Violences conjugales : décès de Jacqueline Sauvage
Jacqueline Sauvage, 72 ans, devenue pour beaucoup un symbole des violences conjugales après sa condamnation pour avoir tué son mari de trois balles dans le dos, est décédée à son domicile de La Selle-sur-le-Bied (Loiret) un peu plus de trois ans après sa sortie de prison, en décembre 2016, à la faveur d’une grâce présidentielle.
Sylvie, l’une des filles de Jacqueline Sauvage, a confirmé son décès, précisant que les obsèques avaient eu lieu mardi.
« Je suis extrêmement triste, je suis très choquée. Elle nous quitte jeune. L’ensemble de ces souffrances a participé à ce qu’elle nous quitte si tôt », a estimé l’une de ses avocates, Me Nathalie Tomasini.
En première instance comme en appel, Jacqueline Sauvage avait été condamnée aux assises à dix ans de réclusion pour avoir tué son mari de trois balles dans le dos.
Graciée par François Hollande
Après quatre années derrière les barreaux, marquées par une vaste mobilisation en sa faveur, elle était sortie de prison à 69 ans à la suite de la décision de François Hollande de lui accorder une grâce totale. « Jacqueline Sauvage est morte chez elle et non pas en prison là où elle n’avait plus sa place », a réagi, hier, l’ancien président de la République. « Elle n’a pas beaucoup profité de sa tranquillité », a regretté Eva Darlan, la présidente de son comité de soutien.
« Elle a été le symbole de l’injustice et de la violence. Mais à quel prix pour elle et pour sa famille ? Qu’est-ce que ça a changé pour la société ? Rien », a déclaré l’actrice. Son histoire et son calvaire avaient pourtant beaucoup ému. Jacqueline Sauvage l’avait d’ailleurs raconté dans un livre, sorti en mars 2017, au titre évocateur : « Je voulais juste que ça s’arrête » (Fayard). Elle y relatait ses 47 années de vie avec le père violent, jaloux, de ses quatre enfants. « Ma vie me semble un champ de ruines. Mes filles ont subi le pire, mon fils est mort. A quoi bon ? », écrivait-elle alors, regrettant n’avoir pas « su trouver les mots » lors de ses deux procès.
Dans le livre, elle estimait que les magistrats n’ont pas cherché à la comprendre et qu’ils ont mis en doute la parole de ses filles, qui avaient témoigné à charge contre leur père en expliquant avoir été violées et battues.
Symbole de la vive émotion suscitée par l’histoire de cette femme, un téléfilm, inspiré du livre, « Jacqueline Sauvage, c’était lui ou moi », avec Muriel Robin, avait réuni près de huit millions de téléspectateurs en 2018.
« Jacqueline était devenue le symbole du combat contre les violences conjugales », a réagi, hier, Muriel Robin, qui l’avait incarnée à l’écran.
« Je n’ai plus peur »
« La souffrance de Jacqueline n’aura pas servi à rien. En revanche, la souffrance de beaucoup d’autres, plus de 300 par an, n’est pas entendue. Qui prendra le relais ? », a estimé l’actrice sur Europe 1. « On donne des milliards pour sauver l’économie de notre pays, comment ne trouve-t-on pas un milliard pour combattre les violences conjugales ? (...) Il y a plein de Jacqueline Sauvage en France et dans le monde ».
« Elle avait vécu sa grâce comme une justice, un soulagement, un cadeau, mais aussi comme l’injustice pour ceux qui ne l’ont pas crue », a continué l’actrice et humoriste. « Quand on s’appelait au téléphone, je lui demandais comment elle allait. Elle me répondait : “Je n’ai plus peur. C’est bien de se lever le matin et de ne pas avoir peur”. »