Six mois avec sursis pour un cas de harcèlement au travail
Une assistante de vie a brisé la carrière d’une jeune intérimaire par des actes odieux au quotidien. Déclarée coupable de perversion envers sa victime, elle devra verser 24 000 euros
Ce dossier de harcèlement au travail évoqué devant le tribunal correctionnel pouvait troubler à plus d’un titre. Outre une tendance étrange aux « prosopopées » (c’est-à-dire prêter la parole à un absent ou à un être inanimé) d’une assistante de vie (AVS), cette affaire décrivait le redoutable comportement de cette femme de 60 ans dans son milieu professionnel face à sa victime. Jusqu’à briser la carrière d’une jeune intérimaire et dégoûter les autres employées de la petite cellule aidante pour les seniors dépendants. Au cours de l’audience, l’instruction du dossier a mis rapidement en exergue le caractère autoritaire de cette personne. Que ressentait-elle au moment d’aborder l’infraction reprochée ? Ni sentiments ni émotions sont perceptibles à la barre. Pourtant sa conduite irrespectueuse ont démontré les conséquences désastreuses et les nuisances causées dans l’ambiance et la qualité du travail en binôme.
« Ce sont des morts qui guidaient ma conduite »
Jusqu’au conflit de générations. Voilà la véritable cause : une vision différente pour accompagner une personne âgée dans les actes essentiels de la vie. Dès lors, la sexagénaire va imposer de manière insidieuse et répétée son comportement abusif afin de déstabiliser la jeune intérimaire. En complément, des messages à connotation raciste seront adressés à la jeune employée. Comment peut-on arriver à un tel degré de haine ? « Ce sont les morts qui guidaient ma conduite » , déclare la mise en cause. Silence dans le prétoire avant de saisir l’étonnement du président Florestan Bellinzona:« Soit vous dites la vérité, ou bien vous avez besoin de soins psychiatriques. Comment est-ce possible que la défunte mère de la victime vous demande de lui transmettre une mise en garde par courrier, comme vous l’avez déclaré au cours de l’enquête ? Pour l’humilier, vous expectoriez par la bouche ! personne dont vous aviez la charge de vous occuper était-elle au courant du climat néfaste instauré ? « Aucun problème pour la prévenue : « Ce Monsieur était satisfait. Il était au courant des tensions, mais il ne voulait pas s’immiscer. Peutêtre ai-je dépassé le cadre de mes fonctions. Quand j’ai craché, j’étais fragilisée. Je venais d’être opérée. Personne ne m’entendait. » D’autres témoignages ont présenté l’assistante comme une personne caractérielle et très autoritaire. En revanche, la jeune dame ne posait aucun problème. « Vous avez vraiment tendance à affabuler, relève le magistrat, avec des réactions étranges de mépris. »
« On voulait tous démissionner »
La plaignante s’exprime avec crainte à son tour. « Madame trouvait le personnel toxique et incompétent. Il lui fallait un souffre-douleur. Au sein de l’équipe, on voulait tous démissionner. Mais j’étais obligée de travailler. Aujourd’hui je suis en arrêt maladie, sous antidépresseurs et suivie par un psychiatre. » Conseil de la partie civile, Me Pierre-Anne Noghes-Dumonceau, choquée, bouleversée, a rajouté : « Comme une meute, cette femme s’est lâchée sur sa proie. On passe de l’anodin à l’inadmissible : des excréments laissés dans une pièce, un laxatif dans la nourriture... On instille un mal-être jusqu’à des menaces de mort. Condamnez l’inacceptable au versement de 38 000 euros. »
* Assesseurs : Mme Carole Delorme-Le Floch et M. Ludovic Leclerc.