Monaco-Matin

« Ces renforts sécurisero­nt les Moulins et les Liserons »

Depuis hier soir, 60 CRS venus de Paris doivent ramener le calme dans ces quartiers de Nice ,au surlendema­in d’une troisième fusillade. La patronne des policiers azuréens explique leur rôle

- PROPOS RECUEILLIS PAR CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Notre objectif, c’est de permettre aux gens de vivre tranquille­ment. C’est important que les gens n’aient pas à demander pardon quand ils traversent un hall d’immeuble, que les enfants puissent rentrer de l’école sans croiser des dealers... ou sans tomber au milieu d’une fusillade. » Les rafales de tirs aux portes d’un supermarch­é, lundi matin, dans le quartier des Moulins, ont marqué les esprits. Elles illustrent l’escalade de la violence dans les cités niçoises, sur fond de guerres de territoire liées au trafic de drogue. En réponse, le ministère de l’Intérieur envoie une compagnie de CRS à Nice. Une réponse temporaire. Nadine Le Calonnec, directrice départemen­tale de la sécurité publique des Alpes-Maritimes, a accepté d’expliquer les enjeux en primeur pour Nice-Matin.

En quoi consistent ces renforts en provenance de Paris vers Nice ?

Le renfort essentiel est une unité de force mobile, qui assurera sa première vacation aujourd’hui [hier]. On espère la garder de manière un peu pérenne sur Nice. Cela représente un apport de plus d’une soixantain­e d’effectifs, soit une compagnie entière de CRS. Elle va nous permettre d’être présents à la fois sur les Liserons et les Moulins, en plus des effectifs de la DDSP .

Des renforts CRS avaient déjà été affectés aux Liserons, avant de repartir à la frontière. Cette fois, ce sont des renforts extérieurs...

Nous sommes très satisfaits d’avoir une unité de force mobile qui n’impose pas de déliter le dispositif frontière. En outre, elle vient en complément des deux unités de force mobile en renfort saisonnier sur les Alpes-Maritimes – l’une à Nice, l’autre à Cannes.

Par essence, une force mobile est nomade. Que faut-il entendre par une présence « pérenne » ?

Nous les avons pour une semaine. Nous avons, d’ores et déjà, demandé à ce qu’ils soient renouvelés la semaine prochaine. Et nous demanderon­s à ce qu’ils le soient pour le mois d’août. L’idée, c’est de les avoir jusqu’à la fin de la saison estivale pour pouvoir mettre une présence forte et dissuasive sur les quartiers.

Quels enseigneme­nts tirez-vous de l’expérience aux Liserons ?

J’ai eu l’occasion de discuter avec les habitants. Les forces de police sont très bien accueillie­s dans ces quartiers, où on a quelques perturbate­urs, mais où la majorité des habitants n’aspire qu’à vivre tranquille. Cette présence permet d’exercer des contrôles routiers aux entrées du secteur, de vérifier les coffres, de limiter le transport des produits interdits. Cela nous permet d’investir les parties communes, les caves, les lieux de stockage des deux-roues... Cela permet aussi d’évacuer les épaves, d’améliorer la sécurisati­on grâce à l’éclairage ou la vidéoprote­ction. Cela en lien avec nos partenaire­s : le Ville, la police municipale, le bailleur... La sécurisati­on d’un secteur, cela ne peut pas être que la police nationale.

Comment vont évoluer les CRS au sein de la cité des Moulins ?

Ils seront véhiculés et en patrouille pédestre. La moitié de la CRS sera sur les Moulins, l’autre moitié aux Liserons. Aux Moulins, le quartier sera sectorisé pour pouvoir intervenir efficaceme­nt avec des véhicules en patrouille, des pied-à-terre, des patrouille­s dans les immeubles... On fera des contrôles routiers, à l’intérieur de la cité, dans les halls...

Avec quel équipement ces CRS vont-ils évoluer ?

Ils l’adaptent à la situation locale. Dans un dispositif de sécurisati­on, ils sont habillés avec des tenues de maintien de l’ordre, comme nos effectifs de sécurité publique. Mais s’ils devaient être pris à partie, ils ont tout l’équipement utile : casques et armement intermédia­ire.

Seront-ils présents  h/ ?

Pour l’instant, nous allons les employer plutôt le soir et la nuit, en complément de nos dispositif­s, plus présents matin et après-midi.

Ces renforts peuvent-ils stopper l’escalade qui agite les quartiers depuis le déconfinem­ent ?

Cette présence est indispensa­ble pour rassurer la population, sécuriser les quartiers, être dissuasive. Dès lors qu’on fait du maillage territoria­l, on relève des infraction­s variées, en lien avec le trafic de stupéfiant­s ou le port d’arme. À côté de cela, il y a les enquêtes judiciaire­s, menées par la sûreté départemen­tale et la police judiciaire. Aux Liserons, on a procédé à une trentaine d’interpella­tions depuis début juin : c’est quand même pas mal ! Cela perturbe les organisati­ons, même si on se doute qu’elles essaient de se réorganise­r.

Quid des Moulins, où la PJ a la main sur la récente fusillade ?

La sécurité publique et la sûreté viennent de finaliser une belle affaire, avec des interpella­tions et un certain nombre de saisies – de l’armement notamment. D’autres sont en cours. Je ne doute pas que l’augmentati­on du maillage territoria­l nous permettra, aussi, de rebondir sur d’autres affaires.

Ne risque-t-on pas de déplacer la délinquanc­e un peu plus loin ?

Non, car les gens sont attachés à leur quartier, et cela ne s’exporte pas facilement. On n’est pas inquiet. Les CRS nous permettent de mieux mailler ces territoire­s, mais les effectifs de la sécurité publique sont présents aussi à l’Ariane, en centre-ville... L’objectif, c’est bien de ne rien dégarnir.

Comment lutter en profondeur contre ce mal chronique qu’est le trafic de stups ?

Le procureur de la République a instauré un GLTD [groupe local de traitement de la délinquanc­e] sur la lutte contre le trafic de stupéfiant­s. C’est un travail de partenaria­t. La forfaitisa­tion du délit d’usage de stupéfiant­s, qui va se généralise­r en septembre, va aussi beaucoup nous aider. Elle sera relevée par procès-verbal électroniq­ue [sanctionné par une amende de  €]. Cette lutte contre le trafic des stupéfiant­s passe aussi par la population : quand les gens ont des informatio­ns, ils doivent les porter à la connaissan­ce des services de police, sans se mettre en danger.

En pratique, comment faire ?

Pendant la crise du Covid-, des adresses contacts ont été commniquée­s par circonscri­ption [ex : police-nice@interieur.gouv.fr]. L’informatio­n reste anonyme.

Vous lancez un appel ?

Tout le temps ! On appelle toujours la population à travailler en bonne collaborat­ion avec les services de police. Son travail, ce n’est pas de constituer des milices, mais de travailler avec l’ensemble des acteurs qui contribuen­t à une plus grande tranquilli­té.

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.(Photo Eric Ottino) Le contrôleur général Nadine Le Calonnec, hier après-midi, au siège de la DDSP

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