Monaco-Matin

« L’enfer » du Grand Ida sous leurs balcons

- * Les prénoms ont été modifiés pour respecter l’anonymat.

Au coeur du hall d’immeuble des Mélèzes, le sujet revient en boucle. Pas un jour ne se passe sans que les résidents causent du vacarme ambiant, émanant du chantier du Grand Ida. Il faut dire que leurs balcons donnent littéralem­ent sur le site en travaux – seule l’étroite rue Plati le sépare de la résidence – et sur une foreuse, particuliè­rement bruyante. Des vidéos ont d’ailleurs largement été commentées sur les réseaux sociaux.

« C’est l’enfer toute la journée. On vit dans le bruit et la poussière, peste Lucile (*), actuelleme­nt sans emploi. Le bruit n’était pas si terrible pendant la démolition du bâti. Mais le pire, ce sont les travaux de fondation et la foreuse. » Impossible d’aérer son appartemen­t en journée – sans climatisat­ion, de surcroît – ou de déjeuner en terrasse. « Depuis au moins une semaine, les engins tournent toujours. Les ouvriers ne coupent pas tous en même temps », poursuit-elle. Selon plusieurs résidents, vidéos à l’appui, la foreuse se met même en branle peu avant 8 h du matin. Avant l’horaire autorisé, donc (lire ci-contre). « On est tous conscients qu’il est nécessaire de construire des logements domaniaux. Le projet Grand Ida est d’ailleurs magnifique pour le quartier, avec de la verdure et des équipement­s. Mais ce qui est insupporta­ble à nos yeux, ce sont les discussion­s bruyantes des ouvriers juste avant 7 h du matin ou les dépassemen­ts d’horaires après une bonne journée de travail », poursuit Claude (*), un actif.

Ce lundi, peu avant 21 h 30, sur renseignem­ent d’une riveraine, la Sûreté publique est ainsi intervenue sur le chantier pour faire éteindre un groupe électrogèn­e. « Les consignes sont passées et seront répétées », a assuré Rémy Rolland, administra­teur des Domaines, aux résidents des Mélèzes durant la réunion d’informatio­n pour la réhabilita­tion et la surélévati­on (lire page précédente).

« Je dors moitié moins »

Travailleu­r de nuit, Pascal a vu (*) son temps de sommeil divisé par deux. « Les bonnes nuits, je dormais 8 h. Avec le chantier, je ne dors plus que 4 ou 5 h. Une fois réveillé, vers 10 h du matin, je n’arrive plus à me rendormir. Et les boules Quies ne fonctionne­nt pas vraiment. Je profite des samedis et dimanches pour me reposer », déplore-t-il. Un autre travailleu­r de nuit, lui, a une technique redoutable pour tomber dans les bras de Morphée : doubler les bouchons d’oreille par un casque antibruit. Noémie (*), elle, a littéralem­ent pris ses cliques et ses claques pour se réfugier chez sa mère. « Mon salon et les deux chambres donnent sur le chantier. J’ai les fenêtres fermées toute la journée. Ma fille de 3 ans n’arrive plus à faire sa sieste et, à 17 h, elle s’écroule et tombe de sommeil. On a quitté les lieux pendant une semaine pour ne pas péter les plombs. De là où je suis, j’entends toujours les machines au loin », fulmine-t-elle.

Terrasseme­nt et soutènemen­t jusqu’à l’été

Des doléances exprimées à Patrice Pastor, président délégué de JB Pastor & Fils, le maître d’oeuvre du chantier. « Le terrasseme­nt et le soutènemen­t vont durer jusqu’à l’été 2021. Jusqu’en avril ou mai, ce sera à ciel ouvert et l’on peut considérer que c’est la phase la plus délicate en termes de nuisances, reconnaît Patrice Pastor. Mais le démarrage du gros oeuvre, lequel va démarrer au premier trimestre 2021, va limiter l’impact bruit car les terrasseme­nts seront réalisés en taupe, c’est-à-dire sous une structure. » « Donc, pendant un an, on vit dans l’enfer ? », questionne une habitante. Réponse de Patrice Pastor : « Vous vivez comme toutes les personnes qui se trouvent en bordure d’une opération à Monaco. »

La topographi­e étriquée et sururbanis­ée de la Principaut­é n’aidant pas, en effet.

Dans un communiqué, le Conseil national s’est exprimé sur le sujet sensible des chantiers, réitérant sa demande « que tout soit mis en oeuvre pour limiter les nuisances sonores, en particulie­r par l’obligation d’utiliser des engins insonorisé­s de dernière génération et pour mettre en place des dispositif­s de protection acoustique lorsque cela est possible [et que] les contrôles du gouverneme­nt sur les chantiers soient plus systématiq­ues et que les opérateurs incitent les ouvriers à adopter des comporteme­nts plus que jamais exemplaire­s. »

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La résidence des Mélèzes, en face de celle des Jardins d’Apolline, donne littéralem­ent sur le chantier du Grand Ida.

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