Valeur refuge de l’été Virus ou pas, la tribu Reicher n’a pas loupé ses retrouvailles au Trayas
Tous les ans, c’est le même cérémonial. L’été venu, la famille Reicher au grand complet se retrouve dans l’appartement familial du Trayas sur la commune de Saint-Raphaël. Un deux-pièces de 50 m² acquis dans les années soixante-dix puis complété au fil du temps par l’achat de deux studios contigus. Hervé, le grand-père, raconte : « Dans les années soixante, au rez-de-chaussée de cette maison, il y avait une boulangerie dont ma tante connaissait le propriétaire. Et à la belle saison, on venait passer les vacances ici. C’était notre lieu de retrouvailles. On jetait un drap dans le fournil pour dormir et les enfants allaient se baigner à la plage, juste en face. Un jour, sur le balcon du premier, j’ai vu un panneau “A vendre”. Mon père qui avait du flair m’a dit : “Achète !” Je lui ai répondu que je n’avais pas l’argent pour cela. “Ça ne fait rien, achète quand même” a-t-il insisté. Et c’est comme cela que j’ai contracté mon premier prêt bancaire. »
« Ça nous rappelle l’Algérie »
Une acquisition qu’Hervé n’a jamais regrettée. Il faut dire que l’endroit a comme un goût de paradis. « C’est l’un des plus beaux de la Côte d’Azur », confirme celui qui, tout au long de l’année, réside en région parisienne. Quand elle ouvre les fenêtres, la famille Reicher en prend plein la vue : au loin, l’île Saint-Honorat et le monastère des moines de Lérins ; tout près, la pointe NotreDame et la mer, si proche qu’on en ressent presque les embruns. Ce panorama, ce contraste du rouge des roches de l’Estérel et du bleu de la Méditerranée, c’est un peu ce qui a fait vaciller Jeanne, l’épouse d’Hervé. Pour elle non plus, pas question de louper le rendez-vous estival du Trayas. « Ici, ça nous rappelle l’Algérie », dit celle qui revendique ses origines pieds-noirs. Les Reicher y possédaient un cabanon pour y passer l’été. Ils ont reproduit au Trayas ce qu’ils vivaient autrefois, dans l’ancien département français. « Depuis toujours, on fonctionne en tribu. Et on n’imagine pas faire autrement. Il nous est même arrivé de coucher à onze dans le deux-pièces. »
Une promiscuité qui, pour Fabrice, le fils de Jeanne et Hervé, « a un côté rassembleur. Et cela a soudé les liens entre tous les membres du clan Reicher ». Lui aussi vient tous les ans au Trayas.
Comme sa soeur Ghislaine. Comme leurs enfants, Paul, Justin, Oriane, Tanguy et Alix. « Bon, ma femme, Michèle, aimerait sans doute aller ailleurs de temps à autre. Le problème, c’est qu’elle m’a épousé », sourit Fabrice... La crise sanitaire donne-t-elle davantage de saveur à ces vacances 2020 ? « Malgré les deux deuils liés au virus qui ont touché notre famille, ça ne change pas grandchose, non. C’est que nous avons vécu le confinement dans des conditions un peu privilégiées puisque nous vivons tous dans des maisons. Ce n’est pas comme si on avait dû traverser ça enfermés au huitième étage d’un appartement avec deux gosses en bas âge. » Alors non, pas de différence avec ce qu’Hervé, Jeanne et les autres ont connu les années précédentes. « Sinon que l’eau est plus claire, moins polluée et qu’il y a plus de poissons », relève Jeanne. « Et que je ramasse moins de morceaux de plastique dans la mer », complète Fabrice. L’emploi du temps des uns et des autres ? L’agenda est complet : plage, pétanque, resto, randonnées et repas pris en commun. Toujours.
Sur place, la famille a lié de nombreuses amitiés. «On se sent comme chez nous, affirme la souriante Jeanne. Une certaine complicité s’est même nouée avec les gens du Trayas. Par exemple, ceux qui arrivent les premiers à la plage ont pris l’habitude de s’étaler. Rien à voir avec les mesures de distanciation : c’est juste pour garder la place à ceux qui arrivent un peu plus tard ! »
Ainsi, on l’aura compris, les Reicher ne sont pas près de bouleverser leurs habitudes de presque 50 ans.
Le 18 août, les grands-parents lèveront le camp pour regagner leurs pénates parisiens. Ils seront relayés par d’autres membres de la famille. Ainsi va... la tradition.