­e. (Photo archives Franck Fernandes)

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