Le retour des territoires
La pointe d’accent du Sud-Ouest qui colore les premières paroles de Jean Castex est plus significative qu’on ne le croit. Celui qui, auprès d’Emmanuel Macron, va diriger « le nouveau chemin » pour lequel il a été choisi a, entre plusieurs missions immédiates, celui d’incarner le dialogue et la proximité avec les territoires. Par ce mot, un peu vague il faut le dire, on entend, en fait, tout ce qui n’est pas Paris, tout ce qui vit loin de la capitale en se sentant abandonné par elle. Tous ceux qui travaillent en France en se sentant incompris de ses dirigeants. Emmanuel Macron a sans doute commis l’erreur, dans les deux premières années de son mandat, de mésestimer leur rôle. À l’occasion de la crise des « gilets jaunes », il a rencontré les élus locaux, dans son tour de France, et découvert
leur importance. Plus tard, avec l’autre crise du quinquennat, celle du Covid, il a vu de près les lourdeurs de l’administration centrale, et, au contraire, l’implication des maires de terrain et la qualité de leur entente directe avec les préfets. Il n’est donc pas anormal que le maire de Prades, petite ville de habitants des Pyrénées-Orientales, ait été choisi pour diriger le dernier gouvernement du quinquennat Macron. Un maire rural du Sud-Ouest a remplacé le maire d’une grande ville.
Pour le reste, les deux hommes, Édouard Philippe et
Jean Castex ont plus d’un point commun : ils sont tous deux énarques, tous deux venus de la droite, l’un proche de Juppé, le second de Sarkozy. Plus familier
réconcilier la France, dont les fractures se sont révélées de manière brutale depuis trois ans. L’enjeu est évidemment capital, et la ruralité de Castex est en effet une qualité importante pour un homme qui, apparemment, en a bien d’autres puisqu’il a été baptisé par un des ministres qu’il a servi auparavant de « couteau suisse », c’est-à-dire capable de tout faire, y compris de ramener de l’unité dans un pays déchiré. La composition de son équipe devrait être connue dans la journée. Elle ne sera sans doute pas fondamentalement
« L’enjeu – réconcilier la France – est capital, et la ruralité de Jean Castex est pour cela une qualité importante. »
des problèmes de santé, le M. Déconfinement, discret jusqu’à avant-hier, est donc chargé de proposer, outre un nouveau gouvernement, sur lequel à l’évidence le Président se penche depuis plusieurs jours, de nouvelles méthodes pour différente de celle qui l’a précédée, mais, comme toujours, construire un gouvernement tient de l’équilibrisme : la parité implique que les femmes y soient aussi nombreuses que les hommes, la diversité doit s’y faire sentir, et surtout l’ouverture : venu de la droite – il a démissionné de LR il y a quelques jours seulement –, entouré sans doute d’hommes et de femmes venus de ce côté de l’échiquier politique, Jean Castex doit aussi faire leur place à d’anciens socialistes qui ont choisi Macron en , ainsi que des représentants du Modem et des Républicains « Macro-compatibles ». C’est le casse-tête du
« et en même temps ».