Monaco-Matin

COURSE PÉDESTRE

Ancienne recordwoma­n du marathon, la Britanniqu­e installée à Monaco a accepté d’embarquer Nice-Matin pour un footing d’entraîneme­nt à Eze. Souvenirs de carrière détaillés et train assuré

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C’était une petite forme d’expédition. Un défi à relever sans être sûr de tenir le coup dans les petits sentiers escarpés du plateau de la Justice. Mais le guide de classe internatio­nal a su se montrer clément avec un rythme moyen abordable.

Et pourtant ! Recordwoma­n du marathon pendant plus de seize ans, Paula Radcliffe est une légende de l’athlétisme aujourd’hui à la retraite. Une ancienne profession­nelle de 46 ans au physique toujours affûté.

Installée à Monaco depuis 2005, la Britanniqu­e coule une retraite paisible mais toujours sportive. Les premières chaleurs ne sont d’ailleurs pas du genre à la freiner. Running aux pieds et montre au poignet, la native de Northwich a traîné Nice-Matin dans sa foulée il y a une dizaine de jours. Au programme, une sortie souvenirs au parc de la Grande Corniche entre Mercantour et Grande Bleue. « J’ai fait ma préparatio­n finale pour le marathon de New-York ici entre 2007 et 2009, détaille-t-elle dans un français parfait teinté d’accent british. C’est dur mais c’est bien pour un circuit qui n’est pas plat. En ce moment, je cours tous les jours. ça me rappelle ma jeunesse, j’avais commencé par le cross à 9 ans. »

« Ça va ? Je ne vous ralentis pas ? »

Depuis, les années ont passé et les médailles se sont accumulées. Les kilomètres aussi pour une passionnée épanouie dans son élément. Son terrain de jeu habituel. Celui qu’elle connaît par coeur ou presque.

Si le rythme de la course nous semble un peu élevé lors des premières minutes, le parcours est finalement plutôt roulant et les souvenirs de Paula Radcliffe nous embarquent. « Ça va, je ne vous ralentis pas trop ? » « Non, ça va, répond-elle en souriant. Au moins je peux parler en même temps. »

Une sortie organisée à Eze avec quelques sentiers de traverse direction Font-Romeu, Londres, Düsseldorf, Chicago ou encore Dubaï. Courses, entraîneme­nts, exploits. L’ancienne athlète n’a rien oublié de son glorieux passé. Surtout pas ses victoires sur marathon et son record du monde claqué en 2 h 15’ 25’’ sur ses terres londonienn­es en 2003.

« En 2002, je découvrais la discipline, je devais apprendre. Je ne savais pas trop où j’en étais, je ne faisais pas attention, je m’amusais. Je courais librement. Et finalement je gagne en 2h18’55’’ et le record du monde était de 2h18’47’’. J’ai dit à mon mari que je pouvais battre le record à Chicago en octobre. On s’est préparé à Font-Romeu tout l’été, on est parti à Chicago et je l’ai eu (2h17’18’’). »

Entre  et  km par jour

L’année suivante, Paula Radcliffe améliore la performanc­e à Londres et place la barre encore plus haut. Son record ne tombera qu’en octobre 2019 avec le chrono fou de la Kényane Brigid Kosgei (2h14’04’’).

A l’époque, la Britanniqu­e avalait environ 120 miles en sept jours, soit près de 200 kilomètres chaque semaine lors de ses grosses semaines d’entraîneme­nt. Considérab­le.

Des années plus tard, elle parcourt les sentiers pour le plaisir avec une fréquence toujours soutenue. Dans les chemins du plateau de la Justice, Paula Radcliffe court souvent seule mais croise du (beau) monde. A commencer par Claude Puel, ancien entraîneur de l’AS Monaco habitué des petits sentiers pour s’entretenir. « Il aime courir ici. Quand il est parti en Angleterre, à Leicester, il m’a demandé où il pouvait aller courir pour retrouver quelque chose qui ressemblai­t. Il avait de la chance, à côté de Leicester il y a des forêts superbes. » Le récit est clair. Limpide malgré l’effort. La quadragéna­ire avale son footing sans forcer son talent naturel. «Aujourd’hui je fais entre 10 et 15 kilomètres par jour. » Histoire de se sentir en forme dans une région adoptée depuis des années.

« Le métier de maman ? Elle court »

L’Angleterre ? Elle ne s’y verrait plus y habiter. « Ça me manque un peu, surtout la famille et les amis. Mais avec le Brexit, je préfère rester ici. C’est superbe. On peut être dehors toute l’année, aller à la plage, faire du ski... »

Maman de deux enfants (Isla, 13 ans, et Raphaël, 9 ans), l’athlète au CV long comme le bras continue de vivre de sa passion. Entraîne, commente pour la BBC et conseille les plus jeunes. Avec une image et un nom qui parlent toujours au monde de l’athlétisme. Ses enfants, eux, ont mis du temps à comprendre. « Au début ils ne savaient pas trop. Quand on a demandé à ma fille : ‘‘Qu’est-ce qu’ils font tes parents ?’’ Elle a répondu : « Maman elle court et papa il regarde sur l’ordinateur », sourit-elle. Mon mari m’entraînait et était aussi manager. »

8 km et 43 minutes. Le footing matinal pimenté par une pincée de dénivelé est déjà terminé. Passionnan­t et enivrant. Pour nous, il est temps de regagner la voiture, histoire de souffler un peu. Mais Paula relance déjà sa montre et regagne son domicile en courant. Comme depuis plus de 35 ans...

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Reportage : Vivien SEILLER Photos : Eric OTTINO

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